Ce matin, aux premières nouvelles télévisées, on apprend de journalistes que les ELCO (enseignements de langue et de culture d'origine) vont être supprimés dès la rentrée 2020. Sans doute n'ont-ils pas lu ni entendu entièrement le discours de Macron à Mulhouse, le 18 février 2020, sur le thème « Protéger les libertés en luttant contre le séparatisme islamiste » ?

Parmi les mesures annoncées (le terme « mesurettes » serait plus approprié), « les ELCO seront partout supprimés sur le sol de la République ». Il n'en faut pas plus pour en déduire leur suppression, sans prendre en compte la fin de la phrase : « mais nous ouvrirons et financerons des postes pour des EILE ». Voyons cela de plus près.

Les ELCO « sont mis en œuvre sur la base d'accords bilatéraux prenant appui sur une directive européenne du 25 juillet 1977 visant à la scolarisation des enfants des travailleurs migrants », peut-on lire sur le site éduscol du ministère. Ils concernent neuf pays, dont l'Algérie, le Maroc, la Tunisie et la Turquie. Au départ, ils étaient destinés à « un enseignement de la langue maternelle et de la culture du pays d'origine en faveur des enfants » susceptibles de rentrer chez eux à la fin du contrat de travail de leurs parents. Les familles d'immigrés prolongeant le plus souvent leur séjour en France – c'est un euphémisme –, on a ajouté d'autres objectifs, comme « structurer la langue parlée dans le milieu familial » ou « favoriser l'épanouissement personnel des jeunes issus d'autres cultures ».

Le problème, selon notre Président qui semble le découvrir, c'est que « nous avons de plus en plus d’enseignants ne parlant pas le français, sur lesquels l’Éducation nationale n’a aucun regard » : les cours sont, en effet, donnés par des enseignants étrangers qui sont mis à disposition par leurs gouvernements respectifs ou recrutés localement par les autorités consulaires.

D'où la création annoncée des EILE (enseignements internationaux de langues étrangères), où les enseignants, toujours mis à disposition par le pays partenaire, seraient inspectés, intégrés dans une équipe pédagogique et devraient maîtriser le français. Ce n'était donc pas le cas avant. Enfin, Macron, après bientôt trois ans de mandat, prend conscience de la situation...

Les ELCO seraient soupçonnés de prosélytisme religieux. Ce qui a provoqué l'ire de Najat Vallaud-Belkacem, ancien ministre de l'Éducation nationale, qui serait « tombée de sa chaise » en entendant cette annonce, si l'on en croit Le Huffington Post. Car elle avait elle-même envisagé cette mesure, il y a quatre ans, quand elle siégeait dans le même gouvernement que Macron.

Notre Président serait donc un vulgaire copieur. Mais, au-delà de ce différend, au demeurant instructif, force est de constater qu'il poursuit, dans ce domaine, la même politique que ses prédécesseurs. Changer de dénomination, exercer un vague contrôle sur des enseignants étrangers ne change rien au risque de communautarisme qu'un tel dispositif peut entraîner. C'est la preuve, puisque lui-même fait la distinction, que Macron s'accommode du « communautarisme » et prétend lutter contre le « séparatisme », comme s'il n'y avait pas une relation étroite entre les deux.

Plutôt que de pérenniser des cours qui entretiennent les liens avec les pays d'origine, un dirigeant responsable, qui voudrait assimiler des populations issues de l'immigration, ne ferait-il pas mieux de mettre des moyens pour leur apprendre la langue française ? Les annonces de Macron, qui ménage la chèvre et le chou, ne relèveraient-elles donc que d'intentions électorales, à un mois des municipales ?

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19 février 2020 à 12:55

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