L’hiver est là !

campagne hiver

Mais quelle joie de remettre un cache-nez et des gants pour tenir son cartable en allant à l’école. Certains pensent que je vais à la banque, mais ils se trompent… comme toujours ! Je vais bien à l’école tous les matins par les petites rues de la vieille cité médiévale. Je marche ainsi « à reculons » dans les temps anciens où me bercent encore mes rêves d’enfant. Je suis heureux, tout simplement heureux, et je remercie le Bon Dieu de m’accorder tant de joies. Les feuilles sont tombées dans la cour de récréation, les châtaignes ont toutes été ramassées et nous jouons aux billes à la lueur d’un vieux réverbère : je me dépêche car ma mère va s’inquiéter. Encore un calot ! J’ai gagné un magnifique calot bleu et vert contre deux billes en terre et une agate. Allez, je joue encore une fois et, c’est promis, j’arrête. Oh, zut ! Le car bleu vient de démarrer derrière le grand mur de l’école et, pour le coup, c’est sûr, je vais être en retard.

Je cours dans la côte du vieux château et mon cœur bat… très fort ! J’ai peur car la nuit est en train de tomber et les dernières lueurs du jour, dans les grands arbres du parc, dessinent des formes inquiétantes. Je cours et ma chemise se défait du pantalon. Le froid me rentre sur le nombril et, cependant, je transpire autour du cou. Mon Dieu, comme tout cela est étrange : j’ai peur, j’ai vraiment peur ; et pourtant je suis profondément heureux car je cours dans un monde qui m’appartient… dans un monde où l’homme ne sait rien, ne domine rien, ne comprend rien si ce n’est qu’il est une toute petite chose dans l’univers et que l’univers lui répète sans cesse qu’il est depuis toujours « son » bien-aimé, « son » enfant chéri : la terre et le ciel chantent pour lui et chanteront tant qu’il ne les fera pas se taire par une conduite folle ou irrespectueuse !

Les arbres et la mer, la montagne et le chant des oiseaux, les couchers de soleil et la musique des grillons, le regard du grand-père et le tendre sourire de la grand-mère, et la vieille maison qui sent les confitures et l’encaustique. Tout cela est à lui, pour toujours, s’il le veut bien et… s’il fait attention… et qu’il ne casse pas la grande horloge du temps. Et s’il ne met pas la bombe au milieu des hommes. S’il ne met pas la haine dans les poignées de mains. S’il ne met pas le mensonge au service de sa propre puissance, s’il calme sa volonté de tout dominer et retrouve enfin le chemin de la douceur et de la tendresse, de la sagesse et de l’humble désir d’être tout simplement heureux. D’être là à regarder tomber la nuit, à entendre le dernier sifflet du merle qui rentre au nid pour la froide nuit, et le dernier tintement de l’église sur la colline d’en face rappelant à la terre qu’un homme de Dieu élève encore le corps du Christ à la face du monde et puis… le dernier tic-tac de l’horloge avant le sommeil qui vient… ce sommeil qui vous envahit et vous fait pleurer de bonheur, juste avant l’endormissement…

Olivier de Belleville
Olivier de Belleville
Ancien cadre de banque

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