Samedi printanier à Toulouse. Arrivé à la gare Matabiau, vers 11 heures, je descends à pied en ville : les CRS sont déjà nombreux, procédant à des contrôles de sacs et d'identité de certains arrivants. Avec ma tête de bon père de famille et mes marmots, je passe sans encombres. Rue de Rémusat, les cars de police barrent l'accès à la place du Capitole, certains groupes de policiers arborent leur lanceur de LBD de façon dissuasive... Où sommes-nous pour qu'on en soit là ? Avant midi, ici, tout est calme. Et l'on se dit : quel déploiement... La presse parle de 800 à 900 hommes. Le Capitole étant interdit, le rassemblement a donc lieu sur les allées Jean-Jaurès.

Les Toulousains sont habitués et savent que les choses sérieuses commenceront quand l'hélicoptère survolera la ville.

En attendant, repas place de la Daurade : le monde continue de tourner comme si de rien n'était ; étudiants, touristes, amoureux profitent des terrasses et du soleil. Cette juxtaposition de deux univers est d'ailleurs étrange : une crise et plus que des tensions d'un côté, et un « tout va bien » tranquille de l'autre. Mais, après tout, peut-être que cela s'est toujours passé ainsi, dans l'Histoire ?

L'hélico arrive et, rapidement, une fumée noire s'élève dans le ciel toulousain, les véhicules de pompiers et leurs sirènes viennent rappeler aux tranquilles hédonistes de la rive gauche que quelque chose se passe rive droite. On apprend qu'un engin de chantier a été incendié. Des véhicules du SMUR vrombissent à leur tour. Il y a des affrontements et des blessés.

Le soir, à l'heure tendue de la dispersion, pour regagner la gare, il faut zigzaguer entre les rues barrées par les policiers. On sent certains tendus.

Bilan : la police aura tenu son pari de limiter la casse, de permettre une vraie quiétude dans toute une partie du centre-ville. Les manifestants auront été bien « nassés », selon l'expression habituelle. De l'autre côté, les gilets jaunes étaient toujours plusieurs milliers. Et même les chiffres gouvernementaux indiquent une remobilisation sur l'ensemble de la France.

Vu de la périphérie, ce XXIIe acte, avec cette omniprésence des forces de l'ordre, laisse toutefois un goût étrange et un sentiment de malaise : mais dans quel pays sommes-nous ? Et quel déploiement si, un jour, les choses - celles-ci ou d'autres - devenaient vraiment plus graves ?

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14 avril 2019 à 11:15

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