Les sanctions sportives contre la Russie sont-elles vraiment utiles ? 

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Une semaine après le début de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, les sanctions ne cessent de s'abattre sur le Kremlin. Au-delà des rétorsions financières et médiatiques, des sanctions sportives ont également été prononcées. La Fédération internationale de judo (FIJ) a annoncé, dimanche 27 février, la « suspension » du statut de président honoraire et d'ambassadeur de Vladimir Poutine. La finale de la Ligue des champions, censée se disputer le 28 mai prochain à Saint-Pétersbourg (Russie), est déplacée au Stade de France. La Russie est également exclue de la prochaine Coupe du monde de football au Qatar en 2022. La Fédération russe de football a dénoncé une mesure « discriminatoire » et a déclaré être « en désaccord total avec la décision de la FIFA et de l'UEFA de suspendre les équipes russes » et estime que cette mesure « aura un effet discriminatoire sur un grand nombre de sportifs, d'entraîneurs, d'employés de clubs ou de la sélection nationale ». Des sanctions qui ont un sens, quand on sait que Vladimir Poutine s’est servi du sport comme soft power.

Arrivé à la tête de la Russie, l’ancien membre du KGB a fait un geste fort en recevant son ancien entraîneur de judo au Kremlin. Un petit geste, fort en symbolique, qui fut le point de départ d’une politique basée sur le rayonnement du sport. Depuis son premier mandat, Vladimir Poutine a engagé la reconstruction d’un système alliant politique, économie et sport. « Ce dernier avait été largement mis à mal par le chaos des années 1990 et l’entrée de la Russie dans l’économie de marché afin d’en faire un instrument de soft power à l’international », explique Lukas Aubin, géopolitologue spécialiste du sport en Russie à L'Obs. Un pari qui s’est avéré gagnant : en l’an 2000, 20 % des Russes pratiquaient une activité physique régulière, contre 40 % en 2020, assure Lukas Aubin. L'investissement dans le domaine sportif n’est pas seulement voulu pour les bienfaits sur le corps humain, mais également pour certaines valeurs que le sport véhicule. À l’intérieur du pays, cela facilite la transmission de valeurs patriotiques avec le respect du drapeau et de l’hymne national. Sur le plan international, le sport permet le rayonnement de la Russie dans le monde. Les sanctions sportives prises envers la Russie ne sont donc pas dénuées de sens, surtout pour le peuple russe.

Contrairement aux sanctions économiques, qui sont certes plus graves, les Russes vont s'apercevoir immédiatement de l’exclusion du monde occidental. « Poutine avait misé sur le sport pour asseoir sa notoriété et voir de telles sanctions peut générer un mécontentement dans la population. Même si la Russie n’est pas une vraie démocratie, Poutine doit tenir compte de l’état de l’opinion », analyse Pascal Boniface, directeur de l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), auprès de Ouest-France. Le gouvernement russe doit écouter l'opinion publique, car le sentiment de rejet que peuvent entraîner de telles rétorsions peut être la goutte d’eau qui fait déborder le vase. D’autant plus que plusieurs sportifs ont pris position contre Vladimir Poutine. La vidéo de l’un d’entre eux cumule plus de 23 millions de vues sur Twitter. Le tennisman Andrey Rublev a écrit sur une caméra de télévision : « Pas de guerre, s’il vous plaît. » Les réactions des différents sportifs, symboles de la Russie à l’étranger, peuvent faire pression sur l'opinion publique et, peut-être, entraîner une bascule en défaveur du régime actuel.

 

Il existe plusieurs exemples, dans l'Histoire récente, d'événements sportifs qui ont marqué la géopolitique. Vincent Chaudel, fondateur de l'Observatoire du sport business, en recense quelques-unes pour Le Figaro. Récemment, il y a eu la rencontre entre la Corée du Nord et la Corée du Sud lors des Jeux olympiques d'hiver de Pyeongchang en 2018. Un an après la chute du mur de Berlin était organisée la Coupe du monde de football, l’occasion pour l’Allemagne d’avoir une seule et même équipe. Toutefois, si le sport reste un moyen de pression, il l’est parmi bien d’autres comme l’économie ou la fermeture des comptes des médias en France comme RT et Sputnik. Vincent Chaudel le dit lui-même : « On ne peut pas faire du sport l'alpha et l'oméga d'une politique diplomatique. Mais le sport peut faire bouger des lignes. »

Kevin Tanguy
Kevin Tanguy
Journaliste stagiaire à BV, étudiant en journalisme

Vos commentaires

35 commentaires

  1. Poutine, comme tous les dictateurs, s’est servi du sport comme un faire-valoir politique, un outil de propagande de son régime totalitaire, marchant en cela dans les pas rougis de ses prédécesseurs Hitler, Staline et du son frère et protecteur actuel Xi Jinping… quitte à tordre le nez avec cynisme à l’éthique sportive en organisant un système de dopage d’État à grande échelle, avec la complicité active des « athlètes » bénéficiaires, déjà sanctionnés en ce moment-même…
    La gloire à tout prix…

  2. Nous eussions apprécié pareil déchaînement de sanctions contre l’Azerbaïdjan allié à la Turquie lorsqu’il a attaqué l’Arménie ; contre l’Arabie saoudite qui massacre allègrement les Houtis ; la Chine qui n’est pas tendre avec les Ouïgours ; les USA qui ont fomenté tant de coups d’états, de guerres etc ; les soutiens des islamistes. Mais le peuple est aveuglé par la compassion à géométrie variable imposée par la nomenklatura médiatico-politique particulièrement déchaînée en période électorale.

  3. Les populations européennes et russes vont payer lourdement la décision d’un seul etre vivant.Les Ukrainiens de façon horrible.Nous entrons dans la démence.

  4. Et aucune sanction pour la finale du foot ou il y a eu tant de morts sur les chantiers , un pays ou les droits de l’homme sont bafoués sans parler du traitement des femmes .Bande de lâches .

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