Elle flingue à tout va : Anémone, adorable vieille dame indigne…
Plus touchantes que les jeunes péronnelles, il y a les vieilles chipies. Les premières peuvent encore s’améliorer ; les secondes sont perdues pour la cause, ce qui ajoute aussi à leur charme. L’actrice Anémone est indépassable dans cette catégorie. Elle n’aime rien ni personne et, globalement, tout l’emmerde.
En 1988, elle reçoit des mains de Sabine Azéma le César de la meilleure actrice pour sa prestation dans Le Grande Chemin, de Jean-Loup Hubert. Elle grimpe sur scène en courant, exhibe un croquis d’un de ses copains stylistes, crie à Richard Anconina qu’elle l’aime – il ne joue pourtant pas dans le film ! – et se carapate en abandonnant la précieuse statuette, sans même un mot pour cette œuvre pourtant trois fois citée et qui vaudra un César du meilleur acteur à Richard Bohringer. "Voilà qui n’est pas banal", se contente de lâcher un Michel Drucker un brin déstabilisé. Ça, c’est Anémone, la fille qui n’en a rien à foutre de rien. Et ça ne s’arrange pas avec l’âge.
Début décembre, elle assure aux journalistes du Monde : "Je veux renouer avec la vie de légume que j’affectionne." À ceux du Parisien, elle explique pourquoi elle ne veut plus entendre parler de cinéma et de show-biz : "Ça fait trop chier. Ce n’est pas le boulot que j’avais choisi. Le fric s’est emparé de tout, partout ! Quand j’ai commencé dans les années 80, ça allait encore. Là, c’est insupportable."
Militante écologique historique, elle constate : "On s’est fait traiter de tous les noms quand on était écolos de la première heure, quand on disait qu’il fallait se bouger. Aujourd’hui, quand je dis que c’est trop tard, on ne me croit toujours pas. C’est une souffrance assez intense. […] Ça va aller de pire en pire. Il n’y a plus d’eau, les sols crèvent, on va sûrement avoir des épidémies, des famines, une guerre nucléaire." Et optimiste, avec ça.
D’ailleurs, elle ne vote plus. Éphémère soutien de Jean-Luc Mélenchon, elle le tient désormais pour "vieux stalinien" et "vieux politicard". François Mitterrand ? "Mitterrand, de gauche, et puis quoi encore ?", un "camembert pourri" ! Jean d’Ormesson ? "Pourquoi pas des funérailles nationales à Marc Lévy ?" Johnny Hallyday ? "Un pantin médiatique.". Ma Dalton, à côté, c’est Dorothée.
Avant de devenir cette hippie ayant viré punk, Anne Bourguignon (de son vrai nom) est issue d’une bonne famille de la haute bourgeoisie, ce qui est encore plus rigolo. Ses vacances, elle les passe dans le château familial, le château Mauras. Même à un « r » près, ça ne s’invente pas. À croire que son personnage de Thérèse, dans Le père Noël est une ordure, de Jean-Marie Poiré, en godiche coincée et Marie-Chantal de sacristie, n’est donc pas tout à fait un rôle de composition.
D’ailleurs, c’est qu’elle en aura aligné, des rôles de foutraques, en plusieurs dizaines de films, près d’une trentaine de pièces et de séries télévisées. Artiste passablement allumée qui se fait culbuter par Christian Clavier dans l’injustement oublié Je vais craquer, de François Leterrier, et adapté d’une bande dessinée du regretté Gérard Lauzier. Beatnick mystique totalement azimutée, qui viole encore Christian Clavier dans l’inénarrable Les Babas Cool, de François Leterrier, toujours. Et même dans ses rôles plus sérieux, elle ne parvient pas à l’être tout à fait. Une nature, on vous dit.
Quant à ses projets immédiats, c’est en ces termes qu’elle les résume aux journalistes du Parisien : "Retourner au Portugal. J’ai toujours adoré ne rien foutre." "Joyeux Noël, Félix !" avec coup de fer à repasser en pleine face, donc, pour reprendre une scène cultissime du Père Noël est une ordure. Venant d’une telle adorable vieille peau, ça sonnerait presque comme un mot doux.
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