Le nouveau numéro d’Éléments est en kiosques. Entretien avec son rédacteur en chef, François Bousquet.

La couverture du dernier numéro d’Éléments est assez offensive : Cyril Hanouna sur un trône dérisoire avec, en bandeau, "Demain, tous con.ne.s ?" Vaste programme, comme disait l’autre…

La connerie n’est plus ce qu’elle était, disait Yvan Audouard. C’était à la fin du XXe siècle. Qu’eût-il dit s’il avait connu la sottise virale des réseaux sociaux ? Ils ont suscité une nouvelle forme de connerie, véritable pandémie mondiale : la connerie 2.0, qui a renvoyé dans le Moyen Âge toutes les formes rustiques d’arriération (on ne saurait mieux dire) mentale. Si vous voulez, la bêtise était réactionnaire. À sa manière, elle participait du riche folklore patrimonial d’une humanité résolument retardataire. La connerie, elle, est progressiste. Formatée, encodée, calibrée, elle accompagne les mutations du capitalisme global. Hier, l’idiot ne quittait pas son village ; aujourd’hui, il fait le tour de la Terre. Connecté au monde entier, il en tire un bonheur sans mélange.

On vous rétorquera qu’on est toujours le con de quelqu’un…

C’est le risque. Ce sont toujours des cons qui accrochent d’autres cons sur leur mur des cons. Le Syndicat de la magistrature nous en a donné un aperçu saisissant. Ce que nous avons voulu montrer dans notre dossier, c’est que la dynamique démocratique des temps modernes, ici aussi, fait son œuvre. C’est la traduction tocquevillienne du processus d’égalisation démocratique : la moyennisation ou la normalisation de la connerie, qui s’apparente à un produit de consommation courante.

Le phénomène alarmant sur lequel vous vous attardez, c’est la baisse du QI dans les pays occidentaux. Quelles en sont les causes ?

Tout augmente : le prix du tabac, les impôts, le gaz de ville. Tout, sauf le QI. Il chute même depuis quinze à vingt ans. C’est nouveau. Tout au long du XXe siècle, il a augmenté : un gain moyen de deux ou trois points par décennie. C’est ce qu’on appelle l’effet Flynn, du nom du scientifique qui l’a découvert. Or, on assiste à l’inversion de la courbe du QI, du moins dans les pays occidentaux. Les Français n’ont-ils pas perdu en moyenne 3,8 points entre 1999 et 2009 ? Les sceptiques feront valoir que ces tests ne sont pas la panacée. Ils ont, d’ailleurs, longtemps fait l’objet de critiques. La moins contestable, c’est leur réductionnisme. La moins avouable, c’est qu’ils mesurent les facultés cognitives de l’homme, un domaine où les inégalités sont légion. Sans faire l'unanimité, ils sont néanmoins aujourd’hui plus communément acceptés, au prix, il est vrai, de non-dits symptomatiques. Depuis quelques mois, il n’est même plus question que de cela. L’occasion, pour les journalistes, de dire encore plus d’âneries – le sujet s’y prête – que d’habitude. Alors, à quoi cette baisse est-elle due ? Bastien O’Danieli, notre spécialiste, passe en revue tous les facteurs, des perturbateurs endocriniens à l’immigration, sans oublier le fait que les femmes à QI plus élevé font moins d’enfants que les femmes à bas QI. Pour couronner le tout, on a interviewé le professeur Richard Lynn, l’homme qui a mesuré la baisse du QI des Français. Ce que nos confrères avaient jusque-là négligé de faire pour la raison que Richard Lynn dit des vérités dérangeantes.

Il y a aussi l’intelligence artificielle…

Le paradoxe, c’est qu’au fur et à mesure que les hommes deviennent de plus en plus paresseux, intellectuellement parlant, les machines deviennent de plus en plus intelligentes. Phénomène des vases communicants. L’homme déchu a choisi par commodité de sous-traiter une part grandissante de son activité cérébrale à des formes d’IA. Là aussi, c’est un cas d’externalisation sans précédent. Ce qui fait de nous des imbéciles, au sens étymologique du terme : imbecillus, littéralement « sans bâton, sans support » autre que la technologie. L’automate de nos automates.

Vous aviez consacré, il y a quelques mois, un numéro aux insoumises, ces femmes qui refusent de se plier à la pensée unique et aux oukases du féminisme. Vous leur ouvrez de nouveau vos colonnes. Pourquoi ? La femme serait-elle l’avenir de l’homme ?

En tout cas, le tombeau des féministes. Je veux parler des deux insoumises que nous avons interviewées : Gabrielle Cluzel, que les lecteurs de Boulevard Voltaire connaissent bien, à qui l’on doit un très mordant Adieu Simone ! Les dernières heures du féminisme, et Ingrid Riocreux, qui a signé un très remarqué La Langue des médias. Destruction du langage et fabrication du consentement. Gabrielle Cluzel s’y montre particulièrement en forme. On a, du reste, mis en exergue une de ses formules digne de Michel Audiard : "L’égalité s’arrête devant l’armoire normande à monter dans l’escalier. Les entreprises de déménageurs sont comme les monuments aux morts, il n’y règne aucune parité." Blague à part, l’opinion publique mondiale semble comme frappée de stupeur par ce flot ininterrompu de « révélations », depuis l’affaire Weinstein, qui nous plongent dans le film de Clouzot, Le Corbeau, entre suspicion et mouchardage, moyennant la fabrication d’un bouc émissaire idéal, le mâle hétérosexuel, si possible blanc – exception faite de Tariq Ramadan - et qui ne nous fera pas oublier que les opérations « Balance ton porc » et « Me too » sont venues à point nommé pour occulter les agressions sexuelles du Nouvel An à Cologne, les affaires de harcèlement à La Chapelle-Pajol et, plus généralement, le statut de la femme dans les sociétés musulmanes. Toujours est-il que les temps ont changé. Ce sont désormais les sorcières féministes qui organisent la chasse aux sorciers sexistes. Réduit au statut de mammifère porcin, serial violeur patenté, harceleur pathologique, tour à tour essentialisé et animalisé, l’homme est une créature en péril face à l’offensive des féministes, toutes chapelles confondues. Il ne fallait pas moins de deux insoumises pour secourir le veuf et l’orphelin.

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20 janvier 2018 à 22:20

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