La droite face au Conseil constitutionnel : pourquoi doit-elle remercier Fabius?

fabius

La collusion politique entre Conseil constitutionnel fabiusien et pouvoir macroniste, ne serait donc qu'une fable. Pourtant, une collusion flagrante dès la démarche du président de la République l'appelant à censurer la loi votée par sa propre majorité.

Cette décision du Conseil constitutionnel fera date car, décision politique, elle a immédiatement des conséquences politiques. Laurent Fabius a réussi à amorcer ce que les intéressés ont peine à réaliser : l'union des droites, de LR jusqu'à Reconquête et au RN. En effet, jeudi soir, les trois partis de droite étaient sur la même ligne : Jordan Bardella dénonçant « un coup de force des juges avec le soutien du président de la République », Laurent Wauquiez « un coup d’État de droit ». S'ils avaient encore besoin d'une boussole pour savoir où est leur centre de gravité, Laurent Fabius vient de la leur donner : l'arrêt de l'immigration de masse fait consensus en France et l'unanimité à droite.

Pour l'opinion publique, malgré les postures et les subtilités, la leçon est claire : Fabius et Macron interdisent toute politique anti-immigration. Pour les parlementaires LR, c'est une humiliation : ils ont joué le jeu de la bonne volonté parlementaire et se retrouvent cocufiés. S'ils étaient logiques, ils devraient enfin assumer une opposition franche à Macron et amorcer un rapprochement avec RN et Reconquête. Non pas pour peser (le peuvent-ils encore ?) mais pour survivre !

Mais Laurent Fabius a fait mieux : non seulement il a démontré, en censurant tranquillement les 35 articles votés par le Parlement, que le référendum était la seule voie possible pour légiférer vraiment sur l'immigration, mais il a aussi convaincu ceux qui en doutaient encore à droite qu'une ou plusieurs modifications de la Constitution seront nécessaires, particulièrement pour clarifier les pouvoirs du Parlement et du Conseil constitutionnel, en s'inspirant des pistes préconisées, sur Boulevard Voltaire, par Guillaume Bernard.

Oui, il faut remercier Laurent Fabius. Il faut le remercier, aussi, pour le service après-vente très fébrile qu'il a rendu, vendredi soir, sur France 5 : devant le front commun de la droite, il a tenu à descendre dans l'arène... politique : « Attaquer le Conseil constitutionnel pour une décision qui est parfaitement régulière et dire » que « c’est un coup d’État, non seulement c’est faux, mais d’une certaine manière, c’est une remise en cause des institutions. Et donc je trouve ça très préoccupant », a-t-il réagi sur France 5. Plus tôt dans la journée, il avait déclaré, visiblement piqué par les déclarations des leaders de droite : « C’est très spécifique dans l’Histoire de considérer que ceux qui ont pour charge de dire le droit font un "coup d’État" contre le droit. En général, quand on développe ce genre de propos, ça fait réfléchir. »

Laurent Fabius a peur, et sa peur ne me paraît pas feinte. Que toute la droite parlementaire - et le RN en fait désormais partie - parle à l'unisson de coup d'État doit en effet le faire réfléchir. Et si, en plus, on se souvient que ce même Conseil constitutionnel, présidé par ce même Laurent Fabius, a, il y a deux ans, validé sans ergoter des restrictions de liberté jamais vues, oui, cela fait réfléchir sur l'étendue du pouvoir de cette institution et son (absence de) fondement démocratique. Ajoutées les unes aux autres, ces décisions du Conseil constitutionnel s'apparentent à un coup d'État... permanent. Laurent Fabius doit d'urgence relire Mitterrand.

Et Laurent Fabius sait mieux que personne que, lorsqu'une majorité à bout de souffle ne répond plus aux attentes populaires et utilise des prétextes juridiques ou constitutionnels pour entraver cette même volonté, tôt ou tard survient une grande alternance, comme en 1981, et que la Ve République est tellement bien faite qu'elle permet des modifications substantielles de la Constitution (combien de modifications, depuis 1958 ?) sans révolution, sans coup d'État. De quoi rassurer Laurent Fabius.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

Vos commentaires

60 commentaires

  1. C’était du « cinéma » tous les accords avaient été pris entre tous avant. C’est une tenaille permanente de notre pays entre l’Union Européenne qui détient tous les pouvoirs et le conseil dont tous les membres sont de gauche. L’urgence c’est que nos compatriotes votent en juin pour avoir des pouvoirs afin de contrer tous ces mondialistes qui amènent l’Europe dans le mur.

  2. Fabius est dans tous les mauvais coups porté à la France , tout le monde se souvient de l’histoire du sang contaminé, du responsable mais pas coupable ; ou encore de l’histoire du Rainbow Warrior en Nouvelle Zelande

  3. Fafa comme on l’appelait jadis quand il sévissait sous Mitterrand était un fringant premier ministre qui ne fit guère profiter les français de ses connaissance en finances publiques. Arrivé là où il est, il continue à ne pas faire profiter les français de ses compétences. Seule excuse ces dernières sont sans doute bien minces en droit constitutionnel. Finalement son parcours professionnel peut donc être qualifié d’exemplaire.

