Claude Malhuret : le nouveau héraut du système en voie de canonisation !

Avec lui, l’électeur centriste malmené en ce moment chaparde aux extrêmes les frissons de la radicalisation.
claude malhuret

Il était invité en grande pompe sur le plateau de Quotidien (TMC), ce 10 mars, sous un titre flatteur : « la nouvelle coqueluche des anti-Trump ». Ça n’arrive pas tous les jours qu’on flatte à ce point une personnalité de droite dans ce temple de la gauche wokiste. C’est que son dernier discours au Sénat, prononcé le 4 mars, aurait renversé des montagnes et traversé des océans. L’ancien maire de Vichy a répondu aux questions de la BBC anglaise et serait sollicité par les micros et les caméras venus d’Italie, d’Espagne, d’Estonie ou de la chaîne américaine CNN. À 75 ans, le sénateur de l’Allier Claude Malhuret vit son heure de gloire. Pour Le Figaro, il est devenu « la star des réseaux sociaux » et « il se passe toujours quelque chose quand il prend la parole ». Sic.

Pour La Croix, le sénateur est « un habitué des coups d’éclat ». BFM TV le cite : « Les formules, ça me vient comme ça. » Cela fait longtemps que ses propos et ses ambitions ont dépassé les colonnes du palais du Luxembourg. « Je suis content si mon discours peut ouvrir les yeux à un certain nombre d’Américains », lance-t-il modestement sur les ondes de France Inter, ce 11 mars. Il prendra la parole au « World Forum » de Berlin les 18 et 19 février prochains. Seul Marianne prend le super-héros de la gauche française à rebrousse-poil : « Il serait peut-être mieux sur Rire et Chansons », titre le magazine, qui ajoute que « au Sénat, Claude Malhuret fait plus de discours que d’amendements »...

Autopromotion forcenée

S’il promouvait son département avec l’énergie qu’il met à se promouvoir lui-même, l’Allier dominerait, en prospérité, la Californie. Ce n’est pas encore le cas. Du moins Malhuret a-t-il compris le système, dans tous les sens du mot : tirer contre la droite RN, assassiner la NUPES, démonter Trump, dissoudre les gilets jaunes. Tous ceux qui sont en position de faiblesse médiatique en France ont des raisons de redouter ses tirades, approximatives sur le fond mais cruelles sur la forme. Ainsi son mot sur la NUPES lui a-t-il valu une nouvelle onction bienfaisante : il a reçu, en décembre 2023, le prix Hippocrate du 21e prix presse club humour et politique pour sa phrase prononcée le 15 septembre aux journées parlementaires du parti Horizons : « La NUPES est morte. Elle est en soins palliatifs depuis juin. Elle est au stade du prélèvement d’organes. »

C’est, bien sûr, archi-faux, le réservoir de voix des banlieues n’est pas près de se tarir pour le parti de Mélenchon, mais ce petit succès gonfle d’orgueil le sénateur de l’Allier.

Depuis quelques jours, on savoure dans les salons mainstream l’art du sénateur. Avec lui, l’électeur centriste dont la vie est dure en ce moment vole aux extrêmes les frissons de la radicalisation. Ah, vouer Trump aux gémonies ! « Wahshington est devenu la cour de Néron, un empereur incendiaire, des courtisans soumis et un bouffon sous kétamine chargé de l’épuration de la fonction publique. » En quelques mots, le mouton enragé qui a voté Hollande, puis Macron, se croit vengé. Peu importe si la cour de Trump n’a rien à envier, en termes de vertus, à celle de Joe Biden dont le fils n’a apparemment pas brillé par une exceptionnelle vertu. On comprend que les électeurs américains ont eu tort, qu’ils auraient dû consulter M. Malhuret avant de voter et que le nouveau président américain ferait mieux de laisser les choses en l’état. Faute de quoi, le résultat est là : « C’est un drame pour le monde libre, et d’abord pour les USA », affirme le sénateur. Le style Malhuret ne s’embarrasse pas de détails : « Le roi du deal montre ce qu’est l’art du deal à plat ventre », dit-il à propos de Trump, accusé de se soumettre à la Russie ! Le même Trump est accusé de « début de confiscation de la démocratie ». Diable ! Même à La France insoumise, peu osent aller jusque-là. Devenir la vedette de ses adversaires politiques, c’est un choix, une coquetterie, une afféterie délicieuse. L’occasion de cacher sous les froufrous de la vanité l’absence de colonne vertébrale. Tant qu’à donner dans la facilité, autant aller tout droit chez Hitler : il ne faut que quelques secondes au sénateur pour lancer : « Rappelons qu’il a fallu qu’un mois, trois semaines et deux jours pour mettre à bas la République de Weimar et sa constitution. » Grrr.

