Pas d’amalgame ! Ces boomers qui en ont leur claque qu’on les mette tous dans le même sac

retraite grands parents

OK, boomers ! Je vous ai compris, pour reprendre les mots de celui auquel votre génération reste finalement indissolublement liée... j’ai compris votre agacement. Disons-le tout de go, vous en avez votre claque. Ras le bol. Plein le dos. Assez que l’on vous fasse porter tous les péchés du monde. Dans un pays qui professe le pas d’amalgame, on ne craint pas de stigmatiser en bloc le Boomeristan. Comme si vous étiez tous à mettre dans le même sac. Pour le comprendre, il m’a suffi, durant ce début de mois d’août, de laisser traîner sur une chaise longue ma lecture du moment et d’écouter vos réactions : La Parenthèse Boomers (Fayard), de François de Closets. Dans cet essai brillant - mais globalisant et systémique -, le journaliste, essayiste… et boomer François de Closets ne se gêne pas, peut-être parce qu’il en fait partie, pour accabler ces « profiteurs amoraux », comme les appelle Frédéric Beigbeder dans Un barrage contre l’Atlantique, « la génération favorisée devenue prédatrice » et non plus « protectrice ».

Pointant du doigt le « tsunami individualiste qui a déferlé après mai 68 », l’« explosion d’égotisme », il accuse une « génération rentière », la sienne, d’avoir « vécu les années les plus heureuses, en tout cas les plus favorables, de notre Histoire en prenant les commandes non pour servir la France mais pour la mettre à son service », et qui « [basculant] aujourd’hui dans le grand âge, a hypothéqué l’avenir ». Il cite Patrick Buisson (Le Figaro) : « La grande victoire des boomers, c’est d’avoir fait de la préservation de leur écosystème durant cinquante ans l’axe du gouvernement du pays. » Et de conclure, implacable : « On ne saurait reprocher à une génération d’avoir connu des conditions favorables. Ce n’est pas un tort d’avoir échappé à la guerre et à la peste. En revanche, toute génération est responsable de la suivante, surtout lorsqu’elle détient le pouvoir et, pour l’essentiel, détermine la condition de celle qui précède comme de celles qui suivent. Or, les boomers ont bien précédé au détriment de leur descendance. »

À dire vrai, François de Closets ne fait que formaliser sur le papier une petite musique que l’on entend depuis des mois, voire des années, d’un bout à l’autre de l’échiquier politique. C’est à gauche, dans la bouche d’une jeune femme politique écolo néo-zélandaise très engagée pour le climat, Chlöe Swarbrick, qu’est née l’expression « OK boomer »… la gauche voit en votre génération des nantis : si des militants écolos, comme l’a fait remarquer Arnaud Florac, ont choisi de saccager des terrains de golf plutôt que de football, dont la pelouse nécessite aussi beaucoup d’eau en période de sécheresse, c’est parce que le « pauvre » jeunistan, qui aime le foot, a une meilleure cote que le « riche » boomeristan, qui pratique le golf. Mais si la gauche reproche aux boomers d’avoir cramé la planète en même temps que la caisse, la droite n’est pas en reste, accusant les boomers d’avoir aussi cramé la caisse culturelle, cet héritage impalpable dont ils n’étaient pourtant que dépositaires, pas propriétaires. Sur Boulevard Voltaire, après la présidentielle, constatant que sans les boomers, Emmanuel Macron n’aurait jamais été réélu (au premier tour, 41 % des plus de 70 ans ont voté pour lui, 30 % des plus de 60 ans), je reconnais avoir moi-même fait chorus. Du reste, les boomers que vous êtes conviennent aussi de ce constat. Sauf que vous refusez cette opprobre collective, que vous vivez comme une double peine : vous avez dû, votre vie durant, ramer à contre-courant, frêles esquifs dans le tsunami libéral-libertaire dont notre temps est l’acmé, vous heurtant à l’hostilité générale, éternelle chair à canon des causes perdues, mais en sus, vous êtes à présent solidairement cloués au pilori pour des maux contre lesquels vous avez toujours lutté.

Comme l’a écrit Michèle Delaunay, dans Le Fabuleux Destin des baby-boomers, « c’est la partie diplômée détentrice du sens des mots qui va façonner la mémoire dominante, et tous les baby-boomers apparaîtront comme d’anciens soixante-huitards ». Et pourtant... Philippe de Villiers, né en 1949, est un boomer au sens littéral du terme. Daniel Cohn-Bendit, de quatre ans son aîné, aussi. Qui oserait dire qu’ils sont bonnet blanc et blanc bonnet ?

