Quand un bar lillois s’invite à l’Assemblée

la citadelle

Les militants de droite et de gauche lillois connaissent tous le bar La Citadelle. Les seconds y voient un antre nauséabond à faire disparaître, les premiers un refuge. Cet établissement, fonctionnant sous le régime d’un club privé associatif, a été fermé administrativement sur décision du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, accédant ainsi à la demande du premier magistrat de Lille, la socialiste Martine Aubry. En cause, l’organisation d’un événement sobrement intitulé « Qu’ils retournent en Afrique » en référence à l’injonction émise par le député RN de Gironde Grégoire de Fournas dans l’Hémicycle. L’intéressé a été condamné à la sanction maximale prévue par le règlement intérieur de l’Assemblée nationale, c’est-à-dire une exclusion de quinze jours.

Gérald Darmanin a même annoncé dans la foulée avoir « demandé au préfet du Nord d’interdire cette manifestation […] incitant directement à la haine raciale ». Or, de racisme, il n'a jamais été question, pas plus pour le bar associatif qu'il y a quelques mois pour Grégoire de Fournas. Le deuxième a été exclu pour « tumulte » et le premier a été fermé « pour non-respect de la réglementation des établissements relevant du public ». La ville a ainsi considéré que, « étant donné le nombre important de personnes présentes et le caractère public de la soirée », le local aurait été utilisé comme un Établissement recevant du public (ERP), outrepassant ainsi les conditions légales de son utilisation. Une décision que conteste Aurélien Verhassel : « Oui, l’arrêté municipal sautera certainement, oui, notre soirée aura bien lieu à la Citadelle », martèle son président, invité dans l’émission « Touche pas à mon poste ! » sur C8, ce mercredi soir.

Au fond, quoi qu’on pense de l’idéologie véhiculée par cet établissement ou son président, rien ne permet de le condamner juridiquement sur une quelconque idéologie. C’est là tout le paradoxe.

Une décision administrative au contexte évidemment politique. Une dimension qui n’a pas échappé à la NUPES qui, sur la lancée du coup politique de l’exclusion de Fournas pour un tumulte qu’elle a elle-même provoqué, a fait le lien entre le député et la Citadelle. Ainsi, le député de Roubaix David Guiraud a déclaré : « L’Assemblée est solidaire de la fermeture de ce bar. Pas de place pour les racistes ici. Je maintiens : la soirée "retourne en Afrique" n’aura pas lieu. »

Une saillie qui a résonné dans l’Hémicycle et entraîné une ferme réaction du député Fournas : « Vous n’avez aucun principe, aucune morale, et c’est à cela qu’on vous reconnaît. Et jamais vous n’arriverez à m’intimider. » D’autant que dans son montage vidéo, David Guiraud utilise un plan tronqué du député Fournas en train de rire, laissant croire qu’il réagissait en direct aux propos du député de Roubaix alors qu’il n’en est rien. Le plan du député Fournas est largement antérieur à l’intervention du député Insoumis.

À titre de comparaison, le bar référent des antifas parisiens, le Saint-Sauveur, sis dans le XXe arrondissement de Paris, avait écopé de deux fermetures administratives d’une dizaine de jours, en janvier 2020, et de quinze jours au mois d'août 2020 (son gérant, Julien Terzics, ex-leader des redskins parisiens, avait, à l’époque, dénoncé une mesure politique tandis que la préfecture avait mis en avant les nuisances nocturnes émises par l’établissement). Outre cette exception, les bars et squats antifas ayant pignon sur rue n’ont jamais à souffrir de décisions équivalentes, tandis que les bars qualifiés d’« identitaires » voient leurs existences menacées.

Son président Aurélien Verhassel se montre confiant. « Je suis un légaliste », assure ce juriste de formation. « On va envoyer des référés-liberté lundi qui obligeront à une réponse sous 48 heures. » Pour le leader associatif, les actions ne tiennent pas la route. « Nous allons célébrer nos huit ans d’existence et on dirait que Martine Aubry découvre notre présence », ironise celui qui confie chercher 20.000 euros pour assurer les frais de procédure. Une cagnotte et une pétition ont d’ailleurs été mises en ligne pour aider l’association flamande à subvenir à ses besoins. « D’autant que nous n’avons jamais causé aucun trouble. Notre bar n’est ouvert que cinq heures par semaine et, le reste du temps, nous assurons la présence d’une bibliothèque et d’un centre d’aide sociale à destination des démunis », plaide Verhassel.

À l’instar de l’Alvarium d’Angers, définitivement fermé, ou la Traboule à Lyon, fermé pendant plus d’un an, la Citadelle affronte donc des décisions administratives qui laissent soupçonner des raisons beaucoup plus politiques. De son coté, le député de Gironde Grégoire de Fournas rappelle que « ses propos relevaient de l’opinion politique et que les raisons de sa sanction (qu’il conteste) ne relèvent pas d’une quelconque prise de parole raciste ». Quant à Aurélien Verhassel, il a bon espoir que la soirée « Qu’ils retournent en Afrique » se tienne le 24 février. Réponse semaine prochaine.

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Marc Eynaud
Journaliste à BV

Vos commentaires

6 commentaires

  1. Honte à ce député GUIRAUD d’avoir truqué une vidéo ! Cela en dit long sur le personnage….Payé avec nos impôts en plus !

  2. Qu’ils retournent en Afrique ! Qui ? Le commando Wagner bien sûr, en ce premier anniversaire de l’entrée des troupes Russes en Ukraine. Un rapprochement saisissant et probablement pas volontaire. Quant à Martine Aubry, au moment de la venue du Pape Jean Paul II à Reims, où il était accueilli par Lionel Jospin, elle préférait manifester avec les frères maçons au moulin de Valmy. Elle sait admirablement choisir ses priorités !

  3. la chasse aux associations dites de « droite » a toujours été, c’est là qu’on reconnait les gauchos qui sont à la rue, rappelez vous pour les plus anciens, des maraudes pour les sans abris avaient été instaurées par des personnes de droite pour distribuer de la soupe aux lardons, cela a été interdit pour discrimination c’était il y a u moins 20 ans, déjà on voulait maintenir un quota de sans abri, on leur refusait de manger, dans l’indifférence générale.

  4. L’abus de pouvoir perpétuel de Madame le Maire de Lille est une entorse de plus à la Démocratie , le « faites-les-taire » qui annoncent de fameux Procès de Moscou à venir.

  5. On voit bien comment la « justice » de notre pays est orientée : Antifa = bon, identitaire = pas bon, ça rappelle une séquence d’un film des Inconnus.

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