[EDITO] Après les masques, les phryges : La France ne sait pas faire (non plus), dixit Olivier Véran

olivier véran

Les « phryges », ces mascottes françaises des Jeux olympiques de Paris, n’en finissent plus de faire parler d’elles. D’abord parce qu’elles sont laides. Ensuite, parce qu’elles sont fabriquées, pour leur quasi-totalité, comme l’a expliqué hier notre ami Nicolas Gauthier, en Chine. Las, a dû avouer, ce jeudi, Olivier Véran, sur France 2 : « Fabriquer deux millions de mascottes en quelques mois, on ne sait pas faire. » C’est un « problème structurel, explique-t-il, lié au fait que la France a perdu ses usines pendants des années ». « J’adorerais » rajoute-t-il dans un soupir… et on se bat pour ça, qu’en France, on soit capable d’avoir suffisamment de matières premières et d’usines textiles pour fabriquer deux millions de peluches en quelques mois, le constat c’est qu’aujourd’hui, on ne sait pas faire. » Avant, la France exportait le beau, aujourd'hui, elle importe le moche.

Olivier Véran use d’une vieille ficelle qui a pu fonctionner pour une épidémie brutale - il a fallu, vous comprenez, se procurer en urgence des millions de masques - mais qui est beaucoup moins convaincante pour des Jeux olympiques fixés depuis 2017 : quelques mois… c’est une façon de voir. Mais l’unité de comptage la plus adaptée en la circonstance est surtout l’année. À ce niveau de mauvaise foi, pourquoi ne pas parler, non plus, de « quelques jours » ? En cinq ans, il y avait quand même moyen d’anticiper ? Ce n'est plus de bonnet phrygien qu'il est question, mais de bonnet d'âne.

« La crise sanitaire aura mis en évidence la dépendance à l’égard de la Chine pour ce qui est des masques, mais ici, l’arbre ne saurait cacher la forêt d’une dépendance qui touche la plupart des secteurs industriels », mettait en garde, en avril dernier, dans La Croix, l’économiste Gabriel Colletis, auteur de L’Urgence industrielle ! : « Biens de consommation des ménages, informatique, appareils électriques, etc. En 2018, la France exportait pour 20 milliards d’euros vers la Chine et importait pour 50 milliards, soit un déficit de 30 milliards d’euros équivalent à la moitié du déficit commercial de la France. »

Que le détricotage du tissu industriel français ne soit pas le fait du seul récent gouvernement est une certitude. Mais depuis que la crise sanitaire a servi de révélateur à ce tragique champ de ruine, qu’a-t-il entrepris ?

On ne sait pas fabriquer les phryges, donc, mais « par contre, ce qu’on sait faire, c’est pousser les entreprises françaises qui travaillent en Chine à relocaliser en France », a complété Olivier Véran, sans doute pour finir sur une note optimiste. Il faisait sans doute allusion à une relocalisation récente « partielle » de la production des stylos Waterman™ de la Chine vers la région nantaise (investissement de 1,3 million d’euros) ou encore de la décision prise par Bénédicta™ de s’approvisionner en France pour ses œufs et pour son huile de colza (investissement d'un million d’euros). Mais au-delà cet affichage anecdotique, qui peut prétendre qu'il y ait un mouvement de fond ? Et comment le conjuguerait-on avec les injonctions de sobriété énergétique ? Si l’on doit coudre les phryges à la main et à la lueur de la chandelle, ce n’est plus en mois ni en années qu’il va falloir compter, mais en décennies.

Au vu de ce désastre, réindustrialiser devrait faire l’objet d’un plan Marshall, être LE grand chantier de ce mandat. Pensez-vous ! Interrogée par Libération, ces jours derniers, sur la priorité de ce quinquennat, la députée et porte-parole Maud Bregeon - une ex-ingénieure d’EDF  qui n'est pourtant pas la plus hors-sol ni la plus antipathique du lot, elle s’était engagée courageusement pour le nucléaire quand ce n’était pas encore dans l’air du temps, à contre-courant de son mouvement - répond sans hésiter : « Notre priorité est d’éviter que Le Pen soit à l’Élysée dans quatre ans et demi » (sic). Et ça, donc, c’est un projet de gouvernement ? Le grand déclassement, visiblement, peut encore attendre.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

50 commentaires

  1. Comment peut-on écouter ce personnage qui a, par son interdiction de la quinine, provoqué des milliers de mort ! Un seul mot d’ordre : BOYCOTT

  2. La France c’est faire et l’a prouvé , ce sont eux qui nous volent notre savoir faire au nom de la mondialisation .Ce sont eux qui ont délocalisé nos usines à leur profit et aux profits de ces vautours d’actionnaires qui n’en ont jamais assez .

  3. « on ne sait pas faire » mais que savent-ils faire ces incapables à part mentir et mentir!!!! ce n’est pas le temps qui leur a manqué pour choisir une effigie, et donner du travail à une entreprise française, non comme d’habitude aucune concertation ,et pourquoi se prendre la tête , les chinois savent tout faire en un temps record et puis après tout, qui payent …les contribuables bien sur.

  4. Si la priorité du gouvernement est « d’éviter que Marine Le Pen soit à l’Elysée dans quatre ans et demi » je comprends dès lors pourquoi le « président candidat » n’a pas fait campagne, mais n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi il a été réélu. Par contre en écoutant comment se nomme cette dame ancienne ingénieur chez EDF, je comprends mieux que cette ancienne grande entreprise se soit laissée berner par le fossoyeur du nucléaire. La France n’a plus d’élite mais des communicants imbus de leur personne qui se permettent de critiquer ceux qui persistent à ne pas vouloir que leur pays, la France, disparaisse.

  5. Je suis très partagée entre le soulagement que la France ne produise pas ces hideuses mascottes et la déception de voir que l’on est encore et toujours dépendants de la Chine . Je ne sais plus quoi penser ….

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois