Cohn-Bendit : « à la hauteur »…

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Des amis m'ayant reproché d’avoir omis d’écouter la parole éclairée de ce personnage si considérable de notre Histoire, afin de me rattraper, je me suis senti obligé de recourir aux possibilités offertes par le replay en réécoutant cette interview de Daniel Cohn-Bendit, le 6 juin, sur France Inter. Il m'a alors fallu patiemment endurer, recueillies avec dévotion par les complaisants journalistes qui officient sur nos ondes « nationales », les fallacieuses impudences dont il est coutumier.

L'interview en question commence fort bien. Puisqu'il commence par l’évocation d’un grossier mensonge abondamment diffusé en 1968 ; mensonge selon lequel Georges Marchais, qui deviendra quatre ans plus tard secrétaire général du PCF, aurait dénoncé Cohn-Bendit en tant que « juif allemand ». Cohn-Bendit, qui, à l'époque, avait benoîtement laissé dire, veut bien reconnaître, aujourd'hui, que cela était faux. En effet, les mots qu'avait utilisés Marchais dans un éditorial de L'Humanité étaient, en fait, « l'anarchiste allemand Cohn-Bendit ».

Ce sont les gauchistes qui, avec la plus totale mauvaise foi, étaient allés prétendre que, derrière les mots de Marchais, ce qu'il fallait percevoir, c'était, suggéré de façon subliminale, une sournoise dénonciation à caractère antisémite ! D'où le slogan qui en avait découlé : « Nous sommes tous des juifs allemands », un refrain que les étudiants habilement manipulés (j'en étais !) se sont empressés d'entonner, enchantés de pouvoir, eux aussi, se parer d'une flatteuse auréole victimaire. Voir également les braves CRS ni plus ni moins transformés par les mêmes en affreux SS... Quelle honteuse mascarade !

Puis l'entretien se poursuit avec des considérations d'une grande banalité sur les difficiles problèmes de la « judéité », ceux, très délicats, du positionnement par rapport au sionisme et à Israël. Bavardages très convenus, sans guère d'originalité, mais qui ne mangent pas de pain ! Au moment de conclure l'entretien, l'un de nos courageux journalistes branche Cohn-Bendit sur de Gaulle et lui réclame un jugement sur ce personnage que les Français d'aujourd'hui sont de plus en plus nombreux à regretter. Alors notre gugusse, bon prince, veut bien concéder que le Général avait pu jouer un rôle positif en 1940 en appelant à la Résistance, puis, après 1958, en mettant un terme à la guerre d'Algérie, mais qu'« à la fin des années 60, il n'était pas à la hauteur ». Sous-entendu, je vous ai rendu un grand service en déboulonnant ce vieux totem, en aidant à dégager ce vieux débris !

Merci, mon cher Dany, pour ce travail de salubrité publique ! Mais, malheureusement, tu ne t'es pas arrêté en si bon chemin, toi qui te voulais « à la hauteur », puisque tu nous as fait, ensuite, la promotion de la calamiteuse Europe de Maastricht pour laquelle tu as appelé à voter puisque, toi le grand pacifiste, tu as soutenu les désastreuses guerres de Bush, Blair et Mitterrand en Irak, puis celle tout aussi désastreuse de Sarkozy en Libye... Plus tard, tu n'as pas craint, non plus, de cautionner le hold-up présidentiel de Macron dont tu t'étais fait le très zélé agent électoral. Admirable bilan que nos journalistes peu regardants se sont bien gardés de questionner !

Alors, ô sage très vénérable, tu peux bien parler du « rapport apaisé » que tu as aujourd'hui avec la grande figure du Général, figure que, avec un brin de condescendance apitoyée, tu affectes de considérer sereinement. La réalité, c'est que, comparé à la stature de ce dernier, comparé à l'héritage immense que de Gaulle nous a laissé (héritage malheureusement en partie dilapidé par l'incurie de ses piteux successeurs), ce que toi, tu nous as apporté, ce n'est rien d'autre que malfaisances et impostures à répétition.

André Pouchet
André Pouchet
Professeur de lettres

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