Vous ne votez pas tous, loin s’en faut, Emmanuel Macron. Une bonne part d’entre vous se juge d'ailleurs perdants de la mondialisation : perdants matériels, parfois - certaines pensions ne permettent pas de vivre - perdants immatériels, toujours, d’un bien civilisationnel précieux qui se dissout, d’une France que vous vous désolez de ne pouvoir léguer à vos petits-enfants. Et l’on peut dire que vous êtes l’honneur de votre génération. Il suffit parfois de dix justes pour sauve une ville, c’est écrit dans la Bible. D’une certaine façon, il en est de même pour le Boomeristan.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

77 commentaires

  1. Pour accabler les boomers on n’a pas parlé de la dette , vous savez celle qu’on laisse à nos enfants et petits enfants.
    En fait la dette « roule » depuis Philippe le Bel, l’Etat ne meurt jamais , il rembourse et emprunte tout le temps.
    Et nos enfants et petits enfants ont profité de la dette dés leur naissance, cette dette a financé l’éducation gratuite , les infrastructures , la santé , les allocations diverses.

  2. Merci chère Gabrielle d’avoir entendu notre colère et compris notre détresse.
    Je vous souhaite un excellent week-end.

  3. C’est tellement facile et à la mode de dénigrer les boomers (ils sont blancs, vieux, ils ont bossé, …). C’est vrai que la jeunesse française 2022 est formidable…La dénonciation des boomers c’est le résultat de la victimisation générale (regardez bien autour de vous et vous verrez que la majorité se victimise pour tout et n’importe quoi) qui va chercher des coupables faciles plutôt que d’assumer. Les coupables idéals en ces années 2020 sont les boomers, les russes, le carbone, les virus même bénins…alors c’est le grand défouloir…et on continue de s’enfoncer.

  4. Merci Gabrielle de venir à la rescousse des boomers. Beaucoup d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté et d’autres s’ils ne sont pas pauvres peinent à vivre décemment. Non nous ne sommes pas responsables car personne ne pouvait prévoir ce qui arrive. Les vrais responsables sont les politiques et les industriels qui nous ont trompé avec leur mondialisation heureuse. Elle tourne maintenant au cauchemar.

  5. Étant parent de boomer je peux vous dire que parmi mes descendants il y a des bons et des moins bons et que c’est. Impossible de faire l’amalgame. Les enfants sont ceux de leur époque plus que de leurs parents même si vous suivez une ligne de conduite rigoureuse. Les boomers ont eu une vie plus facile que celle de leurs parents qui sortant de la guerre ont cru bon de les gâter . Ils en paient le prix.

  6. Bien vu mais cela ne règle pas les problèmes il y a bien trop d’ayant droit à tout sans avoir travaillé ou si peu et qui ont tous intérêts à ce que le système perdure. Pendant que Darmanin joue au moulin à vent pour amuser le bon peuple le Dieu Soleil cherche à occuper son temps, rejeté par la scène internationale maudit dans son pays mais il arrive néanmoins à créer de nouvelles structures et de nouveaux postes pour tous ses copains le tout dans une indifférence totale d’un pays oeuvrant dans le tourisme, la seule usine qui tourne encore dans un pays avec une Dette et des Taxes abyssales. Il est vrai que c’est la seule République au monde ou l’argent est gratuit.

  7. Déjà , je n’ai pas voté pour Macron et je m’en félicité . Un type qui ne tient pas ses promesses , aux dernières législatives , pour les retraités il a affirmé qu’il indexerait les retraites sur l’inflation . Ben , Non . inflation 6 % , revalorisation 4 %. Ma retraite diminue chaque année. Les Boomers des privilégiés ? Mais , j’ai travaillé plus de 40 H /semaine , au début 3 semainesde congés, pas de RTT. je ne m’en plains pas , c’était l’époque où la France avait encore un tissu industriel , pas comme aujourd’hui.Comme beaucoup , j’ai aidé mes enfants pour faciliter leur démarrage dans la vie.Les Boomers , souvent investis dans ls diverses associations , et à titre bénévole.Une chose me désole , c’est de voir mon pays s’enfoncer dans l’insécurité , et dont les us et coutumes sont remis en question par des migrants qu’on arrive pas à intégrer , et tout ça avec la bénédiction de gouvernments successifs .

