Douce France : sur les pas de Goethe en Alsace
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C’est à un pèlerinage sentimental, en cette douce France des bords du Rhin au nord de Strasbourg, que vous convie cette bucolique escapade à Sessenheim – ne pas confondre avec Fessenheim -, sur les pas de Goethe en Alsace, où le poète allait connaître sa première grande histoire d’amour.
Petit rappel historique : par un beau jour d’avril de l’an 1770, le jeune Goethe arrive à l’université de Strasbourg "pour voir comment vivent les Français et étudier cette langue". Mais notre étudiant, Erasmus avant la lettre, parcourt plus volontiers la campagne alsacienne lors de "folles chevauchées" le long du Rhin, à travers champs, forêts et vergers, où le jeune Goethe rencontre la fille du pasteur de Sessenheim, Frédérique Brion, dont il tombe éperdument amoureux : "Élancée et légère, elle marchait comme si elle n’avait rien eu à porter, et son cou paraissait presque trop faible pour les grosses tresses blondes de sa tête charmante."
Frédérique la belle Alsacienne, Goethe en fit la muse de ses premiers poèmes, dont le célébrissime Heidenröslein, la petite rose rouge de la lande alsacienne, mise en musique par Franz Schubert... Durant les promenades autour de Sessenheim qu’il fit avec sa bien-aimée, Goethe eut tout le loisir d’admirer "la grâce de ses manières qui semblait rivaliser avec la terre fleurie et l’inaltérable sérénité de son visage avec le ciel bleu". Wolfgang Goethe est un homme comblé, comme un coq en pâte en cette « Douce France » des bords du Rhin, heureux « wie Gott in Frankreich » (comme Dieu en France). Son amour pour "la plus charmante étoile de ce ciel campagnard" se conjugue avec le ravissement que lui procure la nature alsacienne, "vêtement vivant de la divinité".
Mais le charme campagnard de la jeune fille finira par lasser notre séducteur... Allait-il renoncer à sa carrière et s’enterrer à Sessenheim ? Et lorsque la bise fut venue, notre amoureux transi décida de mettre un terme à leur relation. "Les adieux m’étreignent le cœur, dans tes baisers, quelle volupté ! Dans ton regard, quelle douleur ! Et pourtant quel bonheur d’être aimé ! Et aimer, ô Dieux, quel bonheur !"
Frédérique ne s’en remettra jamais et l’attendra toute sa vie. Sur sa tombe, elle fera graver, en sa mémoire, qu’un "rayon de soleil du poète tomba sur elle, si riche qu'il lui conféra l'immortalité".
Il faut aller à Sessenheim, sur le sentier Goethe, relire Dichtung und Wahrheit (Poésie et Vérité), s’arrêter devant la grange du presbytère protestant, prendre la route de la forêt et du chêne des adieux et, au retour, visiter le musée des amours de Goethe et de Frédérique…
Ignorée en France, quasiment connue de tout le monde en Allemagne, l’idylle de Frédérique avec Goethe est au moins aussi romantique que celle de Roméo et Juliette… Seulement voilà, l’Alsace n’a jamais su se vendre : la pizza italienne a supplanté la tarte flambée alsacienne et les amants de Vérone ont éclipsé la saga des amoureux de Sessenheim… Ou est-ce son caractère trop « germanique » qui lui vaut de n’avoir jamais été mise en valeur par nos franchouillardes autorités politico-culturelles alsaciennes ?
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