Jean-Frédéric Poisson : « Sur les harkis, on peut s’interroger sur la cohérence du Président »

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Lundi 20 septembre dernier, Emmanuel Macron a souhaité demander pardon aux harkis au nom de la France et a promis de porter un projet de loi sur la reconnaissance et la réparation des injustices qui ont été commises à leur encontre. Cette décision semble honorable et nombre de harkis attendaient une action de l’État qui reconnaisse et répare leurs souffrances depuis les funestes événements d'Algérie, il y a bientôt soixante ans. Il était donc nécessaire que l’on impulse un geste à l'égard des familles de ces guerriers qui ont combattu pour la France, des tranchées de Verdun au djebel algérien, et qui ont été méprisées, rejetées, parquées, laissées au ban de la société. Pourtant, si l'action du gouvernement paraît louable, ses intentions le semblent nettement moins.

On peut, en effet, s'interroger sur la cohérence d'Emmanuel Macron quand celui-ci reconnaît le drame des harkis et, en même temps, définit l'action contre le FLN par l'armée française et ses supplétifs algériens de « crime contre l'humanité ». On peut également s'interroger sur la cohérence du Président quand celui-ci insiste sur la responsabilité de la France mais escamote celle du FLN dans le massacre des harkis qui sont restés en Algérie. Si l'on exclut la poignée de militaires et de civils qui les ont aidés, l'attitude des métropolitains à l'égard de ceux qui avaient choisi la France n'est pas reluisante. Mais les massacres perpétrés par les militants algériens ne le sont pas davantage : leurs actions effroyables contre les harkis devraient, en priorité, entraîner notre révolte, notre incompréhension et notre indignation. Pourtant, la cause de ces criminels est justifiée par notre Président, appuyé par son ministre Gérald Darmanin qui n'a pas hésité à aller déposer une gerbe de fleurs sur un monument consacré aux « martyrs » du FLN. Même le journal algérien El Watan reconnaît que ces crimes ont existé et qu'il s'agissait a minima de « bavures ». Emmanuel Macron, lui, prétend reconnaître les crimes dont notre pays serait responsable afin de mieux « réconcilier les mémoires », mais sa vindicte concerne toujours la France, et seulement la France, éternelle coupable du camp progressiste. Il y a donc un paradoxe dans cette démarche : comment peut-on, d'une part, culpabiliser la France pour la guerre d'Algérie en honorant le FLN et, d'autre part, demander pardon aux supplétifs qui ont soutenu notre pays pour ce même épisode ?

En revanche, en termes de stratégie électorale, cette incohérence est aisément compréhensible : elle a le double avantage de récupérer la cause des harkis, populaire sur un bord de l'échiquier politique, et de mettre à nouveau la France à genoux pour plaire à l'autre bord de ce même échiquier. Ce faisant, Emmanuel Macron ménage ses soutiens plus conservateurs et flatte les tenants de l'idéologie woke pour qui notre pays n'en fera jamais assez en termes de repentance. Un « en même temps » qui ne semble pas vouloir lasser Macron mais qui commence à exaspérer les Français. Notre Président est désormais lancé dans une logique électoraliste faite de promesses et de « coups de com' » en vue des échéances de 2022. Ce serait moins grave s'il ne le faisait pas en utilisant l'argent du contribuable. Or, les quelque 300 millions d'euros promis aux familles de harkis ne sont que les derniers nés d'une longue liste de subsides annoncés, ces derniers mois, après la catastrophique gestion de l’épidémie. Où trouve-t-il tout cet argent ? Les multiples promesses financières de notre chef d’État s'accumulent et l'on se demande quelles recettes peuvent contrebalancer ces nouvelles dépenses, au moment où la dette française bondit à 2.762 milliards d'euros.

Mais rien n'y fait, notre Président semble obsédé par l'idée de sa réélection, quitte à ajouter de nouveaux poids sur la lourde charge de repentance qui pèse déjà sur le dos de la France. Il est irresponsable que ce gouvernement reconnaisse symboliquement les torts de la France et, dans le même temps, laisse prospérer le racialisme indigéniste, le communautarisme islamique et le révisionnisme historique autour de la colonisation. En appuyant ces courants par un discours culpabilisateur, Emmanuel Macron accroît les haines et les divisions entre les communautés au lieu de les apaiser. Que la France fasse amende honorable pour les harkis, oui. Mais qu'elle exalte aussi la grandeur de son Histoire et retrouve sa fierté. C'est le seul « en même temps » qui vaille !

Jean-Frédéric Poisson
Jean-Frédéric Poisson
Ancien député des Yvelines, président de VIA - La Voie du Peuple

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