Union européenne : Macron soutient Merkel dans sa quête d’une coalition avec le SPD, qui ne soutient pas Merkel…

Un article du Point, complaisant vis-à vis d'Emmanuel Macron, tente de lui donner une haute stature, par le procédé courtisan et trompeur du "regard étranger" sur un sujet français. Il s'agit de susciter la vanité du lecteur en lui narrant la supposée admiration par l'étranger. A fortiori celle de l'ex-ennemi héréditaire (devenu principal concurrent) ; dans ce que, pour masquer notre goût morbide de la servitude volontaire, on a baptisé "couple franco-allemand". De la venue d'Angela Merkel à Paris ce 19 janvier pour célébrer le 55e anniversaire du traité de l’Élysée, le journaliste n'a vu que l'hommage rendu au junior de l’Élysée, alias "Jupiter capitolin", par le ministre Sigmar Gabriel proche et/ou rival de Martin Schulz dans son SPD d'extrémistes, "eurolâtres" et "populicides".

Que dit ce sieur Gabriel ? Qu'"avec cet Européen convaincu qu'est Emmanuel Macron, nous avons une chance historique pour faire progresser le projet européen, et notamment renforcer la zone euro". Et donc principalement avancer "dans la réforme de l'Union économique et monétaire", au sujet de laquelle Emmanuel Macron a fait plusieurs propositions concrètes : création d'un budget propre à la zone euro, d'un ministre des Finances, d'un Parlement.

Qu'il faut progresser "également lorsqu'il s'agit de rendre l'Europe plus stable et plus juste" (qui est démagogue ? Et qui sera dupe ?). Pour Le Point, "les compliments du chef de la diplomatie à l'adresse du chef de l’État français sonnent aussi [...] comme une critique de la chancelière [...] pour la timidité de ses réponses aux propositions d'Emmanuel Macron sur les réformes européennes". "En matière d'initiatives politiques sur l'Europe, la France mène actuellement 10 à 0, nous ne devrions pas laisser le score en l'état", regrette Gabriel (presse allemande).

Merkel a réaffirmé cette semaine à Berlin son soutien de principe à un budget commun pour des investissements en zone euro (il y a déjà beaucoup de fonds structurels), mais d'une "ampleur limitée", mais a aussi redit le scepticisme de son parti sur le projet de ministre des Finances pour la zone. Pour ce grand écart politique, Merkel, usée par des années de compromis, n'a plus la marge suffisante : son opinion publique, en plein doute, la met sous pression sur les sujets majeurs de l'immigration, de la souveraineté nationale, voire de la dégradation de la situation sociale.

Macron, lui, veut une Europe à plusieurs vitesses pour ne pas freiner les pays qui souhaitent aller de l'avant dans les réformes et l'intégration (théorie du "premier de cordée" ; suivez son regard). Mais Gabriel, dont la survie politique n'est pas avérée, conteste : "L'Allemagne et la France doivent, ensemble, préserver la cohésion de l'Union européenne au lieu d'aggraver les divisions" (AFP) en rejetant l'idée d'une Europe de "première et de deuxième classe".

Le plus important est oublié : lundi sera signée une déclaration commune visant à conforter le "couple franco-allemand", mais la date est mal choisie car, dimanche, aura lieu un vote crucial pour l'avenir politique de Merkel : le SPD réuni en congrès dira s'il accepte de faire alliance ou pas avec les conservateurs, avec ou sans Merkel en fin de course, sans gouvernement depuis septembre.

Dans son style ampoulé, Macron appuie : "L'ambition que nous portons, elle ne peut advenir seule. Et je l'ai déjà dit, elle a besoin de se conjuguer avec l'ambition allemande. C'est ce à quoi nous œuvrons. J'ai noté que le SPD avait une forte ambition européenne, également, et que le texte de pré-accord qui sera soumis dimanche porte une véritable ambition européenne."

Le tout à des années-lumière de l'angoisse et de la colère des Français.

Henri Temple
Henri Temple
Essayiste, chroniqueur, ex-Professeur de droit économique, expert international

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