Limogeage du patron de la PJ de Marseille : vers une révolte des policiers ?

police judiciaire

Le poids des mots, le choc des vidéos. Vendredi soir, le passant distrait des réseaux sociaux était sidéré par la « haie du déshonneur» que des dizaines de policiers marseillais avaient réservée au directeur de la police nationale, Frédéric Veaux, venu vendre la réforme de la PJ voulue par Emmanuel Macron.

Et tout aussi stupéfait par la haie d'honneur des mêmes saluant leur chef, Éric Arella, limogé ce vendredi.

Le Monde parle de « coup d'éclat », de « très vif émoi », mais a bien pris la mesure de l'événement : « La police judiciaire traverse-t-elle la plus grave crise de son histoire depuis sa création en 1907 ? »

Vendredi soir, la direction générale de la police nationale justifiait ce limogeage : « Une telle déloyauté n’est pas acceptable », ajoutant que « les résultats à Marseille sont par ailleurs mauvais avec des niveaux record d’homicides alors que les effectifs ont été considérablement renforcés ».

Mais cela n'a pas suffi à éteindre l'incendie, au contraire. Selon Le Parisien, le directeur central de la police judiciaire, Jérôme Bonet, aurait aussi mis sa démission sur la table par solidarité avec son collègue sanctionné. Démission rejetée, car , toujours selon Le Parisien, elle « sonnerait le glas de la réforme et conduirait à guerre ouverte au sein de la police ».

Cette nouvelle manifestation d'autoritarisme du pouvoir qui, avec la haie d'honneur réservée au patron qui n'a pas démérité, rappelle le limogeage du général de Villiers et, plus récemment, le recadrage humiliant du patron d'EDF est révélatrice et inquiétante. Révélatrice des tensions en cours dans l'appareil d'État mais aussi des erreurs grossières d'appréciation de nos dirigeants. D'abord sur la nécessité de cette réforme censée placer tous les policiers sous un commandement unique. Sur son timing, aussi : était-ce vraiment le moment de bousculer l'institution alors que les oppositions à cette réforme sont fortes et que le gouvernement est déjà confronté à une grogne importante sur les retraites ou le coût de l'énergie ? À quelques jours, aussi, d'une manifestation de la gauche à laquelle Jean-Luc Mélenchon a donné un objectif révolutionnaire ?

Tout pouvoir soucieux de l'ordre public , mais aussi de sa pérennité, se serait bien gardé de créer un tel désordre supplémentaire au sein de la police. Il savait déjà que la base de la police avait, à plusieurs reprises, manifesté son ras-le-bol. Avec cette affaire, la protestation est montée d'un ou deux crans, y compris dans la hiérarchie. Pire, pour le pouvoir macroniste : la grogne fait tache d'huile : vendredi, ce sont les policiers de la PJ de Versailles qui ont manifesté leur opposition à la réforme devant les grilles du château de Versailles.

Même protestation à Nanterre, où les policiers ont entonné « La Marseillaise ».

Autre signe de l'ampleur du mécontentement. Plusieurs magistrats, d'ordinaire réservés, ont ouvertement critiqué le limogeage d'Éric Arella, comme Robert Gelli, ancien directeur des affaires criminelles et des grâces et ex-procureur général de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, qui a dénoncé dans son tweet « une honte d’abord pour le policier aux résultats remarquables, pour la police dans son ensemble, pas que judiciaire, qui est salie par cette éviction, et enfin pour la République qui ne traite jamais ainsi ses loyaux serviteurs ».

Ce nouvel épisode jette une lumière crue sur le macronisme et sur ce qui ressemble à une fin de règne bien avant l'heure. Il y a un mois, le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, malgré la fronde, assurait : « La réforme de la police nationale aura bien lieu en 2023. »

Alors, en ce 7 octobre, le pouvoir a-t-il pris conscience de l'ampleur de l'incendie qu'il a lui-même allumé ? Et va-t-il ajourner cette réforme ? En tout cas, les policiers de la PJ envisagent de manifester partout en France le 17 octobre.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

Vos commentaires

24 commentaires

  1. Mine de rien Macron prépare t-il un coup d’Etat ?
    Corps diplomatique dissout et préparation de dissoudre le corps, indépendant du pouvoir des Ministres de l’intérieur et de la justice de la Police Judiciaire et création du Conseil National de la Refondation (CNR) pour contourner la majoritaire de l’opposition de l’Assemblée Nationale, sont autant de prémisse d’un coup d’Etat à bas bruit.

  2. Moins la police et la justice seront efficaces sous les ordres de la macronie et plus la racaille sera tranquille. C’est ce que les faibles les impuissants et les traîtres osent appeler la paix sociale. Honte à ces complices de la destruction de la France.

  3. bravo et soutien aux policiers, et qu’ils continuent de montrer leur mécontentement !! soutien aussi aux FDO qui subissent de plus en plus les attaques des racailles !!!

  4. On les appèlera les gilets bleus. Si le prince continue on va vers un beau bordel. On sait comment ça commence, pas quand ça finit

  5. A force de se mettre les militaires (avec de Villiers puis avec les « lanceurs d’alerte « il y a 2 deux ans) et maintenant les policiers à dos, Macron ne va plus trouver personne pour protéger quand les Français vont « venir le chercher », comme il le leur propose si souvent… Ce banquier, sans aucune autre expérience, devenu président par raccro, veut apprendre aux hommes de métier comment ils doivent travailler… c’est le summum de l’orgueil mal placé. A force de jouer avec le feu…

  6. Encore une bavure monumentale mais pour cette fois pas policière mais politique. L’entreprise macronienne de démolition s’attaque à un Rempart de la République de France : la P.J. dont la compétence, la renommée, les résultats ne sont plus à démontrer. Le démantèlement de cette noble institution est scandaleux, impensable. C’est habiller Pierre avec les effets de Paul. Ça ne changera rien à la délinquance en France tant que des lois sévères ne seront pas appliquées surtout en matière de trafic de stupéfiants qui entraîne tout le reste.

  7. Ajourner une réforme vous n’y pensez pas, l’égo de Macron ne lui permet pas de reculer, pourtant il devrait se rappeler que seuls les imbéciles ne changent jamais d’avis.

  8. Tant que les français , par milliers, ne se retrouveront pas dans la rue pour contester ou « renverser » ce pouvoir, ils feront ce qu’ils voudront mais après tout 58% des français l’ont réélu ! Il faut savoir !

  9. Il serait temps que les français se réveillent et éjectent cette dictature macronienne qui détruit tout sur son passage.

  10. C’est assez étrange cette propension de la macronie de coopter la nullité et de rejeter la compétence ?
    Nos « flics » de polices profondes sont d’une compétence rare. Peut de chose semble leur échapper. Leur problème, c’est d’être chapeautés par des crétins.

  11. Les syndicats de POLICE ont un « pouvoir » qui pourrait être bien mieux « utilisé » s’ils voulaient vraiment contrer les destructions qu’ils subissent eux aussi depuis bien longtemps !
    Mes amis policiers me racontent comment ils font leurs patrouilles avec leurs VTT perso car « pas assez de budget » pour réparer le parc estampillé « Police » … LOL
    Une question: pourquoi les gendarmes doivent « être injectés » mais pas les policiers alors qu’ils ont et font le même travail essentiel ? La seule réponse valable: parce qu’il y a des syndicats dans la police !

  12. Impressionnants cortèges, le mécontentement semble vraiment général …. Mais notre bon souverain l’entendra-t’il ?

  13. Trop fière et trop sure d’être dans son bon droit Macron ira jusqu’au bout .Une réforme de l’élysée s’impose dans l’urgence .

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