Alstom : une ténébreuse affaire

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Alstom ! Ce nom d’entreprise devrait déchaîner la colère des Français. Un fleuron de l’industrie nationale, à l’histoire complexe et à la gestion particulièrement désastreuse, a été réduit progressivement à deux entités : l’une pour l’énergie, l’autre pour les transports.

En 2014, le PDG Patrick Kron vend la branche énergie à General Electric, une société américaine. Cette cession est l’aboutissement du « Piège américain ». Tel est le titre du livre rédigé par Frédéric Pierucci, cadre d’Alstom qui a passé deux ans dans les prisons américaines. La Justice est l’une des armes de l’économie américaine : usant d’un privilège d’extraterritorialité, elle poursuit partout dans le monde l’auteur présumé d’un délit, en l’occurrence de corruption, ayant utilisé un dollar. Menacés de lourdes sanctions, notamment une amende de 772 millions de dollars, Alstom et son PDG ont préféré vendre à un groupe américain. Prime de 4,1 millions d’euros, provision de 10,5 millions de retraite-chapeau, le PDG s’en est bien sorti. Frédéric Pierucci considère, lui, que cette opération est scandaleuse : « En vendant, nous avons renoncé à notre souveraineté sur la maintenance de nos 58 unités nucléaires. » Aujourd’hui, GE assure, en effet, l’entretien et le renouvellement des turbo-alternateurs de toutes les centrales nucléaires françaises, la production des turbines Arabelle pour les réacteurs EPR et la fourniture des turbines de propulsion des quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins et du Charles-de-Gaulle. Il y a, dans cette démarche, un acte de haute trahison qu’on ne souligne pas suffisamment.

Par ailleurs - et on s’attache davantage à ce point -, l’entreprise américaine s’était, lors de l’achat, engagée à créer 1.000 emplois et elle a annoncé, au contraire, au lendemain des élections européennes, qu’elle allait en supprimer un millier en France et 800 à Belfort. Certes, l’État va toucher 50 millions en contrepartie, mais le coût social de l’opération pour Belfort est énorme. Or, dans l’ombre de cette ténébreuse affaire, il y a un homme, et qui n’est pas le premier venu : Emmanuel Macron en personne, qui a suivi ce dossier de A jusqu’à Z, comme le révèle Olivier Marleix. Il demande, dès 2012, en tant que secrétaire général adjoint de l’Élysée un rapport sur Alstom au cabinet A.T. Kearney au prix de 300.000 euros. Le ministre, Arnaud Montebourg, n’est pas tenu au courant, et c’est Macron qui avalise la vente fin 2014, lorsqu’il est devenu ministre. Si on compare cette méthode à celle de Francis Mer et de Nicolas Sarkozy en 2004, alors qu’ils avaient sauvé Alstom en obligeant la Commission européenne à accepter l’intervention de l’État, lequel avait réalisé une plus-value sur la revente de ses parts, une fois l’entreprise requinquée, il y a une angoissante question à poser sur celui qui est actuellement le chef de l’État ! Non seulement la filière nucléaire est en partie cédée à l’étranger, et donc notre souveraineté altérée, mais des emplois sont perdus et une région industrielle sinistrée.

Or, Olivier Marleix ne s’arrête pas en chemin : il constate que plusieurs entreprises françaises d’importance mondiale ont été cédées dans des conditions analogues à des groupes étrangers et évoque un pacte de corruption que lui suggèrent les travaux de la commission d’enquête de l’Assemblée qu’il a présidée. Il a été entendu, le 29 mai, par l’Office central de lutte contre la corruption (OCLCIFF). Plusieurs faits lui paraissent troublants : l’importance des dossiers de fusion ou de cession dont M. Macron a eu à connaître (Alstom, Technip, Lafarge, Alcatel), la similitude des procédés, le fait que des proches du président de la République y jouent un rôle, comme Hugh Bailey, actuel directeur général de General Electric France et ancien conseiller du ministre de l’Économie qui autorisa la vente, un certain Emmanuel Macron ! Marleix aimerait savoir s’il y a un lien entre les entreprises concernées par ces transactions et les généreux donateurs de la campagne présidentielle !

Ces affaires sont consternantes : à chaque fois, elles soulignent l’incompétence, l’avidité, sinon la corruption de dirigeants français, et le fait que celui qui préside aux destinées du pays n’est pas étranger au démantèlement de son industrie. Au lieu de glisser sur cet aspect essentiel de l’actualité, politiques et journalistes devraient s’en saisir d’urgence ! Aux États-Unis, les procédures seraient déjà lancées.

Christian Vanneste
Christian Vanneste
Homme politique - Ancien député UMP, Président du Rassemblement pour la France, Président de La Droite Libre

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