Comment on nous prépare tranquillement à un nouveau confinement
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Serons-nous bientôt reconfinés ? La question s’insinue dans tous les esprits, peu à peu, face à une situation « extrêmement difficile, voire critique », selon Jean-François Delfraissy, le président du Conseil scientifique. Pour lui, les chiffres sont implacables et témoignent d’une accélération majeure de l’épidémie. Pour sa part, Élisabeth Borne souhaite éviter un reconfinement général mais « n’exclut rien ». « Tout est possible », reconnaît Cédric O, le secrétaire d'État en charge de la Transition numérique. Quant à Jean Rottner, président LR de la région Grand Est, il postait sur les réseaux sociaux, ce dimanche : « J’ai la certitude que nous allons vers un confinement. » La semaine dernière, Jean Castex nous préparait à des mesures à venir « beaucoup plus dures », quand Emmanuel Macron déclarait : « Il est encore trop tôt pour dire si on va vers des reconfinements locaux ou plus larges. »
Et voilà comment, petit à petit, à force de nouvelles publications de chiffres record et de communication politique bien rodée, émerge tranquillement l’idée d’un reconfinement et de ses contraintes assorties. Ce nouvel assujettissement apparaîtrait comme un moyen légitime et indispensable pour casser les courbes épidémiques dites catastrophiques. L'Assemblée nationale a voté la prolongation de l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 16 février. Il donne donc au Premier ministre l’autorisation de décréter des mesures limitant la liberté d'aller et venir, la liberté d'entreprendre et la liberté de réunion (y compris des mesures d'interdiction de déplacement hors du domicile) ; des mesures de réquisition de tous biens et services nécessaires pour mettre fin à la catastrophe sanitaire et des mesures temporaires de contrôle des prix.
Tandis que 46 millions de Français sont déjà soumis au couvre-feu, qu’en Europe les mesures de restrictions s’amplifient, nos politiciens s’interrogent : reconfinera ? Reconfinera pas ? Si l’on a donc bien compris que tout était possible, d’autant que, pour Rémi Salomon, le président de la Commission médicale d'établissement de l'AP-HP, le couvre-feu ne sera pas suffisant à enrayer le virus, les Français, eux, s’interrogent face à cette gestion de crise aux multiples contradictions. « Si reconfinement il doit y avoir dans dix ou quinze jours, parlons-en déjà maintenant », réclame Jean-François Delfraissy.
L’on évoquerait des confinements locaux ou des « reconfinements solidaires » (pour les plus de 65 ans afin, notamment, de garder les écoles ouvertes) plutôt qu’un reconfinement général qui paralyserait à nouveau notre économie déjà exsangue. Notons que les indicateurs sont mauvais, que l’Europe a déjà opté pour des reconfinements localisés, que certains experts sont favorables à ce reconfinement, tel l’épidémiologiste Martin Blachier, déclarant sur France Info : « On a fait plusieurs scénarios de reconfinement. Il s'avère que deux semaines de reconfinement seraient efficaces pendant quatre ou six semaines. »
Comme au printemps, cette question légitime ressurgit : nous confinera-t-on à cause d’une courbe épidémique ou bien de l’effondrement de notre système de santé qui a fermé 100.000 lits en vingt ans ? Bertrand Martin, le directeur du centre hospitalier Victor-Dupouy, déplorait, dans Le Parisien, que « la situation n'a pas changé depuis mars, voire s'est dégradée », ajoutant : « Nous n'avons pas plus de moyens qu'au mois de mars, ni en termes de compétences médicales ou soignantes, insiste le directeur. Et nous avons des difficultés à pourvoir des postes, y compris dans les services difficiles que sont les réanimations. »
L'État sait parfaitement qu'il pourra tenir son discours infantilisant et décréter un nouveau confinement, puisque nous ne sommes pas si différents, en somme, de ces hommes décrits par la Boétie, au XVIe siècle : « Isolés, tout occupés à leur distraction, concentrés sur leurs intérêts immédiats, incapables de s’associer pour résister. »
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