Jean-Frédéric Poisson : « Nous pouvons nous préparer à ce qu’un certain nombre d’éléments qui touchent à nos convictions intimes soient désormais présents dans les fichiers de police »
Jean-Frédéric Poisson avait déposé un recours devant le Conseil d'État pour contester les décrets gouvernementaux prévoyant le fichage des individus en fonction de leurs convictions politiques, philosophiques et religieuses. Il vient d'être débouté.
Boulevard Voltaire recueille sa réaction et évoque avec lui le choix de ces fameux 35 citoyens tirés au sort chargés « d'accompagner la stratégie vaccinale de l'exécutif ».
Il est désormais légal de ficher les citoyens en fonction de leur conviction politique. Le Conseil d’État l’a confirmé malgré le référé que vous aviez déposé avec d’autres associations.
Comment avez-vous accueilli cette nouvelle ?
J’ai accueilli cette nouvelle de manière non surprise et un peu inquiet. Non surprise parce que la tonalité de l’audience du Conseil d’État à laquelle j’ai assisté permettait de considérer que le tribunal procédait de cette façon. Un peu inquiet malgré tout parce que même ici au cours de l’audience, nous avons reçu un certain nombre d’assurances sur le fait que ne seraient fichés sur leurs opinions politiques, religieuses ou syndicales que les personnes qui représentaient un danger pour la République. On sait bien qu’il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée. La porte avait été fermée en 2008 avec le fameux logiciel EDVIGE. Il avait déjà tenté d’intégrer ces données personnelles et intimes dans les fichiers de surveillance et de la police. Maintenant, la porte est ouverte.
Qu’est-ce qu’un individu dangereux pour la République ?
C’est toute la question. A l’audience, il nous a été dit que cela ne concernait potentiellement que les gens qui sont déjà répertoriés comme ayant des comportements, des appartenances et des propos matérialisés, des actions ou des appartenances à des mouvements à caractère terroriste ou séditieux. Encore une fois, je ne fais absolument pas confiance dans les autorités. Les gens qui sont dubitatifs à propos des vaccins, qui osent affirmer des convictions identitaires, qui considèrent que nous sommes un conflit de civilisation, qui considèrent que le système est conquérant sont potentiellement aussi des dangers pour la sécurité de l’État et de la République. Nous devons nous préparer à ce qu’un certain nombre d’éléments qui touchent à nos convictions intimes soient désormais présents dans les fichiers de police. C’est donc une très mauvaise nouvelle.
Je n’exclus pas que nous attaquions ces décrets. Auprès de la Cour européenne des droits de l’homme, cette réflexion est en cours. Quand la décision sera prise, nous informerons les auditeurs de Boulevard Voltaire.
35 citoyens tirés au sort vont pouvoir suivre et donner des préconisations sur l’administration des vaccins contre le Covid-19. Le choix de 35 citoyens tirés au hasard a évidemment été commenté un peu partout. Vos anciens collègues députés doivent se demander à quoi ils servent.
La bonne idée serait d’élire 577 personnes au suffrage universel pour qu’ils contrôlent la politique vaccinale. Cela s’appellerait l’Assemblée nationale. Elle aurait des moyens de contrôle identifiés et proportionnés. Au sein du parlement, l’Assemblée nationale et le Sénat, il existe une commission d’évaluation et de contrôle spécifiquement en charge du contrôle du suivi d’évaluation des politiques publiques. C’est un des instruments de contrôle instauré par la réforme constitutionnelle de 2008, qui renforce les pouvoirs de contrôle du parlement sur le gouvernement. On ne comprend absolument pas à quoi vont servir ces 35 personnes et on se demande quels seront leurs moyens de contrôle. Il paraît qu’ils vont devoir rédiger un rapport. On ne sait pas avec quel moyen, sur quelle base et sur quel type de données. Nous sommes là dans un dévoiement total des institutions. Ce qui est en train de se passer est extrêmement grave. Il semble quand même qu’un bon nombre d’observateurs et l’Opinion publique commencent à s’en rendre compte.
Qu’essaie de faire Emmanuel Macron ?
Tout le monde voit bien que nous sommes dans une crise de confiance sans précédent du peuple français à l’égard des institutions. La résistance à l’égard de la politique vaccinale en est un exemple, mais ce n’est pas le seul. On voit bien que les fonctionnaires, les élus locaux sont dubitatifs sur la gestion de la crise sanitaire. Tous les groupes qui composent la société française sont dans une situation d’extrême méfiance à l’égard des autorités. Par rapport à cela, le gouvernement fait n’importe quoi pour essayer de se sortir d’une situation qui est aujourd’hui pour lui tout à fait délétère et extrêmement fragile. C’est un artifice de plus, une espèce de gadget. Je ne comprends même pas que le président de l’Assemblée nationale et le président du groupe majoritaire à l’Assemblée nationale n’aient pas encore rué dans les brancards en protestant de manière vigoureuse. On est en train de tuer les institutions pour des raisons de confort, d’ignorance et d’incompétences. Malheureusement, c’est très dommage. Le gouvernement s’est enfermé lui-même dans une situation de crise de défiance totale qu’entretien désormais à son égard, le peuple français. Il ne s’en sortira pas.
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