« Un entrepreneur sur cinq gagne moins que le SMIC »

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Dans une enquête récente, la Confédération des petites et moyennes entreprises tire la sonnette d’alarme concernant la très faible rémunération de certains chefs d’entreprise. François Asselin, président de la CPME, analyse la situation, mais sans jamais désespérer. Il nous rappelle que « le travail, c’est la santé ! »

Iris Bridier. La gauche a coutume de penser que les chefs d’entreprise « s’en mettent plein les poches ». Que lui répondez-vous ?

François Asselin. En fait, au-delà de la gauche, c’est toute une partie de la société qui a perdu la culture PME. Ce qu’il faut savoir, c’est que 99 % des entreprises sont des PME/TPE, bien loin des clichés portés médiatiquement, quand on sait que 20 % d’entre eux peinent à se verser 1.400 euros nets par mois !

I. B. Quelles sont les difficultés que rencontrent les chefs de ces Très Petites Entreprises ?

F. A. Ils demandent principalement de pouvoir vivre correctement de leur travail. Et travailler ne leur fait pas peur, bien au contraire. Alors, lorsque l’activité baisse, que les problèmes récurrents de recrutement demeurent, que la règlementation devient de plus en plus lourde, ils ne comprennent pas comment, en étant aimés par 80 % des Français, leur condition de vie ne s’améliore pas. C’est le même constat pour les agriculteurs.

I. B. Finalement, est-ce que cette rémunération très basse ne ferait pas baisser les chiffres du chômage artificiellement ?

F. A. La rémunération basse est une constante, chez les chefs d’entreprise de TPE, ce n’est pas nouveau. En revanche, depuis une décennie, des emplois se sont développés à travers les plates-formes de type Uber. Ces actifs ont un statut d’indépendant et certains veulent le conserver, mais ne sont pas pour autant des entrepreneurs. Ils sont actifs et ne pointent donc pas au chômage, mais il reste dans notre pays 3,4 millions de personnes au chômage en catégorie A et plus de 5 millions dans ce qu’on appelle le « halo » du chômage, si on ajoute l’ensemble des catégories.

I. B. Qu’attendez-vous du nouveau ministre du Travail ?

F. A. Le dialogue social au sein des entreprises aurait bien besoin de simplification, car lui aussi est de plus en plus normé, parfois par l’action des partenaires sociaux eux-mêmes.

Nous aimerions voir la « valeur travail » portée comme objectif prioritaire. Je fais souvent le constat que tout ce qui est considéré comme avancée sociale sont des mesures qui, finalement, éloignent les salariés de l’entreprise. En effet, et sans porter de jugement sur le fond, le congé parental est passé de 11 jours à 28 jours, on évoque la semaine de quatre jours. Sachant que ce qui intéresse les salariés, c’est le week-end de trois jours, on nous demande de négocier le CETU (compte épargne temps universel), et depuis la mise en place des 35 heures, nous avons un mal fou à retrouver de la productivité collective. La France garde un différentiel de 120 heures de travail en moins par an par rapport à l’Allemagne, avec une moyenne d’arrêts de travail du double par rapport aux mêmes Allemands. J’aurais tendance à dire : le travail c’est la santé ! Positivons en nous disant que, finalement, nous avons des marges de manœuvre.

I. B. Dans ce contexte de crises multiples que nous traversons, êtes-vous parfois tenté par le découragement ou « l'a-quoi-bonisme » ?

F. A. Pas question, ou bien il faut que je m’arrête immédiatement ! N’oublions pas que la France des courageux, de ceux qui ont du bon sens, de ceux qui savent prendre des risques pour emmener les autres et parfois les porter est ultra-majoritaire. Il faut simplement que ceux qui ont en charge l’avenir du pays s’en saisissent et s’appuient sur cette France qui ne baisse pas les bras. Les entrepreneurs sont une de ces colonnes vertébrales.

Iris Bridier
Iris Bridier
Journaliste à BV

Vos commentaires

13 commentaires

  1. Je connais bien le problème pour l’avoir vécu. Pendant 10 ans j’ai moins gagné que mes employés. Heureusement la retraite à mis fin à ce calvaire.

