Comme prévu, l’Algérie a promené Élisabeth Borne et quinze ministres français…

borne

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune peut se frotter les mains. La délégation française a fait demi-tour, ce lundi 10 octobre, après deux jours passés à Alger. Deux jours qui ne resteront pas dans les annales des démonstrations de puissance de notre pays. La France, sixième puissance mondiale, s’est rarement fait à ce point promener par un pays étranger, dont le PIB atteint 3.765 dollars par habitant en 2021, essentiellement grâce à ses ressources en matières premières, contre 43.500 dollars de PIB par habitant pour la France….

On s'y attendait. Le pouvoir algérien aura pu jouir, sans bourse délier, du spectacle des courbettes réalisées sans honte par l’ancienne puissance coloniale. La France avait mobilisé le ban et l’arrière-ban. Pas moins de quinze ministres ont traversé la Méditerranée. Sur place, Élisabeth Borne a déposé, comme prévu, une gerbe au monument des Martyrs, haut lieu de la mémoire algérienne de la guerre d'indépendance menée contre la France et ses soldats d'active ou en cours de service militaire. Soit une gerbe aux anciens ennemis du pays…

Tout cela pour… rien ou pas grand-chose. Le gouvernement algérien pourra se vanter d’avoir fait venir la moitié du gouvernement français et de l’avoir bercé des flûtes de l’amitié. Pas un accord concret, ni sur le gaz, ni sur les visas, ni sur les retours des migrants illégaux expulsés de France - les dossiers brûlants actuels. Pas un mot officiel sur la densité d’Algériens dans nos prisons et devant nos tribunaux. Le président algérien a gentiment promené ses visiteurs. « Il y a des discussions qui se poursuivent dans des domaines où nous n’avons pas encore signé d’accords », susurre-t-il, la bouche en cœur.

La visite a tourné à la foire aux protocoles : les ministres français présents sur place en ont signé pas moins de douze, truffés de belles phrases, de grandes déclarations d’amitiés et d’intentions naïves qui n’engagent à rien.

De son côté, le Premier ministre algérien Aïmene Benabderrahmane est allé droit au but : « Bienvenue aux investisseurs français en Algérie. » Les deux gouvernements ont d’ailleurs mis sur pied un forum d’affaires franco-algérien. Autrement dit, bienvenue à l’argent français ! Message reçu cinq sur cinq par Élisabeth Borne : « L'Algérie est engagée dans une ambitieuse diversification de son économie. Les entreprises françaises sont prêtes à participer à ce mouvement, à contribuer à l'amplifier », caresse le Premier ministre. C’est une nouvelle période, une nouvelle page, une nouvelle relation qui s’ouvre, explique le pouvoir. Jouez, flûtes du désert, chantez coucous ! La France ronronne de bonheur et ferme les yeux : l’Algérie, elle, se frotte les mains. L'Hexagone est déjà le deuxième investisseur en Algérie, selon le FMI. 500 entreprises françaises emploient là-bas 40.000 salariés. Tout cela ne semble pas engager les autorités algériennes à la reconnaissance vis-à-vis de la France, loin s’en faut.

Le gaz ? Un contrat mirifique vient d’être noué avec l’Italie. L’Espagne s’approvisionne largement en Algérie. La France, elle, est revenue bredouille. L’immigration illégale ? Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin en a, paraît-il, longuement discuté avec son homologue algérien. Les discussions se prolongent. C’est drôle, on a comme un doute sur leur issue… Les fameuses OQTF (obligations de quitter le territoire français) des citoyens algériens venus chez nous d’un bel élan de générosité mais en toute illégalité ? Darmanin aurait évoqué le sujet, discrètement, en tête à tête. En attendant, Paris fait semblant de serrer les visas, ce dont les immigrés clandestins n’ont cure. Pour Alger, la France reste une sympathique vache à lait qu’on rémunère au mieux de belles promesses et au pire d’un seau d’injures.

On allait oublier la commission d’historiens désignés par les deux pays pour apaiser le climat : sur ce point, la France est proche d’un accord. On craint le pire… La France a bien fait de mobiliser la moitié du gouvernement et pas mal de kérosène au moment où les Français faisaient la queue à la pompe. Évoquant ce voyage en Algérie, Élisabeth Borne a fait part de sa satisfaction : « J'ai le sentiment que, ensemble, nous avons avancé », s'est réjoui le Premier ministre.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 12/10/2022 à 22:04.
Marc Baudriller
Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

51 commentaires

  1. Le souhait des Algériens d’être indépendants peut se comprendre, elle même, la France n’a pas apprécié de vivre sous le joug Allemand en 1940.
    Cela étant, je ne vois pas pourquoi la France, depuis 1962, s’évertue à maintenir des liens avec ce pays, qui de toute vraisemblance se joue d’elle……
    Ancien appelé d’Algérie, j’ai constaté une énorme différence de mentalité entre la population Européenne qui à l’époque habitait ce pays, et nous, Français de métropole….
    Un amalgame a été fait, malheureusement il perdure encore à ce jour.
    Le destin de L’Algérie lui appartient…..

