Militant LREM et membre du Printemps Républicain, Matthieu Gariel a provoqué l'ire de LFI et d'une partie de son camp en déclarant qu'en cas de second tour RN-LFI, il voterait pour le candidat du Rassemblement National. Sa position lui a valu une exclusion du Printemps Républicain. Il s'explique au micro de BV.

Marc Eynaud : Vous avez déclaré qu’en cas de second tour Nupes / RN vous préféreriez mettre un bulletin Rassemblement National dans l’urne. Pourquoi cette décision ?

Mathieu Gariel. C’est plutôt dans le cas d’un duel où le candidat Nupes est LFI. En effet, je pense que LFI est largement sorti du champ républicain, certains PC, PS ou EELV sont majoritairement républicains. On a souvent le front républicain face au RN et je pense qu’on devrait l’appliquer à LFI pour montrer qu’il ne s’applique pas qu'au RN. Voter RN c’est aussi montrer qu’il faut changer la doctrine et appliquer ce barrage plus largement.

M.E. Concernant les partis politiques, où placer le curseur dans le champ ou hors du champ républicain ?

M.G. Pour moi le champ républicain se fonde sur des principes assez simples. Par exemple, parler de rationalité et éviter de se perdre dans le complotisme comme cela a été le cas pour pour les vaccins au RN et à LFI, c’est avoir un débat démocratique sain. On ne peut pas avoir un débat démocratique sain s’il est basé sur de fausses informations ou des mensonges. Pour le cas de LFI, quand on appelle à désarmer la police et à mettre à bas la république, quand on attaque les institutions -même verbalement- alors qu’on est élu, on est sorti du champ républicain. Pour cette raison, je pense que LFI en est sorti et on ne l’a pas assez dit.

M.E. Après avoir émis cette position personnelle, le Printemps Républicain vous a exclu. Êtes-vous surpris ?

M.G. Le Printemps Républicain est un mouvement issu de la gauche qui depuis toujours appelle à faire barrage au Rassemblement national. Donc en disant que je voterais Rassemblement national, l’exclusion était logique. Je comprends leur position, mais cette position n’est plus tenable aujourd’hui, même pour des personnes se revendiquant de gauche.

M.E. Vous avez grandi à Grenoble où vous avez pu voir une politique d’extrême gauche...

M.G. En 2014 j’étais sur une liste divers droite ou plutôt divers centre, du coup j’ai vu l’élection d'Éric Piolle arriver. À ce moment-là, c’était pour exclure les socialistes qui géraient la ville depuis 18 ans. On s’est très vite rendu compte de l’erreur. Il valait mieux les socialistes républicains. Quand on dit qu’Éric Piolle est un maire écologiste, on oublie que la promesse était : un tiers d'EELV, un tiers de LFI et un tiers de société civile. Ceux de la société civile sont à peu près tous proches de LFI. Donc la ville de Grenoble est davantage tenue par la France insoumise que par les écologistes qui seraient plus modérés. La gestion calamiteuse de la ville est visible à l’extérieur : les débats sur le burkini ou récemment lorsqu’une adjointe a démissionné parce que le maire ne prenait pas position assez rapidement en faveur du burkini. On a franchi tous les caps dans le délire.

M.E. Au sujet des consignes de vote pour le deuxième tour, on a du mal à déceler les positions de la majorité présidentielle. Est-on dans les clivages stratégiques en fonction des circonscriptions ?

M.G. Sur le terrain, les adhérents peuvent se sentir proches de certains PS ou de certains EELV ou de certains PCF sur les valeurs républicaines, mais comme tout ceci est englobé dans une alliance, chacun a du mal à éclaircir ses positions. La position réelle de tous les élus, porte-parole et cadres du parti de la majorité est ni LFI ni RN. Mais comme on a été habitués au front républicain qui ne s’applique qu’au RN, on continue d’appeler à faire barrage au RN et à dire que le reste se fera au cas par cas. Or le cas par cas est tout sauf LFI et RN, donc la position devrait se clarifier d'elle-même au bout d’un moment.

M.E. Craignez-vous que LREM et ses alliées n’aient pas la majorité absolue à l’Assemblée nationale ?

M.G. Dimanche soir, quand j’ai vu les résultats, la situation était compliquée... Pour certaines circonscriptions, on pouvait penser qu’on passerait au deuxième tour plus facilement. Or c’est nettement plus serré. Oui il est tout à fait possible que l’on n'ait pas à la majorité absolue au soir du second tour, il faudra composer. Dire qu’il vaut mieux voter RN, c’est s'abstenir de devoir choisir à composer avec une Nupes composée en majorité de LFI et qui serait totalement ingérable.

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16 juin 2022 à 20:42

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