Il est de bon ton, lorsque l’on organise un colloque, d’inviter tout un tas de têtes d’affiche, pour ne pas dire des têtes de gondole, pour attirer le chaland. C’est le cas pour celui qui se tiendra, le 30 mars prochain, à l’École de hautes études en sciences sociales et qui a pour titre et sujet : "La révision des lois de bioéthique : un enjeu majeur pour toutes les personnes conçues par don. » Il nous est promis un « dialogue entre droit, sciences sociales, action associative et responsabilité politique ».

Irène Théry a donc réalisé un casting remarquable : Marie Labory, lesbienne pro-PMA, avec Frédéric Potier, délégué interministériel à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine anti-LGBT (DILCRAH), dans un premier temps. Suivra le Pr Michaël Grynberg, lui aussi favorable à la PMA pour toutes, puis Jacques Toubon, qui ne l’est pas moinsn quitte à ne pas défendre le droit des enfants à avoir un père et une mère. Irène Théry embrayera avec le Pr Delfraissy, du Comité consultatif national d'éthique (CCNE). Me Caroline Mécary participera à la dernière table ronde dont le grand témoin sera le Pr Jean-Louis Touraine. Je n’ai pas trouvé un seul intervenant, même parmi les seconds couteaux, qui soit un des fers de lance de l’opposition aux dérives procréatives voulues par le camp du progrès.

Un colloque universitaire où tout le monde est d’accord : c’est chouette, mais ça sent un peu la propagande. D’autant qu’Irène Théry n’en est pas à son coup d’essai : elle avait déjà organisé, au Muséum, un colloque "pro-GPA" sans contradicteurs en novembre 2016, non sans se prévaloir d’un soutien d’Assas - qu’elle n’avait pas. Des opposants l’avaient nommé le "colloque de la honte", je m’en étais fait l’écho ici.

La liste des sponsors privés de cet événement laisse, aussi, un brin rêveur. ADFH (Association des familles homoparentales) et Les Enfants d’arc-en-ciel (association pour l’homoparentalité, favorable à la PMA/GPA) ; Mam’en solo (pour la PMA au bénéfice de femmes seules) ; Procréation médicalement anonyme (milite pour l’accès aux origines des enfants conçus par PMA) ; MAIA (imagine que la GPA pourrait être éthique) ; CLARA, enfin (milite pour la légalisation de la GPA).

Il n’est, bien sûr, pas question d’interdire à tout ce beau monde d’avoir des opinions, aussi ineptes et nocives puissent-elles être, ni de les exprimer. Mais les mots ont un sens, y compris colloque : « Réunion de spécialistes en nombre plus ou moins limité convoqués pour discuter et confronter leurs informations et leurs opinions sur un thème ou un domaine donné", selon le Centre national de ressources textuelles et lexicales (CNRTL). Puisqu’il n’y a pas d’opposition prévisible ni organisée pour confronter ces opinions, cette réunion du 30 mars cesse d’être un colloque et devient une simple réunion de propagande. Il devient honteux que des établissements universitaires la soutienne.

Quelques éléments de conclusion.

"La perversion de la cité commence par la fraude aux mots", disait Platon. Les universitaires devraient, en toute logique, être des remparts contre ces falsifications.

Est-il, quelque part, un ministre ou simplement un recteur qui se soucierait assez de la réputation d’une université et qui interdirait que celle-ci présente un meeting d’agit-prop pour un événement universitaire ?

User des moyens de l’État pour une œuvre de propagande, n’est-ce pas, quelque part, constitutif d’un détournement de bien public ? C’est sûrement incompatible avec la moralisation de la vie publique promise par notre Président.

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19 mars 2019 à 10:21

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