Hôpitaux, l’outil est-il adapté à la demande ?
Lors d'une crise, qu'elle soit sanitaire ou autre, on observe généralement une accélération et une stimulation des processus destinés à pallier ses effets afin d’en sortir au plus vite. Sur le plan sanitaire, après une accalmie de l'épidémie, qui pouvait laisser croire qu'elle était enfin arrivée à son terme, les conditions atmosphériques et l'apparition de nouveaux variants (qui ne semblent pas plus dangereux que les autres) ont fait remonter la courbe des contaminations et, à un degré moindre, celle des malades, dont les plus fragiles ont besoin d'être hospitalisés, posant une nouvelle fois le problème de la saturation des hôpitaux publics qui manquent de lits, principale préoccupation des autorités.
Il faut en effet rappeler que depuis 1998, 100.000 lits d'hôpitaux ont été supprimés, dont 5.700 en 2020, ce qui fait dire au syndicat Force ouvrière qu’il est temps que le gouvernement « rompe avec une approche essentiellement financière pour regarder les besoins de la population » (latribune.fr, juin 2021). Il était sans doute nécessaire de faire des restructurations qui impliquent des fermetures de lits car la médecine évolue, les techniques font des progrès, les temps d'hospitalisation diminuent et il faut réorganiser le schéma général en fonction de ces critères. Mais les autorités de tutelle des hôpitaux publics ont, en plus, une fâcheuse tendance à vouloir gérer les établissements de soins à flux tendu, comme n'importe quel établissement industriel, et ne semblent pas décidés à changer de politique.
Cette gestion « technocratique » de l’hôpital ne permet pas de conserver une marge de sécurité (garder des lits vides pour pouvoir éventuellement faire face à une situation de crise coûte de l'argent aux établissements) et les services qui fonctionnent ainsi sur la corde raide doivent, en plus, souvent fermer des lits pour pouvoir donner leurs congés aux employés !
Olivier Véran, ministre de la Santé, estime que si on dépasse 3.000 malades atteints du Covid en réanimation, il faudra songer à faire des déprogrammations, c'est-à-dire reporter les opérations non urgentes, et privilégier l'accueil des patients atteints du Covid dans les services de réanimation au détriment des autres. Propos inquiétants de la part de celui qui, récemment encore, affirmait que la vaccination protégeait efficacement la population, permettant ainsi d’éviter la saturation des hôpitaux et un retour rapide à la normale. La population française s'est vaccinée en masse, mais le vaccin n'est pas aussi efficace que l’espérait le ministre et ne suffira peut-être pas à éviter que les services ne soient à nouveau saturés.
Depuis le début de l'épidémie, une augmentation de salaire pour les professionnels de santé fut actée dans le cadre des accords du Ségur de la santé, mais ce ne fut pas suffisant pour permettre de recruter des soignants et rouvrir des lits d'hôpitaux, souvent fermés par manque de personnel.
Si dans l’avenir, les mutations du virus entraînent l'apparition de variants beaucoup plus pathogènes que ceux que nous avons connus jusque-là, nos hôpitaux seront à nouveau très largement saturés. De l'avis de tous les professionnels, si l'on veut sortir de cette impasse, il faut augmenter le nombre de soignants, médecins et infirmiers, ce qui demandera du temps, et les payer suffisamment pour les attirer vers l’hôpital et ainsi rouvrir des lits. Parallèlement à ces mesures qui ne pourraient prendre effet qu'à moyen terme, il faudrait aussi revaloriser la médecine de ville afin qu'elle prenne en charge une partie des patients qui sont parfois hospitalisés par manque de structure efficace à domicile.
Depuis le début de cette épidémie, les autorités essaient de limiter la demande (confinement, vaccination, etc.) pour l’adapter aux possibilités d’accueil hospitalier, sans résultat probant. Ne faudrait-il pas essayer l’inverse ?
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