Au Parlement européen, la GPA reconnue comme « traite d’êtres humains »

L de La Rochère

La gestation pour autrui bientôt reconnue comme traite d’êtres humains ? C’est le chemin que semble prendre le Parlement européen depuis ce vote du 5 octobre de députés réunis en commission. Explications avec Ludovine de La Rochère, présidente du Syndicat de la famille.

Sabine de Villeroché. Que s’est-il passé, ce 5 octobre, au Parlement européen ?

Ludovine de La Rochère. L’Union européenne arrive au moment où elle doit mettre à jour sa directive sur la prévention et la lutte contre la traite d’êtres humains. Le 5 octobre, les commissions du Parlement européen LIBE (libertés publiques) et FEMM (égalité homme-femme) étaient réunies pour voter sur cette mise à jour. Plusieurs eurodéputés, dont François-Xavier Bellamy, qui est président de la délégation française du groupe de la droite européenne (PPE), ont proposé d’inclure la GPA parmi les formes de traite humaine reconnues comme telle par cette directive. Cet ajout a fait l’objet de longues négociations et un amendement de compromis a finalement été adopté, qui considère donc la GPA (« surrogacy for reproductive exploitation » est le terme exact) comme une forme de traite humaine.

S. d. V.  Ce vote en commission du Parlement européen est-il le signe que, bientôt, la GPA pourrait être interdite au niveau européen ? Pensez-vous que les institutions européennes iront jusqu’au bout ?

L. d. L. R. De façon exceptionnelle, parce qu’il s’agit de la mise à jour d’une directive existante, ce texte ne va pas être débattu en plénière au Parlement européen. Il va directement faire l'objet de négociations entre les rapporteurs du Parlement européen, la Commission et le Conseil. En outre, comme la présidence de l’Union européenne est actuellement entre les mains de l’Espagne et que ses dirigeants sont explicitement opposés à la gestation pour autrui, on peut espérer que le processus avance rapidement et dans le bon sens.

Et si la GPA est reconnue comme une forme de traite humaine par une directive, c’est-à-dire un texte qui s’impose à tous les États membres, ces derniers doivent obligatoirement le retranscrire dans leur législation : cela signifie que la pratique des mères porteuses ne peut plus être légale, et ce, dans aucun des pays de l’Union européenne.

Mais un autre élément pourrait venir perturber ce processus : en effet, en parallèle de ce texte, un autre est en train de suivre le long processus d’adoption par la Commission, le Parlement puis le Conseil de l’Union européenne. Il s’agit d’un projet de « certificat européen de parentalité » et il vise à obliger tous les États membres à reconnaître les commanditaires d’un enfant par GPA comme les parents de l’enfant. Il vise, autrement dit, à obliger tous les États membres à reconnaître de facto la GPA.

Nous sommes donc dans un contexte particulièrement tendu en ce qui concerne l’avenir de cette directive.

Comme depuis dix ans en France et dans d’autres États, la lutte contre la GPA est un combat de chaque instant face à toutes les tentatives en faveur de la pratique des mères porteuses. Ses militants tentent de la faire avancer par tous les contournements possibles et imaginables, sous des prétextes plus fallacieux les uns que les autres. Cette question d’état civil, par exemple, ne répond aucunement à un besoin des enfants concernés : contrairement à ce que prétendent les associations LGBT et les avocats des agences de GPA, ces enfants ont bien, comme tous les nouveau-nés, un acte de naissance établi dans leur pays de naissance.

S. d. V. Quel est le rapport des forces en présence dans l’enceinte du Parlement, combien de députés favorables ou défavorables à la GPA ?

L. d. L. R. Il est difficile de répondre avec précision parce qu’il y a beaucoup d’hypocrisie sur ce sujet. Comme il s’agit clairement d’une exploitation de la femme et d’une chosification de l’enfant, des eurodéputés n’osent pas dire publiquement qu’ils sont favorables à la GPA. Pour eux, en effet, la priorité est d’instaurer un « droit à l’enfant ». C’est au moment des votes, qui sont rares sur ce sujet, que nous constatons leur absence ou leur opposition à ce qui pourrait conduire à une condamnation de la gestation pour autrui.

Même s’il ne concernait que 91 eurodéputés sur 705, le vote du 5 octobre est très éclairant à cet égard : ceux du groupe Renew, dont Renaissance fait partie, et les écologistes ont voté contre l’amendement incluant la GPA parmi les formes de traite humaine. Renew a même tenté, au dernier moment, de faire passer un amendement oral allant à l’opposé ! Au final, à l’opposé des centristes, ce sont les voix de la droite et de la gauche qui ont permis l’adoption de l’amendement incluant la GPA parmi les formes de traite humaine.

S. d. V. Quelles conséquences pour la France où, encore récemment, un ministre, Clément Beaune (à l’instar d’autres ministres en exercice comme Olivier Dussopt, Olivier Véran ou Élisabeth Moreno), s’est déclaré favorable à « la légalisation de la GPA à l’avenir » ?

L. d. L. R. La première conséquence concerne directement Emmanuel Macron. En effet, il a toujours dit que la GPA était une « ligne rouge ». Nous allons donc voir si la France se déclare favorable à cette nouvelle version de la directive ou si des manœuvres dilatoires vont être conduites pour y faire obstruction. J’emploie le terme de « dilatoires » car nous savons la capacité d’Emmanuel Macron et de son entourage à faire en douce le contraire de ce qui est dit publiquement en employant les procédés et les prétextes les plus hypocrites.

Nous savons, par exemple, que lorsque Emmanuel Macron présidait l’Europe, durant tout le premier semestre 2022, il avait fait mettre à l’agenda le projet de certificat européen de parentalité. En clair, il avait voulu le faire avancer, alors que rien ne l’y obligeait.

