Municipales 2020 : votez pour la France des nains de jardin !
C’est un témoignage qui passera inaperçu. Son nom sera bien vite oublié après, pourtant, de longues années de service. On perdra même le nom de sa commune. « C’est beau, mais c’est loin », comme disait Chirac quand il dépliait son grand corps de l’arrière de la voiture en arrivant en Corrèze. Laissons donc une dernière fois la parole à Marinette Mitriot, maire de Chezal-Benoît, près d’Issoudun, dans l’Indre, avant qu’elle ne tire sa révérence après treize années consacrées à la vie municipale.
Avec elle, c’est une certaine France qui s’exprime, celle des élus bénévoles enracinés bien loin des grandes villes, celle du pays réel face au pays légal, celle pour qui un mandat est un service plus qu’une carrière. Dans cette France-là, les élections municipales de mars prochain ne se présentent pas comme ailleurs : loin de se battre pour une place sur une liste, on peine à trouver des volontaires, et encore moins pour la charge de maire.
Mais voilà, Marinette Mitriot est un peu lasse. Ce n’est pourtant pas l’entrain qui lui manquait : « Née à Chezal-Benoit […] quand le maire est venu me chercher, j’ai dit oui », rapporte La Nouvelle République. Un peu comme on répond à une vocation solidement ancrée dans la famille : « J’avais en tête la manière dont mon grand-père avait vécu son rôle de conseiller municipal : il n’avait pas les moyens de transport d’aujourd’hui et devait faire 10 kilomètres pour se rendre à la mairie. Pourtant, il n’a jamais loupé un conseil municipal. » Alors, pourquoi s’arrêter ?
Une certaine fatigue, d’abord : « J’étais là tous les matins à 7 h 30 et je ne suis plus une jeune perdrix ! ! » confesse-t-elle. Mais la vraie raison est plus profonde et tient à un changement de climat que nous ferions bien de méditer. La subsidiarité, c’est le pouvoir qui part du bas et que l’on délègue aux échelons supérieurs si on le juge utile ; force est de constater qu’aujourd’hui, c’est l’inverse qui se pratique et prive communes et citoyens de leurs libertés locales : « Je dirais qu’avec les communautés de communes, les petites communes n’ont plus lieu d’être », lâche-t-elle, dépitée. « Je suis maire mais je ne peux que m’adapter aux décisions imposées et non concertées. Nous n’avons plus aucun levier. »
Voilà pour Paris et pour Bruxelles. Mais avec son franc-parler qui n’entame pas sa bonne humeur, Mme le maire ajoute, à destination des habitants de son village, incarnation des citoyens consommateurs que nous sommes tous devenus : « Dans les petites communes, les citoyens ne veulent plus d’un maire à projets mais d’un maire garde champêtre pour régler les conflits de voisinage ou de coq qui chante… On n’est plus jugé sur les projets qu’on réalise mais sur notre manière de faire la police locale. » Un constat en forme de message pour qui de nous veut bien encore l’entendre… car avec Marinette, c’est un peu de la France qui s’en va, une France rurale, serviable, besogneuse, et un peu du village, de ses liens, de sa place, de sa vie. Et pour laisser la place à quoi ?
Car, si Mme le maire peut conclure, avec son sens de la formule « Un petit maire d’un village de 1.000 habitants est devenu un nain de jardin », la question se pose de savoir ce que, nous autres, nous sommes devenus…
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