Afrique du Sud : souvenons-nous du Congo…

À l’époque où Mobutu offrait aux Congolais les biens des Blancs, chassés de leur entreprise sans contrepartie, quelques « bons » Européens, les « rédempteurs », estimaient que ce n’était que justice, qu’il était temps de « rendre au peuple congolais ce que la colonisation lui avait pris ». J’y pense, maintenant que se prépare ce genre de « restitution » en Afrique du Sud, que nous savons ce qui est arrivé au Zimbabwe...

Nous, enfants de la colonie, imaginions à l'époque la conséquence de cette action que les « rédempteurs » arrivés récemment de Belgique ne pouvaient alors concevoir : la ruine du pays. Le Congo[ref]De 1971 à 1997, l'ancien Congo belge porta le nom de Zaïre. Depuis 1997, il porte le nom de République. Il porte, actuellement, le nom de République démocratique du Congo (RDC).[/ref] ne s’en est pas relevé, mais je relève toujours le racisme de ces « rédempteurs » qui estimaient que, parce que les colons étaient blancs, ils devaient partir, et parce que les Congolais étaient noirs, ils pouvaient tout leur prendre… comme si le Congo – à 90 % vide - n’était pas un pays grand comme toute l’Europe, pays offrant d’infinies possibilités aux personnes dynamiques. Pas besoin de spolier, « seulement » besoin de se mettre au travail !

Je hais ce racisme qui s’appelle « antiracisme », qui enlève toute dignité à ceux qui se croient autorisés à piller, racisme assez souvent partagé par les victimes de pillages. Ainsi, un colon dit un jour - c'était vers 1980 - qu’il acceptait d’avoir été privé de ses terres après l'indépendance déclarant : "J’avais honteusement profité de mes ouvriers mal payés, j’avais pu m’acheter deux maisons."

À l'époque des indépendances en Afrique, mon grand-père, vivant et travaillant en Belgique, était très fier d’avoir pu s’acheter plusieurs maisons en Belgique grâce à son dynamisme. Il était fier, aussi, d’avoir toujours bien traité ses ouvriers belges… et quand j’ai vu les maisons où logeaient ses ouvriers, je n’ai pas pu m’empêcher d'imaginer, à côté de ces logements belges assez tristes, les jolis logements pour ouvriers congolais de l’Union minière du Haut Katanga. Il est inutile de clamer que l'ouvrier belge ou français n'était pas mieux traité vers 1960 que l'ouvrier congolais. Nous devons expier nos "fautes" de colonisateurs et personne ne se préoccupe de ce que sont devenus les ouvriers congolais, personne ne voit les taudis qu'ils habitent à l'heure actuelle...

En 2018, la vie du Congolais moyen est l’image de l’enfer – la plupart ne mangent pas à leur faim, ne sont pas soignés quand ils sont malades et leurs enfants ne vont plus à l’école mais travaillent dur pour survivre. Et je déteste de plus en plus ces antiracistes qui critiquent la colonisation, se complaisent dans un sentiment de culpabilité - sentiment confortable qui leur évite toute action utile.

Il est vrai qu’une action utile ne serait pas facile à l’heure actuelle ! On aurait pu continuer l’action des Belges qui favorisaient les Congolais les plus intelligents et les plus dynamiques pour les préparer à prendre un jour les rênes du pays en main - action que menait aussi la France - et je vois notre amie médecin qui a pu commencer l’école secondaire scientifique grâce au « paternalisme » du colonisateur, qui a dû fuir son pays devenu indépendant quand la corruption est devenue insoutenable… Elle pourrait être, aujourd'hui, ministre de la Santé du Congo et nous pourrions vivre au Katanga, la belle province congolaise de notre jeunesse. Rêve triste...

Congo, Zimbabwe, avant-hier et hier. Afrique du Sud, aujourd'hui. Les rêves tristes tournent au cauchemar. Mais les bonnes consciences, ces "rédempteurs" en tout genre, dorment sans doute tranquillement...

Claude Brasseur
Claude Brasseur
Mathématicien, chercheur en énergies renouvelables

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