Un grand plan internat ? Oui. Mais c’est tout l’enseignement qu’il faut reconstruire !

En déplacement dans le Cantal, le jeudi 29 mars, Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale, et Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires, ont lancé la mission en charge du « grand plan internat ». Cette mission devra rendre ses conclusions et ses propositions pour la rentrée 2018.

Il s’agit de développer des offres d’internat, notamment dans les zones rurales. Selon un communiqué publié sur le site du ministère, "ces internats liberté se distinguent d'un internat ordinaire par les conditions d'accueil optimisées, et un environnement éducatif, sportif, artistique et culturel proposé aux internes, riche et varié". Passons sur la dénomination d’« internat liberté », qui cède à la démagogie ambiante.

Ce ne sont pas vraiment des « internats d’excellence », voulus par Nicolas Sarkozy en 2009, devenus « internats de la réussite » (c’est fou comme l’excellence fait peur !), qui étaient destinés aux élèves méritants issus de milieux défavorisés : jugés trop coûteux et ségrégatifs, on leur reproche de priver les collèges d’éducation prioritaire de leurs bons élèves. Mais que fait-on pour garder les bons élèves dans ces établissements ?

Les internats, qui eurent leur heure de gloire au XIXe siècle et dans la première moitié du XXe, ont progressivement été abandonnés au profit du « ramassage » scolaire : ils étaient devenus, paraît-il, synonymes d’« enfermement ». Il a fallu des années pour qu’on se rendît compte qu’on s’était trompé. Mieux vaut tard que jamais, même si ce projet vise aussi, manifestement, à montrer que le gouvernement n’oublie pas les zones rurales.

Pour Jean-Michel Blanquer, ces nouveaux internats sont aussi "une façon de lutter contre les inégalités sociales". Il a raison et il faut saluer cette initiative. Mais le développement ou la modernisation d’internats ne suffira pas à relever le niveau général des établissements scolaires.

Souligner des réussites pédagogiques n’efface guère la médiocrité de l’ensemble du système, accentuée par la politique démagogique des ministres précédents. De droite et de gauche : car si Najat Vallaud-Belkacem a attiré toutes les critiques par ses excès, ses prédécesseurs n’ont jamais écarté les théories fumeuses des Mérieu, Dubet et consorts, en dépit du constat de leur échec.

Si l’on veut améliorer le niveau de l’enseignement, il faut s’attaquer aux causes de son déclin et prôner des principes clairs : la distinction entre l’égalité des chances, légitime, et l’égalité des résultats, démagogique ; la reconnaissance de l’effort et du mérite ; l’élaboration de programmes visant d’abord à l’acquisition des méthodes et des savoirs indispensables pour penser par soi-même et forger son avenir ; le rétablissement de l’autorité ; la recherche de l’excellence ; la suppression des ESPE, écoles d’uniformisation et d’infantilisation des maîtres, et leur remplacement par un compagnonnage de professeurs expérimentés.

Tout ce qui fait que de plus en plus de familles inscrivent leurs enfants dans des établissements sous contrat ou hors contrat.

Revitaliser les internats n’est qu’un retour au bon sens. Mais si l’enseignement public veut être concurrentiel, s’il veut élever les élèves et non pas satisfaire aux lubies de démagogues en mal d’égalitarisme et de pédagogues autoproclamés, il doit rompre avec toutes les mauvaises habitudes qu’il a accumulées pendant des décennies.

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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