  2. L’administratif pèse de plus en plus dans les entreprises. Ce qui ne devrait être qu’un compte-rendu d’activité afin de vérifier que le consommateur et l’employé ne sont pas exploités devient kafkaïen. Nous vivons dans un pays où la paperasse vient plomber l’esprit d’entreprise, mais où on laisse les tricheurs prospérer. Il faudrait une bonne foi que les salariés comprennent que sans entrepreneurs il n’auront pas de boulot, que l’administration admette que tous les artisans ne souhaitent que de vivre dignement de leur travail, que les écolos intègrent qu’il est préférable de fabriquer localement que d’importer du bout du monde et surtout que ce ne sera que si tout le monde est occupé que la sécurité pourra revenir, car l’oisiveté est mère de tous les vices.

  3. Comment voulez que les entrepreneurs puissent se distribuer des salaires décent, à partir du moment où vous avez une hyper inflation monétaire, qui mange la marge net et la marge brut de leurs entreprises ! C’est impossible ! C’est le raisonnement que font Charles Gave et Olivier De la Marche ! N’est ce pas Bruno Lemaire ! Au fait Monsieur Lemaire pour l’année 2023 la Fédération de Russie a réalisé près de 3,5 % de Croissance, alors que l’Union Européenne est en récession ! Vladimir Poutine vous remercie ! Hervé de Néoules !

  4. Juste un petit point à rectifier : le courage, c’est bien, mais sans une formation solide, il est difficile et dangereux de s’improviser entrepreneur … j’ai souvent constaté de graves manquements dans des projets de création d’entreprise, à commencer par le compte prévisionnel de trésorerie , ce dernier devant inclure les deux premiers trimestres de charges. Il y a pas mal de jeunes auto entrepreneurs qui maîtrisent l’aspect technique de leur activité, mais pas du tout l’aspect commercial ni l’aspect financier…. et, quand je vois comment sont rédigés certains devis, rien que de constater les fautes d’orthographe ou de vocabulaire, je m’interroge sur la capacité intellectuelle du futur entrepreneur !!! Ceux – là sont souvent un cache misère qui permet de baisser les statistiques du chômage !!! Et puis après, ils viennent gonfler les statistiques des défaillances d’entreprises… Pas vrai ???

  5. Il y a des entrepreneurs commerçants artisans qui ne gagnent pas bien leur vie c’est une réalité, maintenant il faut en chercher les causes qui sont multiples et variées dire qu’ils ne gagnent pas bien leur vie est insuffisant, je crois que les experts-comptables qui ne sont jamais interrogés pourraient nous donner leur sentiment à ce propos. Toutefois l’analyse de François Asselin est tout à fait pertinente. Je crois aussi que beaucoup de chefs d’entreprise petites ou moyennes n’ont pas la carrure pour faire tourner convenablement une entreprise, pour vivre ou survivre c’est suffisant, mais pas plus, par manque de compétences et de rigueur. Par exemple le tribunal de commerce à qui on a présenté un plan de redressement est d’accord, si vous laissez le même staff souvent vous n’allez pas très loin, vous changez l’équipe et vous redressez l’entreprise à terme.

  6. Un dicton Français dit : le moins on en fout, le plus on gagne….Et je l’ai vérifié à mes dépends !

  7. Durant la décadence de l’empire Romain, les « érudits » et le « pouvoir » disaient: « donnons leurs du pain et des Jeux …  » Donc d’ic juillet 2024, à ce qu’il paraît, il y aura « des Jeux à Paris » ! …

    En fin du mois de janvier 2024, il va y avoir des paysans dans la capitale ! … Bon courage aux « bobos-écolos-vert-pastèques » ! …

  8. Ceux là , comme le peuple , sont soumis à des frais et des taxes , des impôts , des charges inacceptables . Nous constatons que ceux qui se lèvent chaque jour pour aller bosser sont ceux qui vivent le plus mal , qui peinent à se chauffer , se soigner . Comment peut on accepter celà ou plutôt , allons nous l’accepter et subir cette injustice encore longtemps .

    • Dans tout ce marasme il y a à boire et à manger. Le chômage a baissé mais le nombre d’auto entrepreneurs a augmenté et le nombre de RSA est à plus de 5 millions !!
      J’ai connu pas mal de bons artisans ,dont certains travaillaient en partie au Black, et qui vivaient et vivent plus que bien (bon maçons bons plombiers bons électriciens !! Ceux qui rament peut être devraient ils revenir au statut d’employé. Tout le monde n’a pas les épaules pour devenir chef d’entreprise La sélection se fait automatiquement seuls les bons et opportunistes résistent la jungle!!

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