Erdoğan en visite à Paris : une opération séduction, vraiment ?

Coucou ! revoilà le sultan du Bosphore (il nous manquait), le temps d’une visite à l’Élysée et d’un crochet par une conférence de presse, en ce début d’année 2018, au cours de laquelle il ne manqua pas de signifier à un journaliste son habituel « T’es qui, toi, pour me parler comme ça ? »

L’on ne peut reprocher au personnage une quelconque incohérence : il prend résolument les c... pour des c... et le leur fait savoir sans ambages.

Par exemple, lorsqu’il se pointe en France et s’adresse à sa diaspora au cours d’un meeting, courant 2010, en ces termes : « L’assimilation est un crime contre l’humanité », le silence de cathédrale des politiques français confirmait qu’il avait absolument raison de les prendre pour tels.

Il s’essaya également à ce jeu-là avec les Pays-Bas, dans le cadre de la campagne du référendum prévu en Turquie le 16 avril 2017, qui visait au renforcement des pouvoirs présidentiels, au cours de laquelle il dépêcha plusieurs ministres aux Pays-Bas à l’intention de la diaspora turque, et ce malgré les avertissements des autorités néerlandaises. Résultat : le ministre des Affaires étrangères turc ne put atterrir sur le sol batave, tandis que le ministre de la Famille turc, qui tenta une intrusion via les routes allemandes, fut reconduit manu militari à la frontière.

Plus récemment (mars 2017), il avait tout de même trouvé le moyen de traiter Angela Merkel de « nazie » et, en serrant la main du sultan sur le perron de l'Élysée, ce janvier 2018, nous ignorons si notre Président savait qu’il accueillait la victime d’une « nazie » qu’il fréquente par ailleurs lui-même assidûment. Du coup, c’est Merkel, Macron et Erdoğan qui se foutent de nos gueules à tous.

"La guerre, c’est le massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent mais ne se massacrent pas" (Paul Valéry).

Gageons qu’ils eurent un excellent lunch, sans même lever le petit doigt au moment du thé, en attendant peut-être une petite sauterie à trois en guise de retrouvailles. Sur ce plan-là, ils sont bien tous restés des « politiques », Macron inclus. Comme le rappelait Libération du 5 janvier : "En opération séduction à Paris, Erdoğan chasse son naturel, il revient au galop. »

Résultat des courses pour l’autocrate du Bosphore : la Turquie dans l’Union européenne, ce n’est pas vraiment pour demain matin. Et, bien sûr, la Turquie musulmane ne pouvait en rester là, Turquie dont le Parlement vient de lancer « une enquête sur l’islamophobie en Europe et notamment en Belgique », […] faisant suite « aux nombreuses réactions racistes suscitées lors de la naissance du premier bébé de l’année 2018 à Vienne, une fille d’origine turque » (LaLibre.be du 8 janvier).

Erdoğan ferait mieux de regarder Arte ce mardi 9 janvier, une émission intitulée "La fin des chrétiens d’Orient ?" "Alors qu’ils représentaient près d’un quart de la population du Moyen-Orient au début du XXe siècle, les chrétiens y sont aujourd’hui très largement minoritaires […] Chaque année, plusieurs milliers d’entre eux sont massacrés […] Le document revient sur leur condition fragile dans cinq pays : la Syrie, le Liban, l'Irak, la Turquie et l’Égypte."

Mais il ne regardera pas ce document, nous le savons, car ce personnage retors ne se regardera pas dans une glace, trop occupé qu’il est à intégrer une Europe islamo-soumise dans la Turquie.

Silvio Molenaar
Silvio Molenaar
Nouvelliste.

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