  4. LR savait que de nombreux articles seraient censurés par le conseil constitutionnel, très marqué à gauche et que le texte serait ainsi promulgué.SANS retour devant ´l’Assemblee nationale.
    C’est donc un chèque en blanc au gouvernement qui a été donné, en faisant croire à leurs électeurs que LR avait été efficace en votant des articles « répressifs » alors qu’il savait pertinemment qu’ils seraient censurés.
    C’est une manœuvre politicienne qui doit être dénoncée.

  5. Pays africains critiqués…mais quand les institutions sont corrompues et la démocratie ridiculisée, que reste t’il sinon le coup d’état militaire ? N’en sommes nous pas arrivés là ? Tout comme le manque de justice aboutit à la création des milices et l’oppression à la révolution.
    Voilà la politique de l’Europe et de Macron !

  6. LR savait que certains articles seraient censurés à coups sûrs et savaient également qu’ils y en aurait beaucoup d’autres le Conseil constitutionnel étant marqué à gauche.

  7. Patience…. tous ces gens là ne pourront nier les résultats des élections à venir…. donc ils commencent à s’affoler.
    N’oubliez pas, le 9 Juin : VOTEZ, VOTEZ, VOTEZ ! Comme vous le sentez, mais j’ai l’impression que l’union des Droites est proche…

  8. Il est parfaitement anormal qu’une commission de vieillards, sans compétences juridiques particulières et sans aucune légitimité puisse annuler des lois ou parties votées par le Parlement.
    La conformité des projets par rapport à la Constitution devrait être examinée à l’AN par une commission spécialisée et les aménagements et rectifications effectués en liaison avec le gouvernement.
    Le Conseil Constitutionnel devrait être supprimé ;il est anti-democratique

  9. Nommer Fabius un sage, de plus, président de la sagesse, est une hérésie, en cela, l’autoproclamé « chef » n’est pas à un nos sens-près !
    Cela étant, si cela a eu pour effet de réveiller la droite Française, on ne peut que se féliciter de cette « erreur » de casting !
    Rien n’est cependant gagné pour autant, sans une forte coalition de la droite, pas de soutien électoral de beaucoup de mes amis et moi-même.
    Mesdames Messieurs de la droite, mettez vos égos de côté, nous, Français, vous en serions infiniment reconnaissant, ne laissez pas l’abstention alourdir davantage le déclin de la France.

  10. Dans ce pays en faillite et avant qu’il ne disparaisse, quand va-t-on remplacer l’état de droit par l’état des devoirs ?

  11. L’erreur est de ne pas avoir fait figurer un paragraphe indiquant que cette loi était un package, un tout, et qu’elle devait passer en l’état ou pas du tout.

  12. Aucun spécialiste du droit dans ce petit comité, juste des politiques plus ou moins séniles et eux même impliqués dans divers scandales ! Fabius, Fafa pour les intimes, est à la botte de Macron, il veut garder son siège confortable et… très bien rémunéré. Lui qui a fait la loi sur l’ISF en excluant les bien de son paternel (et accessoirement les siens) !

    • Pour éviter tout malentendu je dois dire que je ne suis pas socialiste, mais d’après des gens bien placés, que j’ai rencontrés à la fac Fabius savait que cette exclusion de ces biens de l’ISF lui retomberait dessus, il semble même qu’il ait été contre. En fait la raison principale était de conserver ces biens en France. Certains prétendent qu’il avait eu le choix entre le Conseil Constitutionnel et un poste à la croix rouge pour s’occuper des transfusions sanguines, mais il a décliner cette offre.

      •  » Certains prétendent qu’il avait eu le choix entre le Conseil Constitutionnel et un poste à la croix rouge pour s’occuper des transfusions sanguines, mais il a décliner cette offre. » un poste à la croix rouge pour s’occuper des transfusions sanguines… J’adore votre humour au cinquième degré.

  13. Le président de la République appelle à censurer une loi votée par sa majorité. C’est nouveau, et pourtant ça fonctionne ! Tout est question de libellé pour tromper l’attention des lecteurs : on utilise dans le texte la double négation qui vaut affirmation.
    Le conseil constitutionnel vient d’interdire la politique anti-immigration, est-il écrit.
    Il serait plus simple de dire qu’il autorise l’immigration.
    Ce n’est plus une loi « d’immigration » mais une loi « d’accueil ». Ainsi c’est plus clair à comprendre.

  14. D’un point de vue démocratique , ce pouvoir du CC à la botte du gouverneur est plys qu’inquiétant .Un cap a encore été franchi dans la dictature . Le peuple est muselé et ne peut que subir . Jusqu’à quand ..?

  15. Mais fabius et autre juppé, ne font que suivre les instructions élyséennes. Depuis quelques décennies ce n’est que leur rôle, pour désengager celui du pouvoir, un fusible en quelque sorte, mais auréolé d’une grande respectabilité et surtout intouchable. Tous ces conseils contitutionel, d’état, arcom, etc. ne sont que des supplétifs du pouvoir, ce qui leur permet de dire mais c’est une autorité indépendante qui le refuse, pas nous ! Pour moi là est le « vrai pouvoir » et de gauche de surcroit, bien qu’un juppé puisse se dire de droite, mais nous savons tous ici ce qu’il en est !

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