  8. Les boomers dont je suis profitent d’un système de retraite appelé à disparaître du fait que leurs enfants n’ont pas eu le courage de faire des enfants en nombre suffisant. Cette sorte de suicide par égoïsme est cause du mal actuel.

  9. Boomer, j’ai eu le bonheur de commencer ma scolarité pendant la guerre de 40, bombardé tous les jours, les abris un délice, puis ma génération s’est « farci » la non guerre d’Algérie, entré dans la vie active comme chirurgien des hôpitaux chef de service, j’ai eu le plaisir tout au long de ma carrière (retraite effective à 70 ans) de faire les 35 h plusieurs fois par semaine avec 4 semaines de congés annuels et la joie des appels d’urgence nuit et week end. Oui vraiment ma génération a été favorisée par rapport aux forçats des 35h et des 5 à 6 semaines de congés annuels, sans compter les soutiers des aides sociales et autres indemnités chômage .

  10. Bravo, Madame!
    Quelques baumes, grâce à vous, sur toutes nos meurtrissures. Ça fait du bien, et on se sent mieux compris.
    Je suis ulcéré, en effet, d’être amalgamé à nombre de socialo-gauchos post soixante-huitards affairistes que je n’ai jamais supportés, et qui ont mené la France là où elle en est, malgré mes convictions, depuis 1981.
    Et que l’on ne me parle pas des soi-disant « Présidents de Droite », qui n’étaient que Radsocs et ont mis en place le quinquenat, en pétardant la Vème République!

  11. Diviser pour mieux régner. Macron ne sait (et peut) que faire cela. C’est la gouvernance par le désordre et le chaos.

  12. La génération des boomers a travaillé 48 heures par semaine après la fin de la guerre pour relever la France puis 44 heures à savoir 8 heures du lundi au vendredi et 4 heures le samedi matin, ils devaient prendre leurs congés pour garder un enfant malade. Ce sont les socialistes, avec la présidence de mitterrand, qui ont voté la semaine de 35 heures et la création des RTT. Si tous les français avaient le courage des boomers la France ne serait pas au fonds du trou comme elle l’est aujourd’hui.

  13. Ce terme « boomers » est d’un ridicule achevé. Ce charabia (globisch) me fait hurler. J’ai 76 balais, ai travaillé toute ma vie, ai élevé mes filles du mieux que j’ai pu, ai quatre petits-enfants adorables. Bref, un français moyen quoi. Madame Cluzel, vous me décevez. Vous relevez deux noms (De Villiers et cette vermine de Cohn Bendit) et c’est bien court tout ça. Je vais vous dire ce que les gens de ma génération ont loupé totalement, avec l’appui constant de la « gôche » en général et du syndicalisme qui va avec. Nous n’avons pas assez « botté le cul » de nos enfants pour qu’ils continuent à se battre, à travailler, à élire des hommes politiques dignes de ce nom pour PRESERVER ET TRANSMETTRE LES ACQUIS DE CETTE SOCIETE QUE VOUS CONTINUEZ POUR UN GRAND NOMBRE A APPELER « LES TRENTE GLORIEUSES ». En 1968, la clique de ces guignols a détruit en quelques années ce que De Gaulle, en 11 ans seulement avait reconstruit. Cessons de réécrire l’histoire. Et foutez la paix aux « boomers ».

  14. Je connais personnellement un boomer de 63 ans, né dans une famille pauvre, devant travailler pendant toutes ses vacances scolaires pour se payer sa mob, ses fringues et ses bouquins scolaires qu’il achetait d’occasion.
    Ce boomer a commencé à travailler à 18 ans, avec un simple bac technique. Au bout d’un an, il a fait son devoir de citoyen dans un régiment d’infanterie commando puis est reparti au boulot sans avoir pris une seule journée de congé.
    Pour s’élever professionnellement, il a préparé un BTS à distance qu’il a passé en candidat libre à 30 ans.
    Grâce au salaire de son couple, il a pu offrir de belles études à ses enfants sans aucune aide sociale.
    Ce boomer ne se plaint pas et considère qu’il s’en est plutôt bien tiré.

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