Stéphane Ravier : « 40.000 logements insalubres à Marseille et une politique municipale qui n’est pas à la hauteur »
Comment peut-on expliquer la tragédie de la rue d'Aubagne, à Marseille, où huit personnes ont perdu la vie ? Une semaine après cet accident, le sénateur des Bouches-du-Rhône Stéphane Ravier tente de répondre à cette question au micro de Boulevard Voltaire.
La rue d’Aubagne et Marseille sont endeuillées par ce drame terrible d’immeuble qui s’effondre. Comment peut-on expliquer une telle tragédie ?
Cela s’explique par des décennies, sinon d’abandon, au moins d’un certain désintérêt. En 2015, il y avait déjà eu un rapport sur cette question. La fondation Abbé-Pierre était ensuite tombée sur les mêmes chiffres. 40.000 logements insalubres à Marseille. La politique municipale n’est pas à la hauteur dans ce domaine. Ce n’est donc pas étonnant.
C’est un peu la même chose que lorsque des crapules de la cité de la Busserine ont tiré à la kalachnikov. Cela avait effrayé le Landerneau politique parce qu’il y avait des images. Mais en tant que Marseillais, cela nous a certes effrayés, mais pas étonnés. Nous entendons cela régulièrement. Nous sommes, évidemment, tous en deuil ici, à Marseille. Mais personne n’est étonné.
La mairie soutient qu’ils avaient mené une grande politique de réhabilitation et de relogement des habitants qui vivaient dans les immeubles à risque. Visiblement, cela n’a pas suffi…
Jean-Claude Gaudin est responsable. C’est le capitaine, comme il l’a dit lui-même. Mais il est le capitaine… d’une équipe. Ce n’est pas pour le dédouaner, mais ses adjoints sont tout autant responsables que lui. La mairie de secteur, qui a la même couleur politique, n’a certes pas beaucoup de pouvoir, mais elle est logiquement sur le terrain. Elle aurait dû alerter et convaincre le maire d’accentuer cette politique de rénovation envers l’habitat indigne pour éradiquer ce phénomène.
Si la mairie investit depuis vingt-trois ans, force est de constater que ce n’est pas au niveau que cela aurait dû être. Jean-Claude Gaudin nous a fait exactement les mêmes réponses qu’il avait déjà formulées pour le scandale de la vétusté des écoles.
La pièce se joue en trois temps. Dans un premier temps, ce n’est pas vrai. Dans un deuxième temps, ce n’est pas moi. Et dans un troisième et dernier temps, ce matin, dans La Provence (pour ne pas la citer), oui, c’est vrai, on aurait dû faire plus. Il finit par avouer que, même s’il a mis des millions, cela ne suffisait toujours pas.
C’est pourtant un mea culpa qu’il devrait partager. Si j’essaie de regarder la situation de façon juste, la municipalité n’en a évidemment pas fait assez, mais l’État n’est pas innocent. L’État réduit, chaque année, la dotation financière des communes en général, et à Marseille en particulier. C’est vrai depuis la présidence de Nicolas Sarkozy, et cela s’est accentué avec le ministre de l’Économie devenu président de la République, Emmanuel Macron.
Marseille est une ville pauvre, une ville avec deux milliards de dettes et 20 à 25 % de sa population qui vit en dessous du seuil de pauvreté. Évidemment, nous manquons d’argent. La ville est, certes, mal gérée, mais l’État a aussi sa part de responsabilité dans cette situation.
En tant que sénateur et ancien maire de secteur à Marseille, en appelez-vous à la démission de Jean-Claude Gaudin ?
Si Jean-Claude Gaudin démissionnait, il y aurait un vote au sein du conseil municipal. Ce serait un bébé Gaudin qui remplacerait le maire actuel. Et il serait tout autant responsable de la situation. Ils sont tous aux commandes depuis près d’un quart de siècle. Ce n’est quand même pas rien.
Pour certains, c’est déjà "Tous aux abris !" Jean-Claude Gaudin a déclaré, alors qu’on demandait sa démission, que le capitaine ne démissionnait pas lorsqu’il y avait la tempête. Mais quelques-uns, quant à eux, ont quitté le pont en attendant la chaloupe.
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