Macron joue au Premier ministre, Bayrou au Président : faudrait s’entendre !

Macron et Bayrou n’ont qu’un but : tenir le plus longtemps possible.
Capture d'écran YT présidence de la République
Capture d'écran YT présidence de la République

Se sont-ils concertés ou bien font-ils leur petite affaire, chacun dans leur petit coin, chacun à son idée ? On peut se le demander. Vendredi, en plein milieu du pont du 1er Mai, Emmanuel Macron, dans Le Parisien, a annoncé qu’il lançait une convention citoyenne sur le thème de l’éducation, et plus particulièrement sur les vacances et les rythmes scolaires. Très bien. Ce dimanche, dans le JDD, François Bayrou lance l’idée d’un référendum sur la question budgétaire qui est devenue centrale. Très bien, là encore. Quoique.

Quoique, parce qu’il paraît que nous avons une constitution, certes moults fois liftée depuis 1958, au point qu'elle ne ressemble plus trop à ce qu’elle était dans sa belle jeunesse. Que cette Constitution fixe au Président et au Premier ministre leurs attributions et prérogatives. Le premier « assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'État », le second « dirige l'action du gouvernement » qui « détermine et conduit la politique de la nation ».

Un Macron touche-à-tout

Or, que voit-on ? Un Président qui touche à tout, se mêle de tout, s’occupe de tout, sans d'ailleurs jamais rien finir correctement. Évidemment, la question de l’éducation est centrale, vitale et préoccupante pour les parents, grands-parents que nous sommes et qui voyons la (pas si) lente dégringolade de notre système éducatif. Évidemment, la question des rythmes scolaires et des vacances est importante car elle conditionne, d’une part, l’équilibre intellectuel, physiologique et psychologique de notre jeunesse et, d’autre part, en grande partie, le rythme de fonctionnement de notre société, notamment au plan économique.

Mais n’y a-t-il pas dans ce gouvernement un ministre de l’Éducation nationale ? Il paraît que oui, que la dame (Élisabeth Borne) est même ministre d’État, qu’elle a été Premier ministre dans un passé récent. Et le Président, en grand goujat élyséen qu’il est, lance son idée de convention ! « Il me paraît nécessaire que l’on travaille à faire en sorte que l’organisation des journées de nos élèves soit plus favorable à leur développement et aux apprentissages, qu’un équilibre soit trouvé aussi pour faciliter la vie des familles. » Fort bien, mais c’est le job du gouvernement !

Quant à l’idée de convention citoyenne qui semble à Macron « être l’outil de consultation des Français le plus adapté… », on se pince. Après la convention citoyenne sur le climat (2019-2020), puis celle sur la fin de vie (2022-2023), on va donc repartir avec ce nouveau genre de consultation de personnes tirées au sort mais dont les débats seront orientés, guidés, préparés par des experts qui, eux, ne seront pas tirés au sort. L’affaire sera pilotée par le Conseil économique, social et environnemental (CESE), l’occasion de montrer qu’il sert peut-être à quelque chose… L’occasion, aussi, pour un Macron en bout de course, sans majorité, d’amuser la galerie en laissant croire que la démocratie du tirage au sort vaut bien la démocratie représentative.

Idée lumineuse de Bayrou : un référendum sur le budget

De son côté, François Bayrou veut un référendum pour trancher la question budgétaire. Il paraît que le référendum est une prérogative constitutionnelle du Président, pas du Premier ministre. Certes, le Premier ministre le rappelle bien dans son interview au JDD, mais tout de même ! Et l’on est par avance curieux de la question qui serait posée aux Français si, à Dieu ne plaise ou tout du moins au Président, l’idée venait à prospérer. Parce qu’à un référendum, on répond par « oui » ou par « non ». « C’est un plan d’ensemble que je veux soumettre, il demandera des efforts à tout le monde, et par l’ampleur qui doit être la sienne, il ne peut réussir si le peuple français ne le soutient pas », déclare le Premier ministre. Carrément. Un peu comme Louis XVI qui convoqua les États généraux pour régler la question financière. On sait comment cela se termina. Le référendum : l’Arlésienne de la Macronie depuis sept ans ! En 2023, on nous avait même balancé l’idée d’un « pré-référendum », un concept tout nouveau, sans lendemain. Et, lors des vœux pour 2025, Macron avait annoncé qu’il consulterait les Français en 2025. Sur quel sujet ? Mystère et boule de gomme.

Donc, un référendum sur le budget, qu'il a dit, François Bayrou qui n'est pas Président. Mettons. Comment, du reste, ne pas être pour un référendum et à ce retour aux fondamentaux de la Ve République ? Mais la ficelle n’est-elle pas un peu grosse ? On nous explique que la consultation des Français sur la question existentielle de l’immigration n’est pas possible, mais sur le budget, cela le serait ? Mettons encore. Mettons que le référendum ait lieu et que les Français disent « non ». C'est pas impossible. On fait quoi, ensuite ? Bayrou démissionne et rentre à Pau ? La belle affaire. Et le Parlement, dans tout ça, et dont c’est le rôle principal, comme dans toute démocratie qui se respecte, de voter et contrôler le budget ? En fait, on l’aura compris, Macron et Bayrou n’ont qu’un but : tenir le plus longtemps possible en contournant une Assemblée nationale improbable, fruit d’une dissolution impulsive et d’arrangements contre-nature entre Macronie et Nouveau Front populaire pour barrer la route du pouvoir au Rassemblement national.

L'un fait le Premier ministre, l'autre le Président. Qui fait l'ange fait la bête et inversement, mais on ne vous dira pas qui est l'ange et qui est la bête.

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

74 commentaires

  1. L’un comme l’autre sont persuadés qu’une fois qu’ils ont parlé, ils ont agit …. La gouvernance par la com est devenue un marqueur singulier de notre époque.

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