    • Ne comparez pas la France en Algérie et l’occupation allemande de 1940. La France a développé l’Algérie , l’Allemagne nous a fait crever de faim.

  2. Imaginons !! Je dis bien imaginons ( j’entends déjà certains me dire impossible ) donc imaginons que l’Algérie avec l’aide d’autres pays musulmans déclare la guerre à la France, à votre avis que feront « nos » musulmans, chance pour la France et immigrés de tout poil ??

    • C’est sure, j’ai eu un Algérien ancien gendre, très gentil au demeurant, lors d’une conversation je lui demandais qu’elle attitude il aurait si par hasard il y aurait un conflit entre nos deux pays, sans hésiter il serait contre nous sans état d’âme.

  3. De toutes façons les français vont, encore une fois, gober le récit qu’en fera le pouvoir…comme pour la covid, comme pour l’Ukraine, comme pour le climat etc. Les français gobent la propagande occidentale et n’ont pas encore compris que nos dirigeants marchent en laisse et que leur unique mission est de dévaster l’Europe pour en faire l’espace « réceptacle » des USA et la couper de la Russie pour nous soumettre à jamais. Et les français approuvent tout comme des veaux. En tout cas merci à la covid de m’avoir ouvert les yeux sur l’escroquerie dans nous sommes victime.

  4. Mais qu’a-t-on à gagner avec l’Algérie.
    On a déjà beaucoup perdu et on veut continuer.
    Les allemands culpabilisent avec leur passé nazi (et encore), mais nous n’avons pas le même passé; nous avons construit ce pays qui maintenant nous crache à la figure.

  5. C’était prévus. Notre gouvernement avec le chef de l’état s’est fait encore une fois de plus volontairement particularisé. Le dialogue avec ce pays est impossible, Comment une nation dans son hymne nationale peux, en sous entendu, menacer une autre nation. Faciliter la migration de ses ressortissants alors que ceux issus de ce pays, nés en France se disent d’abord de nationalité de ce pays. Ce n’est qu’aggraver une situation déjà de tension. Savent ils que leur culture n’est pas compatible avec la notre et qu’ils ne pourrons jamais s’adapter à la notre.

  6. Bruno Le Maire n’est pas content du tout d’avoir été traité de lâche par un député RN. Là nous avons quinze lâches d’un seul coup !

  7. Cette équipée grotesque concourt à nous ridiculiser encore un peu plus. La racaille qui squatte notre sol a bien compris que la France est à genou et que c’est le moment d’en profiter. Et ne s’en prive pas.

  8. Il n’y a que la force et la puissance qui peuvent faire pencher la balance . L’Algérie sait fort bien que notre pays courbe l’échine et sert de terre d’asile jusqu’au dernier centime. Toutes nos administrations sont noyautées et dans les villes nous ne sommes plus chez nous.
    Est. – il encore temps de renverser la vapeur ?

  9. Bizarre comme les médias ne parlent pas du fruit de ce voyage fort coûteux pour le contribuable français et dont on aimerait connaître le bilan carbone ! Tout ça pour se faire prendre pour des billes. Et ça c’est paraît-il destiné à défendre la France et les Français : on offre nos industries, l’argent de nos impôts et de nos cotisations dont on sait que des milliards arrivent chaque année en Algérie ! Et les frais de santé, de justice, de séjour dans nos prisons, etc. Tout ça pour la pomme du con-tribuable français spolié. Quant à la restauration de l’histoire, on leur fait confiance …. on a déjà donné ! Si nous sommes en temps de guerre, il faut traiter les traitres comme on le faisait en temps de guerre …. Un peu de dignité voyons !

  10. Le gouvernement fonctionne aux, sentiments maintenant « J’ai le sentiment que, ensemble, nous avons avancé » nous dit El. Borne. En clair, cela veut dire: aucune avancée, RIEN.
    Après le garde des Sceaux qui parle de sentiment d’insécurité, voilà une nouvelle ère, la République du sentiment, c’est nouveau,ça vient de sortir, aurait dit Coluche.

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