Immigration : Macron pense plus en Européen qu’en Français

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Le discours d'Emmanuel Macron à la cérémonie de naturalisation à la préfecture du Loiret, le 27 juillet 2017, frappe d’abord par sa longueur et son absence de rigueur. Ses conseillers en communication devraient lui recommander plus de sobriété, la concision étant plus persuasive qu’un discours filandreux. Une relecture attentive s’imposerait aussi, quand on en retranscrit le texte sur le site de l’Élysée.

Le Président a souhaité "bienvenue dans la République" à ces nouveaux Français. Auparavant, il avait rencontré des familles de réfugiés dans un centre provisoire d’hébergement géré par une association. Son discours portait donc autant sur l’intégration que sur l’accueil des immigrés.

"L’usage républicain veut qu’en ce moment solennel vous soit rappelé (sic) les droits et devoirs qui vous incombent en tant que citoyen français", a-t-il déclaré en préambule. Et d’ajouter quelques poncifs, qui devraient tenir de l’évidence : "Vous parlez français, vous respectez les lois françaises, vos enfants souvent sont Français et tous les jours vous côtoyez des Français."

Mais, au-delà des droits et des devoirs, ce que la France propose, "c’est une histoire commune" : il se lance dans une métaphore filée où l’on s’emmêle d’abord, où l’on finit par comprendre que la France est un fleuve qui se nourrit de nombreux affluents. "Vous êtes chacune et chacun des affluents qui feront l’Histoire de France de demain, avec vos personnalités, vos propres histoires."

Comme souvent, Emmanuel Macron reste ambigu, il dit une chose et son contraire, sans qu’on sache si ce mélange correspond à une tactique ou à une conviction. Sans doute les deux à la fois. En tout cas, de tels propos révèlent une volonté de favoriser l’intégration des étrangers, mais de rejeter l’assimilation.

Finalement, il fait moins un discours de bienvenue qu’un exposé sur sa vision de la France : c’est un discours politique, voire un discours de propagande.

"Vous devenez aussi par la même (sic) pour ceux qui ne le sont pas déjà, des citoyens européens", ajoute-t-il, montrant bien quelle Europe il voudrait construire. N’aurait-on pas le droit de penser qu’elle est discutable ? Et, bien sûr, en matière d’immigration, "il faut que l'Union européenne maîtrise mieux ses frontières extérieures et réaffirme le principe de solidarité dans la répartition des réfugiés". Dans ce domaine, comme dans d’autres, il pense plus en Européen qu’en Français.

Il ne peut s’empêcher de faire allusion, sans le nommer, aux tentations de repli dont on accuse, de manière récurrente, le Front national pour le discréditer : le grand défi, "c'est précisément de ne pas faire de la France, le pays de la peur de l'autre, du rétrécissement. C'est de perpétuer la grande tradition française d'universalisme." Car la France – la métaphore du fleuve refait surface – "s'est toujours construite par ses affluents multiples qui ont fait le fleuve qu'elle représente".

Il distingue, comme il se doit, les demandeurs d’asile, dont la vie est en danger dans les pays d’où ils viennent, et les réfugiés économiques, qui ne peuvent être tous accueillis. Il ne veut plus, "d’ici la fin de l’année, avoir des femmes et des hommes dans les rues, dans les bois ou perdus". C’est une question de "dignité" et "d’humanité" : on souhaiterait qu’il s’intéressât aussi aux milliers de Français mal logés ou sans abri !

Emmanuel Macron a voulu illustrer "l’intégration tranquille" : c’est plus facile à Orléans qu’à Calais. Il a fait un exercice de communication, réglé dans les moindres détails, allant jusqu’à se faire photographier, un bébé dans les bras. Mais cette communication fait-elle illusion, même auprès de ces étrangers récemment naturalisés ?

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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