Au-delà de cette conséquence pour Emmanuel Macron, si cette directive est adoptée en l’état, cela bloquera les tentatives de légalisation de la GPA, et pour longtemps. Ce serait, évidemment, une excellente nouvelle pour le respect de la dignité humaine. Mais comme on le voit, cela ne signifie pas non plus qu’il n’y aurait plus de tentative de contournement, c’est-à-dire de décisions visant à faciliter l’exploitation de femmes d’autres continents.

À l’inverse, si cette directive n’était pas adoptée telle quelle, cela signifie que le combat continuerait avec le même acharnement, comme depuis plus de dix ans maintenant, aussi bien contre les contournements que contre l’idée de légaliser cette pratique.

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Sabine de Villeroché
Journaliste à BV, ancienne avocate au barreau de Paris

Vos commentaires

22 commentaires

  1. On s’y perd avec  » Bruxelles ». Le parlement est-il élu ? Il me semble que oui ; les commissions ou commissaires ne le sont pas. Mais les lois ou directives peuvent changer. Malgré des promesses après la PMA pour toutes ( c’est bien ça ? ), des voix progressistes déclarent maintenant être pour. Avec les progressites woke aux manettes , rien n’est sûr, donc. Nous n’avons même plus confiance dans quoi que ce soit venant de ce « machin » ( comme le disait le Général pour l’ONU ).

  2. Si la directive est adoptée l’Ukraine ne pourra plus rentrer dans l’Europe puisque sa grande spécialité est justement cette traite des êtres humains. Je plaisante bien sûr, sinon à quoi serviraient les dérogations ?

  3. Toute mesure consistant à contourner la famille normale, composée d’une mère, d’un père et de leurs enfants étant considérée par la bienpensance comme un « progrès », nous pouvons hélas considérer que ce n’est pas encore gagné.
    Est il aujourd’hui un seul domaine où les responsables politiques qui devraient être les défenseurs de ce qui faisait l’honneur de la civilisation occidentale ne font pas à peu près tout pour la torpiller ?

  4. MER CI au ‘Syndicat de la famille’ de nous alerter…, et BRAVO à Monsieur Bellamy de continuer à défendre la dignité de la femme et de la famille traditionnelle.

  5. Bravo FXB! cet homme se bat avec acharnement à Bruxelles contre toutes les dérives que la gauche islamo wokiste veut imposer à la France. On lui doit de s’être battu contre l’islamisme et ses campagnes de gamines (ou femmes) voilées et ici contre la marchandisation du corps humain. Non, les femmes ne sont pas des machines à fabriquer des bébés et non, le droit à l’enfant n’existe pas. Un enfant, c’est le projet d’un couple et un cadeau de la nature, pas un objet comme on en commande chez Amazon!

  6. J’ai lu rapidement. Très bon article qui me rassure un peu : j’avais réagi à la publication de FXB sur Facebook à ce sujet et j’avais eu comme réaction que cette « interdiction » était limitée au cas avéré de « traite humaine » = non consentement de la « mère porteuse ». En tout cas, certes beaucoup d’hypocrisie et d’actions en sous-mains.

  7. Si la GPA est reconnue comme traite de l’être humain ( ce qu’elle est en fait car ainsi que le faisaient les esclavagistes on vend la particularité d’un être humain , la force pour l’esclave, le ventre pour la GPA ) beaucoup de nos présentateurs telé et autres artistes et politiciens vont peut être avoir à se faire du mouron.

  8. Et qu’en serait-il de ceux qui ont bénéficié de la GPA à l’étranger, et obtenu la naturalisation française de l’enfant?
    Puisque le Conseil d’Etat déboute les opposants à la GPA, sera-t-il accusé de trafiquant?

  9. La GPA, c’est de l’Insémination-Artificielle, comme pour les vaches et les juments. C’est donc du ressort des vétérinaires et du Ministère de l’Agriculture, département Elevage. Dans le cadre de la PAC Européenne !

  10. … « car nous savons la capacité d’Emmanuel Macron et de son entourage à faire en douce le contraire de ce qui est dit publiquement en employant les procédés et les prétextes les plus hypocrites. »
    Voilà, Ludovine de La Rochère le dit on ne peut plus clairement : Macron est un hypocrite !

  11. Vous reparlez ici du fameux « droit à l’enfant ». Rappelons donc qu’on ne saurait avoir droit à quelqu’un, mais seulement à quelque chose ; il s’agit donc bien de « chosification » de l’enfant ! Et avoir droit à quelqu’un, n’est ce pas la légalisation de l’esclavage ?

  12. Porter un enfant pendant 9 mois pour ensuite le donner, non le vendre, est une aberration.
    Si on veut un enfant et que notre choix de vie nous en empêche, il faut se tourner vers l’adoption ou juste assumer les conséquences de nos choix.

  13. Nous avons eu un exemple de ce que vivent les mères porteuses et la façon dont elles étaient traitées quand la guerre a touché l’Ukraine . Un commerce honteux très lucratif pour certains au détriment des femmes et des enfants . Bravo monsieur Bellamy , un enfant n’est pas une vulgaire marchandise .

  14. Monsieur Bellamy a raison et il rend honneur à son mandat de député européen.
    Avoir un enfant n’est pas un droit mais une responsabilité, certainement la plus grande de toutes.
    Concevoir un enfant par GPA, éthique ou pas, est une monstruosité puisque le bébé sera arraché à sa mère dès sa naissance. Je ne comprends même pas qu’on puisse discuter de cela.
    Les ministres sont là pour diriger leur ministère et non pas pour promouvoir des idées personnelles n’ayant rien à voir avec leurs attributions.

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