Jérémy Cohen : le seul danger, ce n’est pas l’instrumentalisation, c’est l’insécurité

Jérémy Cohen

L’affaire Jérémy Cohen est un scandale.

Parce que s’il n’y avait pas eu ses frères pour frapper inlassablement à toutes les portes, distribuer des flyers aux quatre coins du quartier, le jeune homme serait resté la victime anonyme et inexpliquée d’un accident de tramway ?

Parce que, par voie de conséquence, on peut imaginer que d’autres drames similaires, dans des familles moins pugnaces, ont pu passer sous les écrans radar ?

Parce que la France est devenue un pays si peu sûr que même un trentenaire - porteur d'un léger handicap ayant peut-être suscité les moqueries de ses bourreaux - ne peut s’y promener, le soir, sans danger ?

Parce que si les réseaux sociaux ne s’étaient pas emparés de l’affaire, forçant les grands médias à s’en saisir, personne n’en aurait parlé ?

Non, le scandale est que « certains l'instrumentalisent ». L'habituel chœur médiatico-politique dénonce le « danger de l'instrumentalisation ». Comme si c'était l'instrumentalisation que les Français redoutaient de croiser, le soir, dans une rue sombre.

« On a tous été bouleversés par les scènes qui ont été rendues publiques », a déclaré Emmanuel Macron, rappelant que l’Élysée s’était entretenu avec les parents de la victime dès lundi soir. Mais il rajoute : « Des drames humains, il y en a chaque jour, ils ne doivent pas donner lieu à des manipulations politiques quelles qu’elles soient. » Suivez mon regard. Qu’est-ce à dire, au juste ? Lorsque le père de la victime - comme celui-ci l’a reconnu - a appelé à l’aide Éric Zemmour, celui-ci aurait dû le repousser ? Parce que c’est la présidentielle, il faudrait que les candidats évitent de parler de ces sujets, comme si ce n’était pas précisément le moment ou jamais de montrer sans fard la réalité ?

Ce n’est pas Éric Zemmour qui a instrumentalisé le père de Jérémy Cohen, mais celui-ci qui a vu en Éric Zemmour un instrument de justice, pour que toute la lumière soit faite. Gérald Cohen est d’ailleurs venu remercier de son aide le candidat dans son QG.

Le 4 avril 2017, à Belleville, quelques jours avant l’élection présidentielle qui allait voir s’affronter Emmanuel Macron et Marine Le Pen au second tour, puis finalement consacrer Emmanuel Macron, était sauvagement assassinée Sarah Halimi. Un drame passé sous silence, ou presque, dont le caractère antisémite ne fut reconnu que quelques mois plus tard.

Pour Jérémy Cohen, « l’antisémitisme n’est pas prouvé », précise Maître Gilles-William Goldnadel, mandaté par la famille pour les dysfonctionnements policiers, personne n’étant capable, par exemple, de dire si le jeune homme avait sa kippa au moment des faits. Mais « à tout le moins, le rapport de cause à effet direct entre l’agression et la mort du jeune homme est très clair ». Faudrait-il, en sus, occulter cette agression, par délicatesse, pour ne pas souligner de façon fâcheuse l’échec de ce quinquennat en matière de sécurité ? Sur CNews, le chroniqueur et conseiller en communication Arnauld Champremier-Trigano, proche de EELV, juge que « parler d’un fait divers (sic) à quatre jours d’une élection n’est pas neutre ». Ce qui serait neutre, sans doute, ce serait de ne pas en parler, comme en 2017 pour Sarah Halimi ? Nous prend-il tous collectivement pour des abrutis ?  Si « l’extrême droite » tire parti de ces sujets, ce n’est pas parce qu’elle en parle, mais parce que les autres n’en parlent pas.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

42 commentaires

  1. Le scandale qui va faire tomber Macron. Qui ne sera pas au deuxième tour. Les Français vont dire NON à l’intolérable qui se reproduit TOUS les jours PARTOUT. 1800 agressions par jour en France ! Dont plus d’une centaine au couteau. MACRON DEHORS.

  2. Impossible de savoir si la victime portait une kippa ou si son léger handicap pourrait expliquer les violences….Laissez moi rire ! Dans ces quartiers où tout se sait, où l’on a une certaine lecture du « rapport à l’autre », dans le jugement et le contrôle permanent, maintenant, il faut prendre toutes les précautions possibles et inimaginables pour éviter le « pas d’amalgame ».

  3. On refuse d’admettre que l’antisémitisme que l’on qualifie parfois de nouveau, qui fait des victimes en France , provient exclusivement de la communauté musulmane , par importation des communautés d’origine , et la communauté musulmane croit fortement (natalité, immigration) , donc mécaniquement, le problème va s’amplifier , la France se libanise à bas bruit.

