Pour se venger de son ex-conjoint, une magistrate organise son faux mariage !

On croyait que les magistrats sanctionnaient les mariages bidon, on n'imaginait pas qu'ils pussent en être les complices, encore moins les bénéficiaires. C'est pourtant arrivé. Une juge de Nanterre vient, pour ce motif, d'être mise à la retraite d'office par le Conseil supérieur de la magistrature siégeant en conseil de discipline, relate Le Monde.

Un scénario digne d'un vaudeville. Pour empêcher son ex-conjoint, père de ses enfants, de conclure une union avec sa nouvelle compagne, une amie très proche, Mme Souad Meslen, avocat devenu magistrat, a organisé une cérémonie factice à Saint-Denis de la Réunion, où elle a auparavant exercé. Elle lui avait, auparavant, subtilisé son passeport pour en faire une copie et obtenu un extrait de son acte de naissance. Il ne lui restait plus qu'à publier les bans, trouver un mari postiche en la personne de son beau-frère et prendre l'une de ses filles pour témoin. Un mariage parfait.

Las ! Tout a foiré. L'ex-compagnon, avocat lui-même, a appris la nouvelle par une rumeur qui s'est répandue dans le microcosme judiciaire, des magistrats étant tout surpris d'entendre appeler leur collègue de son nom de femme mariée, lors de sa prise de fonction dans son nouveau poste. La supercherie découverte, la présumée coupable a été mise en examen pour « faux et usage de faux, faux en écriture publique ou authentique et usage, obtention indue de documents administratifs et usage de faux documents administratifs par personne dépositaire de l'autorité publique ». Rien que ça ! Le Conseil supérieur de la magistrature vient de la congédier définitivement – avec sa retraite, il est vrai.

Cette histoire nous montre que les magistrats sont des hommes et des femmes comme les autres. La passion ou la jalousie peut les conduire à des actes condamnables. Ils ne sont pas, non plus, à l'abri de comportements sectaires et partisans : souvenez-vous du « mur des cons » dans les locaux parisiens du Syndicat de la magistrature. Ce fait divers ne mériterait pas d'être rapporté si l'on n'avait appris, à l'occasion de cette affaire, quelques détails sur la carrière de l'intéressée.

Mme Souad Meslem – ironie du sort – fut, un temps, conseillère en charge des droits des femmes victimes de violence et des questions judiciaires au cabinet de Najat Vallaud-Belkacem. Promue substitut général à La Réunion, elle était spécialiste du TGD (téléphone grave danger) dont elle saluait, en 2018, la grande efficacité.

Cet exemple prouve qu'il n'y a pas que les gens ordinaires pour connaître des problèmes de couple dignes de romans-photos. Bien au contraire ! Jusqu'aux Présidents, sous toutes les Républiques. François Hollande faisait le mur de l'Élysée pour des promenades en scooter. Valéry Giscard d'Estaing aurait, en galante compagnie, percuté la camionnette d'un laitier. Ne parlons pas de la double vie de François Mitterrand. À côté, Charles de Gaulle, fidèle à Tante Yvonne, fait figure de sage exemplaire.

Les plus indulgents compareront peut-être notre juge à une sorte d'héroïne racinienne, victime, selon ses mots, d'« une folie romanesque ». Le Conseil supérieur de la magistrature a estimé qu'elle avait « perdu tout repère déontologique ». À juste titre, sans doute. Quand un magistrat prend des libertés avec la loi qu'il est chargé d'appliquer, fût-ce l'exception, le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il ne rehausse pas la crédibilité, déjà entamée, de la Justice et, plus généralement, de l'élite qui prétend nous gouverner.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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