La course à la présidence n’est pas un sport de masse : il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus. Beaucoup d’appelés, c’est justement ce que promet Jean-Luc Mélenchon s’il accède, finalement, à l’Élysée. Un Insoumis qui propose à la jeunesse de France de rentrer dans le rang, cela a quelque chose de truculent. Uniformes, têtes bien rasées, respect des ordres : nous sommes assez loin de l’insoumission.

Un mois à peine après avoir déclaré sa candidature pour 2022, le président de La France insoumise entre donc en campagne en réaffirmant sa volonté de rétablir le service militaire obligatoire. Un arrière-goût de 2012 et de 2017 : jamais deux sans trois. D’ailleurs, après la déculottée des élections européennes de 2019 et l'échec cuisant des municipales de 2020, ce doit être rassurant de réutiliser une recette qui a fonctionné par le passé. Ou qui a, du moins, permis de dépasser les 6 % de votes.

Cependant, comme cette recette pourrait bien diviser les Insoumis, Jean-Luc Mélenchon n’hésite pas à l’adapter à sa sauce pour fédérer ses troupes : il n’est pas question que d’armée, mais de police également. Un peu de politique politicienne à bon marché. Alors que les élites bien-pensantes dénoncent les violences policières et se débattent avec une loi de sécurité globale qui ne convainc qu’elles-mêmes, alors que la scène médiatique s’émeut de ce que l’on peut dorénavant appeler « l’affaire Michel Zecler » et qu’elle aimerait transformer en affaire George Floyd à la française, Jean-Luc Mélenchon voit dans ce projet une solution imparable : « Cela changerait le regard de la population sur sa police et changerait les pratiques internes de celle-ci. » La police a donc des leçons de bonne tenue à recevoir des jeunes futurs conscrits. Il faudra peut-être songer à ne pas y faire servir les Black Blocs, au risque de voir effectivement les pratiques internes de la police changer…

À en croire le président de La France insoumise, ce service aurait une double vertu : « Le racisme et la violence reculeraient. » Rien que ça. La fin des heures les plus sombres de notre histoire a sonné ! Grâce à Jean-Luc Mélenchon, les hommes, demain, sauront la vérité. Le lion s’étendra près de l’agneau et nous fondrons des piques pour des faux.

Et des sabres pour des herses. Car les futurs conscrits militaires ont un emploi tout trouvé : ils pourront être mobilisés pour faire face « à d’autres menaces et dangers, notamment venant du dérèglement climatique ». Tout est bon pour rallier de nouveaux partisans. Sacré paradoxe, tout de même, que l’armée soit la solution à tous les problèmes, y compris pour les ténors de la gauche radicale. Plus important encore, cette question qui persiste : faut-il rappeler au candidat à la présidence que l’armée est avant tout chargée de la défense de la population, du territoire et des intérêts nationaux ?

Avec cette annonce de service militaire obligatoire, Jean-Luc Mélenchon a trouvé comment faire parler de lui à moindres frais. En y mêlant violences policières, racisme et écologie, ce n’est pas une recette bien solide qu’il nous sert : c’est de la soupe. Mais après tout, n’est-ce pas dans les vieux pots que l’on fait les meilleures ?

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05 décembre 2020 à 11:38

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