« Rebâtir la défense européenne »

Au long d’une carrière dominée par le goût de se mettre en avant, le sénateur bourbonnais s’est tout de même fait quelques ennemis. Les antivax ne lui pardonnent pas de s’être refait la cerise sur leur dos. Les gilets jaunes ne sont pas près d’oublier tant de méchanceté et de mépris. Les Français qui ont vécu de près les conséquences de l’affaire du groupe Korian, accusé de maltraitances sur des personnes âgées hébergées dans certaines maisons de retraite, n’oublient pas que Malhuret fut le directeur du développement éthique du groupe entre 2006 et 2014. Curieusement, il n'en parle pas souvent.

Tant pis pour les minoritaires. Malhuret, lui, combat du côté du manche, courageusement, résolument. Ceux qui le connaissent savent que cette figure de mini-Zeus au crâne lisse, lançant des éclairs du haut de la tribune, incarne la figure chimiquement pure du « tout à l’ego » : il n’y a pas la moindre place, dans ce dispositif, pour une idée un peu courageuse ou originale. Dans son discours au Sénat, il entend « accélérer l’aide à l’Ukraine », « éliminer le tabou des avoirs russes gelés » et « rebâtir la défense européenne ». Il fait confiance à von der Leyen et à Mario Draghi, parle de « réarmement moral » - l'équivalent de la « patrie » dans la bouche de Macron - et vomit l’extrême droite placée dans le même panier que l’extrême gauche parmi les méchants anti-Europe et les « collabos qui ont refusé toute aide à l’Ukraine ». Pas de quartier !

L’insurpassable Philippe Muray avait une expression, pour ces personnalités d’autant plus mordantes qu’elles suivent avec obéissance le diktat du politiquement correct : il évoquait les « moutons enragés ». Malhuret est leur berger.

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Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

85 commentaires

  1. Trump, au moins, n’est poas un imbécile : les US ont payé l’Ukraine mais ont tordu le bras à Zielinski pour avoir le monopole de leur minerai. La France leur a donné de l’argent, des armes, de l’instruction, mais ne récupère strictement rien en échange. Et Macron qui passait, aux dires de Minc, Attali et consorts, pour un excellent financier !!!…. A coté de Trump, c’est un gringalet. Quant à Malhuret, ce n’est que le bouffon.

  2. Trois projets : « accélérer l’aide à l’Ukraine, éliminer le tabou des avoirs russes, rebâtir la défense européenne », trois contresens ou idées irréalistes. Zelensky n’est pas prêt à s’arrêter de combattre, c’est la seule justification de son « pouvoir », les avoirs russes, on ne peut pas y toucher, la défense européenne n’a jamais existé en tant que telle, sinon dans l’esprit perturbé d’un chef d’état dépassé qui souhaite partager notre force de dissuasion nucléaire et qui ne sait gouverner qu’en suscitant la peur. Merci, Monsieur le sénateur pour ces brillantes idées !

  3. Les « bons mots » évitent de s’engager en politique. D’où le centrisme rassemblé sur lui-même, opportunisme mercantile débridé.
    Ceux qui ont lu « l’Apocalypse » de Jean, comme je l’ai fait, athée et antithéiste, pour comprendre, ces lecteurs attentifs auront trouvé un aphorisme condamnant le centrisme : « Parce que tu n’es ni bouillant ni froid, je te vomirai! »
    Et puis le gugusse a un alibi: le chef lieu de l’Allier, ce n’était pas Moulins…avant?

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