  4. Comme d’habitude dans ce genre d’affaire, et malheureusement ce n’est pas la seule ces dernières années, on veut protéger la communauté dont est originaire la victime, communauté ultra minoritaire en France (moins de 1% de la population) et parfaitement pacifique (pas d’attentat) ; mais on veut en même temps protéger la communauté dont sont originaires les agresseurs , beaucoup plus nombreuse en france (plus de 10% de la population) et violente (attentats).

  5. L’édito de Mme Cluzel est très juste et met en évidence qu’au sommet de l’état on minimalise de tels faits. La réalité est plus proche du Bataclan que du jardin d’Eden.

  6. la seul question que je me pose c’est portait il la kippa ou non !
    il semblerait qu’il l’ai retrouvé au sol , pourquoi n’en parle t’il pas .
    cela dis je suis contre les kippa et voile hors des lieux de culte . ce qui n’excuse en rien ce crime ça va de soit .

  7. L’antisémitisme n’est pas le problème. Le plus grave c’est l’anti-jeunisme et la francophobie qui pourrissent la vie des habitants de nos banlieues. Bobigny est la première ville où on a osé construire cinq « gratte-ciels » avant la guerre. Personne ne s’en souvient plus, mais c’est une banlieue des cités que l’on voyait depuis le square du Chapeau Rouge du quartier Brunet (dans le 19°), avec la tour illuminée de l’Illustration : des gloires d’avant la guerre (de 40) ! J’ai grandi dans ce quartier

  8. Ce qu’il y a de plus dégueulasse (pardon) dans cette histoire sordide du racisme et de la délinquance ordinaire et quotidienne en France, est non seulement le silence assourdissant des médias de gauche, car ça la fout mal en pleine campagne électorale, ni plus ni moins !
    Cerise sur le gâteau, la sortie ignomineuse du mec MacKinsey qui cherche à banaliser !
    Il aura fallu que le papa de Jérémy fasse appel à Zemmour, ce qui dénote dans le tableau du « vivre ensembles » gaucho !

  9. Ça fait des années qu’on dissimule le nom des « jeunes » auteurs de crimes et délits.
    Ça fait des années que les auteurs d’agressions souvent étrangers en situation irrégulières sont soustraits à la justice au prétexte « d’altération de leurs facultés » ou « d’abolition du discernement.
    Ça fait des années que l’on demande au Français de ne pas voir ce qu’ils voient sous peine d’être traités de racistes.
    Zemmour est le seul à avoir VRAIMENT la volonté de mettre fin à cette situation.

  10. Il est scandaleux et contraire au principe d’égalité de considérer qu’un délit ou crime soit plus puni pour des raisons de religion, de race, de physique ou autre. Tous les citoyens, y compris les forces de l’ordre doivent être soumis aux mêmes lois, Cela même si la motivation du coupable est plus ou moins honteuse.

  11. D’accord avec Gabrielle Cluzel sur l’échec de ce quinquennat mais d’accord aussi pour ajouter que parmi les raisons de l’échec de ce quinquennat il y a aussi l’échec de la morale qui ne semble pas atteindre tout le monde de la même manière . Parmi ceux qui tournent le dos à la France , il y en a trop. Et pourtant c’est une valeur qu’on nous enseignait …. autrefois

  12. Je veux juste rappeler le tweet envoyé par Macron en novembre 2020 après l' »agression » de Michel Zecler :
    « Les images st inacceptables; Elles nous font honte. La France ne doit jamais se résoudre à la violence. La France ne doit jamais laisser prospérer la haine ou le racisme » !!

    Prière de fermer les guillemets et la bonne foi

  13. « Des drames humains, il y en a chaque jour, ils ne doivent pas donner lieu à des manipulations politiques quelles qu’elles soient. »

    Voilà, mais cet em*****ur, lui, a le droit de manipuler tout du sanitaire au conflit en Ukraine pour faire pleurer dans les chaumières sur ceux qu’il veut faire passer comme victimes… afin de rester à nous em*****r lorsqu’il en aura envie et se faire un « pognon de dingue » sur notre dos.

    Par contre, avoir de l’empathie pour les vraies victimes, il ne sait pas!

  14. Il faut dire que se promener en Kippa à Bobigny, c’est comme déambuler en nazi à Tel-Aviv.

  15. Merci madame Cluzel de remettre les pendules à l’heure, comme vous le dites si bien, ce n’est pas la récupération qui peut en être faite qui est grave, mais bien le fait que dans notre pays, on ne puisse plus être en sécurité. En outre, on ne peut invoquer le faible nombre de forces de l’ordre lorsque ces dernières étaient capables de sanctionner des promeneurs lors des phases de confinement.

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