Chez nous, soyez roi !

macron lourdes

Aucun Président français n’était venu à Lourdes depuis 1958. C’était donc une première que la halte d’Emmanuel Macron dans la cité mariale, sur la route du tour de France. Après le maillot, la bure. Tout chanoine assumé du Latran qu’il est, et même en remplaçant le mot reine par roi, Emmanuel Macron n’est pas venu chanter à Lourdes « Chez nous, soyez reine, nous sommes à vous… ». Il est venu au chevet d’une ville touristique sinistrée. Magasins fermés, hôtels vides, chapelets sans preneurs : le tourisme ne reprend pas ni le saint business. Une médaille, frappée à l’effigie du prince, après apparition, eût été l’idéal mais rien n’a filtré d’un passage devant la grotte de Massabielle.

En revanche, il était urgent de caresser le poil des catholiques, devenu électrique depuis le vote de la loi sociétale. Mis à part l’interpellation d’un homme en colère, peu au fait de la laïcité, la visite présidentielle surprit par sa discrétion tout en affichant un symbole fort. Le 16 juillet était la date de la fête de Notre-Dame du Mont-Carmel. C’était aussi le début du pèlé digital mondial, lancé en 2020, intitulé « Lourdes United in Prayer ». Quant au business, nul doute qu'une marque de tee-shirts, made in France, soit lancée - « en français et pas autrement », conformément à l’ordonnance de Villers-Cotterêts : United Colors of Lourdes.

Avant les vacances, c’était habile, cette carte postale de l’amour enraciné en terre de France. Politique, religion, famille, business : tout y était. Après le béret de Bagnières-de-Bigorre, la mounaque. Après le souvenir de Manette - la grand-mère chérie -, la rencontre, en compagnie de « sa maman, » d’un petit Poucet dont Emmanuel Macron a caressé la tête. L’enfant de Bigorre, devenu président, pèlerinant à Lourdes, mettait ses pas dans ceux de devanciers, au fait, eux, de la laïcité. Charles de Gaulle, grand catholique, disait qu’il ne fallait pas le confondre avec l’archevêque de Paris. Mitterrand aimait les églises et ne s’en cachait pas. Le Président Sarkozy vint de New York, en 2007, assister aux obsèques, à Notre-Dame de Paris, du cardinal Lustiger. Le trinôme « Napoléon, Dieu et la laïcité » est un classique.

Pendant ce temps, à Lourdes - et ailleurs -, certains cœurs purs rêvaient d’une voix céleste rappelant au Président sa parole non tenue. Hélas ! Le passe sanitaire est dans toutes les bouches, à toutes les émissions de la télé, du soir au matin. D’une « violence inouïe » selon certains, ce passe créerait « une fracture dans la société » entre les vaccinés et les non-vaccinés. Décidément ! Après les enfants avec père et les enfants sans père, les gilets jaunes et les sans gilet, la fracture est une spécialité française. Olivier Véran devrait s’en préoccuper, de cette fracture systémique.

La conclusion d’un reportage sur Lourdes sinistrée laissait perplexe. Lourdes serait à « réinventer ». Qu’est-ce à dire ? Après la flèche de Notre-Dame, la grotte à réaménager ? On peut s’attendre à tout. À défaut de Luchini, relisons la fable Le loup devenu berger.

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Marie-Hélène Verdier
Agrégée de Lettres Classiques

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