Quand les habitants négocient leur tranquillité avec les dealers

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Les habitants d'une cité de Saint-Ouen en avaient assez des nuisances liées à la vente de cannabis. Allées et venues après 22 heures, conversations, tractations, bruits du tiroir-caisse. La goutte débordait du vase.

Après négociations avec les tenanciers de l'épicerie du pétard, les deux parties sont parvenues à un accord. Les dealers cesseraient leur activité dans le hall de l'immeuble passée l'heure à laquelle les locataires allaient se coucher. Affichette signée des uns et des autres fut placardée dans les parties communes : « S'il vous plaît, le sommeil est important pour commencer une bonne journée. Silence après 22 heures ! De la part des jeunes et des habitants. » Le dealer est qualifié de « jeune ». Après 30 ans, s'il a survécu, il passe dans la catégorie « habitant ».

Au détour de la déclaration d'un plaignant retranscrite par Le Parisien, nous apprenons que les petits commerçants en question n'habitent pas les immeubles de la cité. La délocalisation frappe tous les secteurs. La clientèle, non plus, n'est pas du coin. Il s'agirait, selon une habitante, « d'un lieu de ravitaillement favori des cadres parisiens des beaux quartiers ». Étrangement, le vendeur ne va pas au-devant de son acheteur. Le bobo joint (!) l'utile à l'agréable. Expédients et tourisme.

La présidente de l'amicale des locataires fait part de sa satisfaction au Parisien : « Ils ne font plus de bruit dès 22 heures et arrêtent de dealer dans le hall… Le reste, c'est le rôle de l'État ! » Ledit État venant à persister dans son inaction, les locataires verront s'ils procèdent à des arrestations et s'ils construisent une prison sur le parking. Le tout en accord avec les dealers, bien entendu.

Sur les plateaux télé, le débat fait rage entre partisans et opposants de la légalisation du cannabis. Polémique sans objet. Le produit bénéficie, en réalité, du statut original de « non légalisé mais en vente à ciel ouvert ».

Parfois à l'entrée même d'un bureau de tabac. À deux mètres près et le paquet de pétards figurait sur les rayonnages du buraliste. Alors, pourquoi chipoter ? En extérieur, le vendeur prend froid, l'acheteur s'enrhume et le Trésor public est le dindon de la farce. Mais interdire férocement au risque d'un embrasement des banlieues ou bien autoriser et s'attirer les foudres de l'opinion... Ah, que nenni ! Le pouvoir reste dans l'entre-deux. Sur le pas de la porte. Entre le dealer et le buraliste. En plein courant d'air. Est-ce bien raisonnable, à cet âge-là ?

Ni légalisé, ni fortement réprimé. Disons, pour sortir le politicien de l'ornière dans laquelle il s'est embourbé, que le cannabis doit être déclaré « un peu interdit ». « Illégal mais pas trop ». Formules à soumettre à l'Assemblée nationale devant un parterre de députés un peu éveillés à la gravité de la situation.

Jany Leroy
Jany Leroy
Chroniqueur à BVoltaire, auteur pour la télévision (Stéphane Collaro, Bêbête show, Jean-Luc Delarue...)

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