[Chronique] Sommet européen des 27 et 28 octobre : le verbe et l’impuissance

emmanuel macron

Le sommet européen a débuté à 15 heures, le 27, pour s’achever le 28 octobre, dans l’après-midi. Avec quel ordre du jour ? La guerre en Ukraine et le soutien de l’Union européenne, la situation au Proche-Orient, la situation en Azerbaïdjan et en Arménie, la situation au Sahel et la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo. Mais aussi les migrations. Sans oublier la compétitivité, la politique industrielle européenne et la révision du cadre financier pluriannuel. Plus un sommet de la zone euro (service de presse de l’Élysée).

Cette liste à la Prévert des crises majeures de notre monde donne le tournis. Ou bien les dirigeants de l’Union européenne sont des surhommes, ou bien ils se grisent de leur apparence de pouvoir. En pratique, ils se sont bornés à entériner les prises de position préparées à l’avance. Que faut-il en retenir ?

La condamnation de l’agression russe en Ukraine et la réaffirmation du soutien à celle-ci. Pouvait-il en être autrement ? La position en ligne de crête à propos de la situation au Moyen-Orient : condamnation de l’attaque terroriste du Hamas, droit d’Israël de se défendre mais en respectant le droit humanitaire et les civils de Gaza, plaidoyer pour des trêves humanitaires et « une solution à deux États ». Là encore, pouvait-on attendre autre chose ? Le plan initial de l’ONU de 1947 prévoyait deux États et Jérusalem sous statut international. Ce dernier point est devenu illusoire. Quant aux deux États, souhaitables pour espérer une paix durable, la perspective semble fort lointaine, d’une part à cause du grignotage des colonies en Cisjordanie, d’autre part parce qu’il n’existe pas d’interlocuteur politique réellement fiable et légitime du côté palestinien. Pourtant, le niveau de détestation est tel qu’il est clair que les deux peuples ne peuvent et ne veulent vivre ensemble. Ce qui, en toute logique, devrait nous faire réfléchir sur les beautés du multiculturalisme que l’on veut nous imposer à marche forcée.

Un titre V intitulé « Migrations et points divers » doit retenir notre attention. On y apprend que « le Conseil européen a tenu un débat stratégique sur les migrations », sans plus de précisions. Nous voilà rassurés ! Et suit une condamnation ferme des attentats perpétrés en France et en Belgique, ainsi que l’affirmation que l’Union européenne « est unie et résolue dans la lutte contre le terrorisme, la haine et l’extrémisme violent de tous types ». Comme s’il était impératif de taire que l’Europe fait face au terrorisme islamique. Il serait intéressant de savoir à quels autres « types » de terrorisme songent les membres du Conseil. Les terrorismes angevin et auvergnat, peut-être ? Mais le fait que ce point suive immédiatement celui sur les migrations montre que le Conseil fait un lien entre les deux sujets.

Le président de la République, interrogé sur le risque d’importation du conflit en France, a rappelé que nous avions, à la fois, la plus grande communauté juive d’Europe et la plus grande communauté arabo-musulmane, et a ajouté que « si nous importons ce conflit, nous nous diviserons ». Hélas, comme le démontre la croissance des actes antisémites, nous sommes déjà divisés. Et pour être clair, ce n’est pas la communauté juive qui pose problème ou crée des troubles, mais certains éléments radicalisés de la communauté arabo-musulmane.

En fait, ce sont ceux qui, il y a quarante ans, attiraient l’attention sur le risque d’accueillir sans limite des personnes venant d’une civilisation forte et sûre d’elle-même mais très différente voire antagoniste de la nôtre, la civilisation musulmane, qui avaient raison. D’autant que nos règles d’acquisition de la nationalité sont inadaptées, notamment à cause de la quasi-automaticité du droit du sol. Ils ont été voués aux gémonies parce que Jean-Marie Le Pen faisait partie de ces lanceurs d’alerte. La nomenklatura politique a préféré le déni. Aujourd’hui, elle craint la guerre civile et le conflit de civilisation. Qui pourtant est sous nos yeux. Et en fait depuis le VIIe siècle. Certes avec des trêves, mais avec continuité.

Emmanuel Macron a déclaré qu’il ne voulait pas être « dans le commentaire », mais en fait, il l’est. Et, avec lui, tous les dirigeants européens. Dans le conflit israélo-palestinien, les nations européennes comptent peu et l’Union européenne encore moins. D’autant que leurs dirigeants sont tétanisés par la crainte des réactions des populations musulmanes. Contrairement à ce que semblent penser bien des politiciens, l’art politique ne se réduit pas au verbe mais se traduit par des décisions et des actes. Or, les mauvaises décisions portent leurs effets désastreux sur des générations. Nous risquons de payer très cher l’aveuglement des oligarchies qui nous gouvernent et nous ont gouvernés.

