Caroline Cayeux expérimente le « en même temps » à ses dépens

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Polémique autour des propos du nouveau ministre délégué chargé des Collectivités territoriales qui vient de se faire épingler par les médias au sujet de ses propos contre le mariage homosexuel. Le magazine Têtu publiait, lundi, une pétition demandant la démission des trois ministres qui se sont opposés au mariage pour tous : Christophe Béchu, Gérald Darmanin et Caroline Cayeux. La pétition « Pour un gouvernement sans LGBTQIAphobies », signée par une cinquantaine de députés de gauche, dénonce ainsi que « Madame Cayeux, sénatrice en 2012, qualifiait le mariage pour tous "de caprice", "d’une ouverture de droit irrespectueuse de la nature et insensée", "le Mariage pour tous et le droit à l’adoption n’est pas simplement un dessein qui va contre nature mais c’est plus grave". »

Caroline Cayeux n’est pas novice en politique. Elle s’y est engagée dans les années 80 comme conseillère municipale, puis s’est investie dans les campagnes des élections européennes de 1984 et de l'élection présidentielle de 1995 en soutenant Jacques Chirac, puis elle a été maire de Beauvais, conseillère régionale de Picardie et sénatrice de l’Oise. Elle connaît donc parfaitement les rouages et les arcanes du pouvoir, ce qu’impliquent les ralliements et les soutiens. On pourra difficilement lui faire crédit d’un caractère ingénu. Or, passer d’un soutien à François Fillon en 2016 à celui, récemment, d’Emmanuel Macron impose forcément de faire le grand écart entre deux candidatures, l’une conservatrice et l’autre progressiste. La voilà donc contrainte d’assumer ses positions et en même temps tenir le discours imposé par son rang. Cela donne ce rétropédalage assez cocasse et indigne d’une vraie ligne politique claire et exigeante.

Interrogée dans la matinale de Public Sénat le 12 juillet, elle répond courageusement maintenir ses propos, mais se défend de manière ridicule : « J’ai toujours dit que la loi, si elle était votée, je l’appliquerais. Et puis, je vais vous dire, quand même, que j’ai beaucoup d’amis parmi tous ces gens-là. Franchement, c’est un mauvais procès qu’on me fait et ça m’a beaucoup contrariée […]. Je n’ai jamais fait partie de la Manif pour tous, je n’ai jamais défilé, que les choses soient claires. » Qu’espérait-elle vraiment tirer comme bénéfice de ces aveux ? Gagner en crédibilité chez « ces gens-là » ? Prendre ses distances avec la Manif pour tous ? Clarifier quoi ?

Ce consensus mou n’a pas rassuré ses opposants, à en lire les réactions indignées de Pierre Jouvet, l’un des porte-parole du Parti socialiste : « "J’ai beaucoup d’amis parmi tous chez ces gens-là." L’homophobie ordinaire d’une (sic) ministre en France en 2022. Ces gens sont à vomir. » Et celle de Boris Vallaud, président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale : « Les homosexuels ne méritent ni insultes ni fausse sympathie » (Le Monde, 12 juillet). Alors qu’à cela ne tienne, Caroline Cayeux a fini par présenter ses excuses au camp du bien et réciter le mantra macroniste par ce tweet pathétique : « Mes propos ont blessé nombre d’entre vous. Je les regrette profondément, ils étaient naturellement inappropriés. L’égalité des droits doit toujours être une priorité de notre action. »

Le procès médiatique et la dictature émotionnelle ont eu raison de ses prises de position. Voilà ce qu’il en coûte à la droite de soutenir Emmanuel Macron.

Iris Bridier
Iris Bridier
Journaliste à BV

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