Livre : La Dynastie des Song. Histoire générale de la Chine (960-1279), de Christian Lamouroux

dynastie song

En 2017, les Éditions des Belles Lettres entamaient, avec leur ouvrage sur les dynasties Qin et Han, une importante collection en dix volumes sur l’Histoire générale de la Chine.

Paru il y a quelques semaines, le quatrième tome, sur la dynastie des Song (960-1279), était très attendu des sinophiles. Riche, comme à l’accoutumée, de nombreuses cartes et illustrations couleur, l’ouvrage de Christian Lamouroux relate l’avènement des Song par le général Zhao Kuangyin, des Zhou postérieurs, à l’époque dite « des cinq dynasties et des dix royaumes » qui succéda directement à la chute des Tang.

Dès sa prise de fonction sous le nom de Taizu, en 960, Zhao Kuangyin s’empara du sud de la Chine, centralisa l’administration et la fiscalité, réduisit le pouvoir des gouverneurs et des chefs militaires et mit l’accent sur le recrutement de fonctionnaires lettrés.

Sous les règnes de Taizu, de Taizong et de Renzong, l’État favorisa ainsi un climat d’effervescence intellectuelle qui se traduisit par l’éclosion de centaines d’académies privées dans tout le pays. Hélas, l’administration recrutant plus que de raison, le nombre de fonctionnaires et de militaires inactifs ou sans affectation devint pléthorique, de quoi aggraver les déficits publics, au même titre que les dépenses somptuaires de la maison impériale ou que l’urbanisme démesuré promu plus tard par l’empereur Huizong. Les crises inflationnistes firent, en outre, l’objet de vives tensions dans le pays, débouchant sur des révoltes paysannes.

En reprenant l’idée des Sui de permettre aux roturiers de se présenter aux concours de la fonction publique, les souverains firent preuve a priori d’une certaine équité ; cependant, la simonie n’était pas rare et le favoritisme dont bénéficiaient les élites aristocratiques pour l’obtention des postes à responsabilités indignait ceux qui ne juraient que par la méritocratie. Parmi ces derniers se trouvaient les lettrés de l’École de la Voie (ou École du Principe) selon qui la captation des postes contrevenait à l’idéal de vertu confucéen. Ces « factionnalistes » furent à l’origine même du néoconfucianisme dont Zhu Xi – le saint Thomas d’Aquin chinois – est aujourd’hui le penseur le plus célèbre.

Si les historiens s’accordent à dire que le règne des Song se distingua par un essor de la vie urbaine, par un foisonnement intellectuel et technologique sans précédent (on pense, évidemment, à l’imprimerie et à la navigation) et par un accroissement des échanges commerciaux avec toute l’Asie, l’empire ne fit pas moins l’objet d’attaques incessantes sur ses frontières. Harcelé dès les premiers temps par les Khitan de la dynastie Liao, l’empereur Song dut également composer, à partir de 982, avec l’hostilité des Tangut du royaume de Xi-Xia, à l’est. Par la suite, les Jürchen, qui du nord de la Mandchourie étaient descendus vers le sud et avaient absorbé les Khitan, installèrent la dynastie Jin et devinrent les principaux rivaux des Song. En 1127, les Jin prirent Kaifeng, la capitale, et tous les territoires au nord du fleuve Jaune, marquant ainsi la fin de l’âge d’or des Song qui durent reculer vers le sud. En 1218, venu de Mongolie, Gengis Khan annexa le Kara-Khitai (vestige des Liao) avant de détruire le royaume Tangut des Xi-Xia en 1228, puis l’empire des Jin en 1234. Désormais, plus rien ne s’opposerait à la progression des Mongols. Khubilai Khan, petit-fils de Gengis Khan, prit le Yunnan en 1254, combattit les Song à la bataille décisive de Dingjiazhou et entra en vainqueur le 18 mars 1276 avec ses hommes dans Lin’an, la capitale de ses ennemis, avant de fonder l’éphémère dynastie des Yuan.

Passionnant, l’ouvrage nous propose une première partie sur les faits, relatés de façon chronologique, puis des chapitres thématiques permettant d’étoffer nos connaissances. Concernant Zhu Xi et le néoconfucianisme, on ne saurait que trop conseiller, pour compléter cette lecture, le livre monumental de Roger Darrobers, paru en novembre chez You Feng : Zhu Xi. Éléments de philosophie confucéenne.

Pierre Marcellesi
Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

Vos commentaires

Un commentaire

  1. Merci Christian et mes félicitations pour un travail essentiel à la compréhension de la marche du monde à travers des siècles que nous ne voulons pas voir.
    Jean-Louis

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