Stéphane Buffetaut
Stéphane Buffetaut
Chroniqueur à BV, élu de Vendée, ancien député européen

Vos commentaires

38 commentaires

  1. La France était une voix originale et équilibrée dans le concert des nations. Macron a voulu nous transformer en une province d’un ensemble informe et hétérogène qui est incapable de prendre la moindre décision parce que les intérêts des différents pays sont presque toujours divergents. Du coup, la totalité de l’Europe est muette sur la plupart des sujets, ou accouche de déclarations insipides, inutiles et tardives, qui réussissent à emporter le consensus des 27, en ménageant la chèvre, le choux, la corde et le piquet.

  2. Il est vrai que notre président a le verbe….son culte du « en même temps » en est la preuve….le tout illustre aussi une inefficacité radicale et tristement risible.

  3. En fait Macron est incapable d’être dans un quelconque autre registre que le commentaire ! L’impuissance, la démission, la soumission altèrent la liberté d’expression et interdisent l’autorité et la décision.
    Depuis Sarkozy, la France et ses présidents obéissent à l’autorité américaine qui ne a créé l’Inion Européenne dans ce seul objectif !
    La présidence française n’est plus qu’un emploi de haut fonctionnaire de l’OTAN et de l’ONU , donc de Washington.
    Ce qui fait que même les pâles et piètres commentaires ne sont que des « suggestions » communiquées « en même temps » par les vrais chefs, et par la trouille d’être rendu seul responsable d’une « catastrophe sociétale »interne à la France.

  4. Macron c’est parole parole aucun acte sensé et quand bien même ce le serait c’est pour faire le contraire assuré .

  5. L’UE tient un débat stratégique, nos gouvernants français « travaillent » sur le sujet, notre président n’est pas dans la communication. Bref on serait gouvernés. Le petit problème est que le peuple n’est pas stupide et se rend bien compte qu »en fait ou ils se moquent de nous ou ils ‘ont pas la volonté d’agir ; être dans l’action, c’est accepter de se dresser, de se battre pour l’intérêt collectif de ses mandants et ne pas renoncer au prétexte de la complexité. Si c’était simple on n’aurait pas élus ou nommés des surdiplômés pour gérer la France et l’UE. Finalement c’est peut-être ça le problème?

    • Le véritable problème s’intitule ainsi : ces surdiplômés, détestés de la majorité des Français, par qui ont-ils été élus? Tant qu’on n’aura pas la réponse, on ne pourra pas résoudre le problème.

  6. L’UE n’est qu’un monstre ingérable qui ne peut parler d’une même voix, les mots n’ayant pas nécessairement le même sens selon les langues.

    Il y a donc une interprétation individuelle selon le pays et son représentant officiel, président ou Premier ministre.
    Et comme Macron vit de son lyrisme surfait, et comme il oublie un jour ce qu’il a dit la veille…
    De plus, je ne suis pas certain que les belges wallons, les luxembourgeois pratiquant le français, comprennent la même chose.
    FRExit et UExit sont plus que nécessaires, ils sont indispensables.

  7. Rarement la France a été représentée et gouvernée par des personnages dont l’incurie notoire est en progression régulière.

  8. Macron l’a-t-on vu dans l’action ? à part nous asservir aux décisions des commissaires européens.

  9. A part d’être inflexible envers les gilets jaunes et de les éborgner, tout le reste, ne sont que verbiages sans intérêt. Que ce soit en France ou à l’international, au mieux il n’est pas crédible au pire il est moqué! Les guignols de l’info d’antan, s’en seraient fait les choux gras! Hélas.

  10. En France, on parle beaucoup mais agit peu : Historiquement, cela nous a toujours coûté très cher, Macron ne fait exception à la règle.

  11. Nous voyons ce que israel a fait du désert un jardin extraordinaire! Rappelez vous de l*Algérie, des routes des trains des jardins arborisés dans les villes et villages, le peuple mangeait à sa faim et il exportait des légumes et fruits. Aujourd*hui allé visiter, un désastre! Pouquoi? Il faut travailler, et là est le Hic!

  12. « Dans le conflit israélo-palestinien, les nations européennes comptent peu et l’Union européenne encore moins… » La terre entière sait aujourd’hui que ce sont les États Unis d’Amérique qui décident pour l’Europe. Pourquoi, alors, perdre son temps à s’adresser aux laquais pour obtenir des réponses qui ne seront, au final, que celles du maître ?

    • Tout à fait d’accord avec vous, qui plus est nous sommes en europe, soumis aussi aux producteurs de pétrole du moyen orient, contrairement aux états unis, nous sommes déjà envahis par les islamistes et à la merci, d’un déferlement à venir. Nous sommes pris entre le marteau et l’enclume, la survie d’Israël, ne pèse pas lourd dans l’équation qui nous est posée.

  13. Nous ne risquons pas de payer le prix fort, nous le payons déjà depuis longtemps et comme l’inflation il s’aggrave de jours en jours.

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