Me Frédéric Pichon, de retour d’Ukraine : « J’ai trouvé un peuple nationaliste, déterminé et priant »

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Frédéric Pichon est avocat. Avec deux amis, il a organisé un convoi d'aide aux réfugiés et s'est rendu en Ukraine.

Sabine de Villeroché : Pourquoi une telle initiative alors que la France prend déjà sa part, puisqu’elle accueille déjà de nombreux réfugiés ?

Me Frédéric Pichon : Ce terrible conflit en plein cœur de l’Europe ne peut laisser personne indifférent. Nous nous sentons impuissants à pouvoir changer le cours des choses.
Indépendamment de toute analyse géopolitique et des causes de ce conflit, et plutôt que de se battre sur les réseaux sociaux, je me suis dit que la seule chose que l’on pouvait faire concrètement était d’aider les populations civiles, et en particulier les familles.
Étant père de quatre enfants en bas âge – ce qui est difficile à gérer ! –, je compatis d’autant plus à ces mamans qui se trouvent démunies pendant que les maris – contrairement aux autres mouvements migratoires que nous avons connus récemment – sont au front. Ces enfants pourraient être les miens. Par conséquent, la chose la plus concrète à faire était de les aider, à un tout petit niveau certes, mais ce sont les petits ruisseaux qui font les grandes rivières. J’ai donc bloqué quelques jours de mon précieux temps pour aller là-bas en accord avec mon épouse qui m’a soutenu dans ce projet.

S.d.V: Jusqu’où vous êtes-vous rendus et quelle est la situation pour les familles ukrainiennes sur place ?
F.P: Nous sommes allés à Lviv, qui est une grande ville, la plus à l’ouest de l’Ukraine. Lviv n’est pas un objectif militaire des russes, même si elle est régulièrement bombardée par des tirs de missiles - ce qui fut le cas, samedi dernier – mais un lieu de transit pour les réfugiés. La plupart des denrées et produits envoyés d’Europe sont stockés à la frontière polonaise, notamment à Medyka. Cependant, beaucoup moins de convois vont jusqu’en Ukraine.
S’il y a environ 4 millions d’Ukrainiens qui ont fui vers l’Europe, le gros des réfugiés est à l’intérieur des frontières. Ils sont environ 14 millions qui ont fui leurs villes pour aller dans d’autres endroits en Ukraine. Partis précipitamment, ils se trouvent donc sans rien, d’autant qu’il y a des difficultés d’approvisionnement du fait de la guerre. En outre, des Ukrainiens font le choix de rester chez eux, notamment à Kiev. Sur 3 millions d'habitants de Kiev, la moitié est restée sur place : ils sont démunis. Nos produits étaient donc destinés aux populations qui n’ont pas pu fuir l’Ukraine.
Nous avions collecté, grâce à l’école de mes enfants, de l’alimentation, des couches et du lait pour bébés, des produits d’hygiène et des vêtements. Une partie de ces produits a été acheminée vers Kiev et une autre dans différentes parties d’Ukraine où les besoins sont énormes.


S.d.V: Votre objectif a- t-il été atteint ?
F.P: La démarche est certes modeste par rapport aux besoins – l’Ukraine est un pays qui compte 40 millions d’habitants - mais nous avons pu arriver à bon port malgré des soucis techniques de camionnette avant le départ et même sur la route (!). Nos produits sont arrivés à destination et vont permettre à des familles et des enfants de tenir quelques jours. Je garde en image cette maman à qui nous avons donné une combinaison chaude pour bébé.

S.d.V: Dans quel état avez-vous trouvé le pays ?
F.P: La ville de Lviv est beaucoup moins touchée que Kiev, Marioupol, Kharkov ou Kherson, où les dégâts sont immenses et les victimes civiles de plus en plus nombreuses. Mais j’ai trouvé un peuple très nationaliste, déterminé et très priant. Dans une église de Lviv où nous avons rencontré un prêtre de choc qui accueillait des réfugiés, de nombreux fidèles priaient, et les femmes et les enfants, dans les sous-sols de l’église, préparaient des sandwichs et des chapelets pour les maris qui étaient sur le front. Nous avons également assisté à une cérémonie très émouvante où l’on commémorait la mort de deux soldats ukrainiens sur le front.


Dans le magnifique cimetière de Lviv – ou reposent également les victimes du communisme et du génocide de 1933 où 6 millions d’Ukrainiens sont morts de la grande famine organisée par Staline -, de nombreuses tombes venaient à peine d’être mises en place, suite à la mort de soldats, ces derniers jours. Le carré destiné aux morts de ce conflit ne cesse de s’agrandir. Chaque jour, le nombre de morts de chaque côté est énorme. La semaine dernière, le pape a consacré l’Ukraine et la Russie au cœur de la Vierge Marie. Prions pour que la paix revienne rapidement.

Sabine de Villeroché
Sabine de Villeroché
Journaliste à BV, ancienne avocate au barreau de Paris

Vos commentaires

54 commentaires

  1. Les Ukrainiens malheureusement pour eux , ne peuvent s’en prendre qu’à la marionnette qui leurs sert de président qui , depuis quelques années envoie ses troupes et quelques faschistes agresser le Donbass pro-russe en laissant des milliers de victimes . Ils ont donné le pouvoir à un pro-occidental aidé en cela par les usa et notre bien aimée UE , qui n’a qu’un seul but renverser Poutine .

