[Satire à vue] Élisabeth II ou la maîtrise du feu d’artifice vestimentaire

Capture d'écran France 24
Capture d'écran France 24

Le peuple anglais aimait sa reine sur tous les tons. Qu'elle apparaisse dans un tailleur jaune canari ou dans un ensemble « fraise écrasée », la foule admirait son courage vestimentaire. Durant son règne, pas un seul coloris ne fut écarté. Le mauve fuchsia succédait au bleu azur, un rose éclatant venait fleurir le balcon du palais. Stéphane Bern succombait devant le vert pétaradant d'une robe printanière puis défaillait à la vue d'un bleu imprévisible. En toutes circonstances, Élisabeth II savait déjouer les pronostics des plus grands spécialistes de la cour d'Angleterre. Tenue rouge orangé, pomme d'api, violet aubergine, aucun fruit, aucun légume n'échappa au couturier vegan de Buckingham Palace. Après l'habit venait la surprise du chapeau. Tous lui allaient comme un gant. Les petits, les grands, les ronds, les carrés, avec ou sans plume, simplement ornés d'une fleur. L'expression « avoir une tête à chapeau » était illustrée par cette prédisposition royale à transformer tout objet concave en un élégant couvre-chef.

Celle qui devait se garder de tout commentaire sur la vie politique de son pays avait su recourir au message subliminal porté par son apparence du jour. Engagée dans le pourpre, extrémiste de l'indigo, militante du vert pâle, Élisabeth était de tous les combats. À ceux qui l'imaginaient conventionnelle et guindée, elle ripostait par un chapeau semblant recouvert de crème chantilly. Au travers de ces diverses audaces costumières perçait un indéfinissable humour.

Lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Londres, elle simulait un saut en parachute sur le stade olympique. Avec grand sérieux, Sa Majesté avait suivi Daniel Craig dans les couloirs du palais... Sa doublure montait à bord d'un hélicoptère... Musique James Bond. Malgré ses 86 ans, la dame avait joué le jeu de ce scénario époustouflant de dérision et de drôlerie. Quel haut dignitaire se serait prêté à cette arrivée inattendue ?

Pour égayer son quotidien, Élisabeth se plaisait à décorer les rebelles du rock. Après un début timide avec les Beatles, elle enchaînait avec Eric Clapton, puis se risquait à un rendez-vous avec l'icône du hard rock Jimmy Page. Les Sex Pistols lui tendaient les bras avec une version énervée de « God Save the Queen ». Rien n'y fit. La limite du protocole était atteinte. Des années plus tard, Johnny Rotten, chanteur du groupe, déclarait être « vraiment, vraiment fier que la reine ait survécu et ait si bien réussi ». Le plus déjanté d'entre tous était tombé sous le charme royal... Décidément, aucun ne lui aurait résisté. D'un mot, d'un geste ou d'un anoblissement, elle avait mis l'ensemble du bouillonnement musical dans sa poche. Le feu d'artifice de couleurs avait ameuté les adeptes de paradis artificiels. L'effet hallucinatoire du tailleur avait opéré.

Elton John a salué sa mémoire au cours de son dernier concert. Sting eut les larmes aux yeux. Sous les fastes et les étoffes de l'apparat, un cœur de jeune fille romantique n'avait jamais cessé de battre.

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Jany Leroy
Chroniqueur à BVoltaire, auteur pour la télévision (Stéphane Collaro, Bêbête show, Jean-Luc Delarue...)

Vos commentaires

8 commentaires

  1. Magnifique, cette palette de couleurs ! Oui, vraisemblablement , elles symbolisaient des humeurs et avaient une signification .

  2. Il y avait vraiment de quoi être subjugué par ses tenues et ses chapeaux .Cette palette de coloris devait faire aussi partie de son humour .
    Bel hommage .Merci

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