Sur Johnny, dont les rythmes et les chansons ont ému plusieurs générations, tout a été dit. Icône de la chanson française - "le roi est mort", écrit l'ami Nicolas Gauthier -, celui qui a remué les cœurs et les corps, Jean-Philippe Smet, s'en est allé "comme il aura vécu tout au long de sa vie, avec courage et dignité", écrit, bouleversée, sa femme Laeticia. Parmi les hommages qui tombent en cascade, sincères mais souvent un peu convenus quand on ne l'a pas véritablement connu, il en est un qui touche (ce n'est que mon avis) plus que les autres.

« Il était le bad boy qui chantait l'amour, le rocker sentimental qui défiait Gabrielle ou Sarah, le cœur tendre allant de conquêtes en déchirures. Nous avons souffert et aimé avec lui »

(Emmanuel Macron).

Eh oui ! Johnny a illuminé les après-midi de tant de jeunes filles en fleurs, qui rêvaient à l'amour fou, ou de celles qui, embarquées bien malgré elles dans les tourmentes des prémices amoureux, pleuraient toutes les larmes de leur corps, imaginant leurs cheveux qui s'étaleraient "comme un soleil d'été" sur l'oreiller ressemblant "aux champs de blé". Johnny, dans un murmure, évoquait "l'ombre et la lumière", "des montagnes et des forêts et des îles aux trésors dessinés sur [leur] corps" en plein chamboulement. C'est quand même autre chose que de se faire traiter de "truie" ou de "salope" par certains rappeurs…

Johnny le rebelle à qui s'identifiait, aussi, visiblement, certain garçon de 15 ans amoureux de sa prof de français, mariait les facettes du rebelle viril avec celle d'un homme qui, longtemps, a cherché l'apaisement, tout autant que celle de l'ami fidèle, du père pudique, de l'amant doux et romantique. Johnny, notre Elvis français, ce caractère bien trempé, mélange de modernité jetant aux oubliettes les carcans de la France d'avant et le Johnny, cet homme accompli qui avait compris avec sa tête et ses tripes à quel point les valeurs fondamentales fustigées aujourd'hui représentaient le point d'ancrage universel de tous les humains sur la Terre entière.

Johnny, Alain Delon ou, plus anciens, Gabin, Brel, Philippe Noiret, Romy Schneider, Brassens, Bourvil et Fernandel, parmi nos si nombreuses célébrités - impossible de toutes les citer -, représente des passeurs d'Histoire. Deux, trois ou même quatre générations, parfois, les ont écoutés, vus chanter ou jouer, les ont aimés sans discontinuer. Ils, elles étaient des "vedettes", des vraies, admirées parce qu'admirables, dont on parle encore en se remémorant, des rires plein la gorge mais, aussi, la larme à l'œil, les chansons, les répliques, les rôles inoubliables.

Car combien, dans la jeune génération, les connaissent ? Et de combien de « stars » adulées, souvent bien béatement, par les jeunes de vingt ans pouvons-nous prononcer les noms ? Johnny est parti, et quand les autres de sa génération le rejoindront, l'arrêt définitif de la transmission sera acté.

Enfin, Johnny le passeur, avec du sang belge coulant dans ses veines mais aussi un peu américain par ses passions musicales, qui vivait tantôt en Suisse, tantôt aux États-Unis mais la moitié de l'année en France, était, finalement, un citoyen du monde. Mais il gardait des liens avec son pays profondément enracinés. La France ? "C'est mon pays, je l'aime. Voilà." Nous aussi, Johnny, bien d'accord avec toi.

À bon entendeur…

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07 décembre 2017 à 11:28

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