  2. mr Pichon pourrait il nous raconter ses reportages successifs sur la vie des habitants du Dombass qui se sont fait bombarder depuis 8 ans par les patriotes ukrainiens ? merci .

  3. Robinson

    Ce qui est « idiot » dans ce conflit , c’est l’absurdité de la résistance dirigée par les USA via Zélinski (leur homme de paille) et soutenu par l’UE ( avec Macron : autre homme de paille des USA) . Les malheureux sont toutes les victimes de ce saccage inutile . Une reddition immédiate aurait évité cet engrenage . Il est évident que L’Ukraine ne pouvait et ne peut résister seule .

  4. Et la semaine prochaine il part pour le Dombass et pourquoi pas dans tous ces pays ou les enfants , qui auraient pu être les siens , sont exploités pour nous fournir des tas de trucs : chaussures , masques , t shirt et autres .Cette guerre est voulue par les américains qui vont en tiré profit et soutenu par Macron au détriment des français qui vont payer les pots cassés .Les coupables sont donc les USA la France et l’UE .

  5. J’ai une pensée pour les français de souche , réfugiés dans nos banlieues , ces humbles gaulois qui bossent et qui ne peuvent se sauver à Neuilly , ces français à 30´ de métro d’un centre ville livré aux hordes de racailles et qui n’auront jamais droit à un corridor humanitaire ou même à un article dans le Monde ou Le Figaro ou le Point

  6. Sur plus de 44 millions d’Ukrainiens, déduit les 4 millions partis vers la Pologne et autres pays, il en reste 40 millions en Ukraine. Que font ils ? Où sont ils ? Peut on les interviewer ?

  7. Il aurait fallu s’inquiéter de ce qui se passait à l’est de l’Ukraine dans la Région du Donbass depuis 8 ans déjà, avec tous les morts côté russophones.
    Aider sans connaître et dire toute la vérité de l’Histoire, ce n’est pas aller vers la Paix, mais juste agir dans l’émotion.
    Zelensky le pantin de Biden Mania U S avait des années pour faire appliquer par écrit les accords de Minsk. Et je ne crois pas que l’Orthodoxie des Russes acceptent celle de l’Ukraine avec la GPA, le wokisme, etc…

  8. Cher monsieur, vous étiez où depuis 8 ans lorsque vos chères victimes tiraient (et tirent encore) sur le Donbass?

    Victimes inintéressantes, enfants moins égaux que ceux de l’Ukraine actuelle???

    Pour moi, désolée, mais une victime est une victime, de quelque bord que ce soit et j’apprécie mal cette discrimination ou plutôt l’inintérêt sur certaines victimes lorsque cela ne rapporte pas de gloire ou que ces victimes ne soient pas du bon côté médiatique selon MacKinsey, peut être même….

  9. J’ai été sidéré d’apprendre que le gazoduc qui traverse l’Ukraine , non seulement, est toujours en fonctionnement, mais , en outre, les 12 millions de foyer ukrainiens sont toujours alimentés. L’Ukraine, par ailleurs, continue de toucher des royalties sur le passage de ce gaz. BHL, Pompili et tous les donneurs de leçons à moraline , un commentaire ?

  10. Cette guerre est innommable, mais je pense que nous ne savons rien des intentions des belligérants alors méfiance sur ce genre d’action humanitaire et j’espère que l’on ne découvrira pas sous cette couverture ce sont des livraisons d’armes qui est réalisé la seul chose à faire pour la France c’est négocier la paix à toute force .
    je regarde un journaliste français  »stratpol » qui commente cote Russe et nous pouvons voir des images des régions occupées

  11. Toute guerre est atroce et les peuples les premières victimes. Sincères pensées à tous ceux qui souffrent quelle que soit leur nationalité. Toutefois, en politique rien n’est blanc rien n’est noir et ce qui importe avant tout, c’est qu’un compromis rapide soit trouvé et que l’accord qui en sortira soit respecté et non trahi en permanence par des personnes qui ne pensent qu’à eux et non aux peuples.

  12. Cela me ramène aux années 1982-83 où, avec mon épouse nous allions en Pologne en état de guerre pour apporter une aide à l’Eglise Polonaise qui soulageait les victimes dans un silence assourdissant des bien-pensants actuels.

    • Bravo à vous, c’est un vrai acte d’humanité.

      Aujourd’hui, Il faut surtout qu’à son retour d’une mission humanitaire, les réseaux sociaux en soient bien informés… Sinon à quoi bon !

  13. Tellement habitué à l’illusion d’une paix générale pour laquelle il cache sous le tapis nombre de conflits larvés et guerres civiles travesties, l’Occident subit un violent rappel à la réalité : la loi du plus fort reste la règle. Les Ukrainiens auraient dû y penser avant d’accepter de se corrompre avec les USA et l’UE. Poutine n’est pas du genre LGBT.

  14. Il n’y a pas un seul peuple ukrainien. Le « nationalisme » n’est le fait que de la partie occidentale (et occidentalisée à coups de subventions depuis des années pour amener tout le pays dans le giron US).
    C’est très bien d’aller aider les victimes, mais il faut éviter de généraliser ce su a été constaté dans un lieu particulier.

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