De Houellebecq à Zemmour, les très gros sabots de France Inter
Ce matin 28 octobre, Thomas Legrand est en grande forme. Sa petite leçon de politique en trois points atteint un sommet du genre. La première partie s’appuie sur des faits incontestables. Le journaliste sait y faire, depuis le temps, il prend son élan de loin. De ce ton assuré et badin inimitable, il parle de Houellebecq dont le prochain roman portera sur l’industrie, a annoncé le ministre des Finances Bruno Le Maire, ami du romancier. « Houellebecq est celui qui saisit le mieux les courants de la société française », explique un Legrand conquis par La Carte et le Territoire, plongée dans « cette France morcellée, disneylandisée, rondpointisée ». La méfiance de l’auditeur ronronne doucement. Et pourtant, vous le voyez venir. Il va arriver à Zemmour, quelque chose vous le dit à l’oreille. Et ça va chauffer.
« De là à faire [de Houellebecq, NDLR] le chantre des tendances de la société », explique en guise de transition notre chroniqueur, il y a un pas. Les gentillesses ont pris fin. Car « un autre roman publié en 2015 donne plutôt (sic) le sentiment inverse, comme quoi on peut être bon pour décrire le présent et mauvais pour prévoir l’avenir ». Tiens ! Dans le viseur, Soumission, du même Houellebecq. On y arrive… Dans ce livre, « les élus se couchent devant un islam intello qui met les intellectuels tous idiots utiles au pas », explique Thomas Legrand. Exact. À tel point qu’un Président est élu sur un programme de charia douce. On y croise « des médias bien-pensants prompts à l’autocensure, prêts à cacher une émeute de jeunes à Paris. En gros, l’exact inverse de la réalité sociale, politique et médiatique », rassure Thomas Legrand. S'il vous le dit ! Pour lui, ladite émeute bénéficierait d’une « sur-couverture (médiatique) obsessionnelle ». Oui, oui. Et personne ne viendrait dire qu’on en parle trop, comme on l'entend pour les émeutes de banlieues, pour Le Pen, pour Zemmour ou pour l’insécurité - liste non exhaustive.
L’islam n’a pas atteint les élites, explique encore Legrand. Certes, mais nos élites sont très bienveillantes à l’égard de l’islam : le nombre des mosquées autorisées en France en témoigne.
À ce stade, le confrère chroniqueur retire ses souliers de ville et enfile ses gros sabots. Surprise ! « Houellebecq nous intéresse car il fait écho à Zemmour. »
Enfin, on y est ! Le futur candidat qui dérange la Macronie tranquille va dérouiller. Zemmour « n’est pas romancier » et « n’est plus journaliste » - il n'est rien, en somme -, mais ce rien « décrit une France apocalyptique ». Alors que, pour les Français, tout est rose, on est d’accord. On vit si agréablement en France, près des émeutes d’Alençon, au procès du Bataclan ou à celui de Mireille Knoll, pour rester dans l’actualité du jour. Mais tout cela, c’est la faute à Zemmour. Il est lancé, l’ami Thomas. Notre chantre du vivre ensemble a jeté à la rivière toute distance, il en oublie ses confrères journalistes. « D’ailleurs, les chaînes de radio et de télévision qui servent (à Zemmour) de chaise à porteur et mégaphone se débarrassent de leurs reporters, c’est-à-dire de ceux qui ont pour métier de voir la réalité de la société, pour les remplacer par des polémistes pour qui la réalité est une opinion comme une autre. » Il y a donc des sous-journalistes employés par Bolloré à porter en triomphe Éric Zemmour : pas sympa pour les centaines de cartes de presse de Canal+, CNews, C8, Europe 1, Capital, Femme actuelle et dans les autres titres de Prisma Presse, tous propriété du groupe Bolloré. Ils sont priés de baiser respectueusement l’anneau du chroniqueur payé sur leurs impôts pour les traiter de clowns utiles à la fabrication de « spectacles rentables ». « Houellebecq fait de sa peur panique du monde tel qu’il va de bons romans, les chaînes bollorisées font un spectacle rentable, Zemmour un programme politique. » Et Legrand une chronique politique tout en nuances.
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