Empêchée de courir ? Sandrine Rousseau refait l’Histoire comme Maître Gims

SANDRINE ROUSSEAU 3

Sandrine Rousseau est « très en colère » contre les équipes de France 2. C’est ce qu’elle vient de déclarer au micro d’Europe 1. Jeudi 13 avril, le magazine « Complément d’enquête » a diffusé un reportage qui lui était consacré. Et la petite séquence qui met en scène son père l’a spécialement énervée. Le vieil homme est questionné sur l’enfance de sa fille, l’éducation qu’elle a reçue : « On commence un portrait avec l’avis d’un papa qui doit faire une espèce d’autocritique de l’éducation qu’il m’aurait donnée. Comme si le combat que je mène pour l’égalité femmes-hommes serait un combat qui trouverait sa source dans la relation avec mon père. On ne fait pas ça aux hommes » : en 2023, on en est encore « à faire des portraits de femmes politiques où on interroge leur papa pour savoir qui sont ces femmes », rajoute-t-elle, furieuse, fustigeant un « portrait [qui] porte essentiellement sur le caractère et non pas sur le combat politique [qu’elle] mène ». 

« On ne fait pas ça aux hommes », dit-elle ? Bien sûr que si. Quand Viviane Le Maire, la mère de Bruno, révélait en 2016 que celui que l’on appelait « Brin-de-Sauce » ou « Cadichon » (!) « faisait beaucoup rire la famille », « était un élève dans la norme » et avait un « côté un peu entêté et quelquefois un peu professoral dans la façon dont il [parlait] », ce n’était pas du combat politique mené par son fils qu'il était question. Et lorsque la même évoque la « communication bloquée » entre Bruno Le Maire et son père, il n'y a pas d'allusion misogyne à un Œdipe mal résolu. Et au passage, s'il est une femme politique sans cesse renvoyée à son père, ce n'est pas Sandrine Rousseau mais Marine Le Pen. La première, qui porte pourtant sa sororité en bandoulière, s’est-elle seulement émue une fois de cette injustice sexiste faite à la deuxième ?

Ce qui agace Sandrine Rousseau, on le comprend en filigrane, c’est surtout le décalage narratif entre son père - ancien élu de gauche « vieille école », il a été maire socialiste de Nieul-sur-Mer, près de La Rochelle, durant huit ans - et elle. Si le père n’a pas eu l’impression d’avoir traité différemment sa fille de son fils - « On a tout fait pour que ce ne soit pas le cas » -, Sandrine Rousseau, elle, affirme avoir « subi des injonctions » spécifiques parce qu’elle était une fille : contrairement à son frère, à ses cousins, elle n’avait « pas le droit de courir », « pas le droit de dire des gros mots ».

Mais dans quel pays vivait donc Sandrine Rousseau ? Pas la France des années 80, en tout cas. Les gros mots heurtaient toujours les parents, de quelque bouche qu’ils soient sortis, et si les propos grossiers détonnaient et étonnaient quand ils étaient proférés par une fillette, c’était en raison de la propension naturelle des petits garçons à se montrer plus scabreux. Curieusement, d'ailleurs, plutôt que de voir dans cette appétence pour la scatologie une manifestation de l’immaturité masculine, les collègues de Sandrine Rousseau à la NUPES n’ont rien eu de plus pressé que rejoindre les hommes sur ce terrain sémantique. Comme si cela pouvait être une conquête féministe. Confer les saillies remarquées de Raquel Garrido pendant la dernière campagne électorale. 

Quant aux filles empêchées de courir, on se gratte la tête : Sandrine Rousseau a-t-elle eu les pieds bandés ? Un kimono qui lui entravait les jambes et la forçait à avancer à petits pas ? Des aiguilles dans le chignon ? N’a-t-elle pas, surtout, un peu trop lu Pearl Buck, encore très en vogue chez les adolescentes des années 80 ? Bref, ne fait-elle pas son Maître Gims en réécrivant l’Histoire ? À moins que paradoxalement, à droite de l’échiquier, l’éducation des fillettes ait été à l'époque beaucoup moins genrée… comme le commente sur Twitter une internaute : « Enfance tradi catho pour moi : je courais et jouais aux petites voitures avec mes frères, je portais des robes car j’aimais ça (contrairement à ma sœur qui n’en portait pas). Je tondais le gazon, les garçons mettaient la table et débarrassaient, comme les filles… »

La confrontation entre Sandrine Rousseau et son père, presque touchante, est emblématique de celle de deux gauches : l’une a accouché de l’autre. La première, à présent, doute et s'écrase face à cette enfant terrible qui la jauge et la juge. Une sorte d’allégorie du livre du journaliste Renaud Dély, Anatomie d’une trahison.

Déconstruire les hommes... jusqu'à son propre père ?

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

29 commentaires

  1. Sandrine Rousseau vue par son papa, :qu’en dire ,si ce n’est que tout papa est très indulgent avec sa progéniture et que le papa de Sandrine ne fait pas exception à la règle, bien au contraire.

  2. Les chiens ne font pas des chats (ou des chattes). Il faut comprendre Que SR a reçu une très mauvaise éducation et on en voit le résultat, quelles que soient ses déclarations.

  3. A-t-on oublié que l’aversion de José Bové pour les OGM tenait au fait (paraît il) que son père était généticien à l’INRA

  4. La pauvre ! Je pense que cela devait être terrible de vivre avec ce papa maire socialiste de Nieul sur mer . Ce devait être un vrai calvaire de vivre dans un tel contexte ! La pauvre petite fille bourgeoise de gauche par excellence qui s’ennuyait parce qu’elle ne pouvait courir et a du cogiter pendant tout cette enfance passée en Charente Maritime ,à élaborer une façon de se démarquer de son patriarche de père ! Je la sens encore toute traumatisée de cette expérience !

  5. Sardine Ruisseau (nom emprunté à une humoriste), euh pardon, Sandrine Rousseau lutterait pour l’égalité hommes -femmes. Mais quels hommes aimeraient être les égaux de Sandrine, et surtout dans quels domaines ? Je serais curieux de le savoir. A mon avis, cessons de parler d’elle une bonne fois pour toutes et laissons-la alimenter ce qui, finalement, n’est qu’une sorte de bruit de fond simplement désagréable.

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