9 juin 1944 : le massacre de Tulle
Le 7 juin 1944, le lendemain du débarquement en Normandie, les maquis « Francs-tireurs et partisans » de Corrèze lancent une offensive contre la garnison allemande de Tulle. Ils veulent libérer la ville. Ils disposent d’environ 900 hommes. Face à eux, près de 1.500 soldats allemands et vichystes sont mobilisables : 700 hommes du 3e bataillon du 95e régiment de sécurité de la Wehrmacht et environ 800 hommes des Gardes mobiles et de la Milice française.
Selon les témoignages, les combats n’opposent qu’environ 400 FTP à 300 ennemis allemands et vichystes et se déroulent dans une assez grande confusion. D’abord victorieux, les FTP sont contraints de reculer, le 8 juin au soir, devant la puissance de feu de la division Das Reich sous le commandement du Gruppenführer Heinz Lammerding[1] (1905-1971). Les pertes allemandes sont estimées, selon les historiens, entre 37 et une cinquantaine de morts et une soixantaine de disparus. Lammerding décide, le lendemain, d’opérer une rafle concernant les hommes de 16 à 60 ans, mission qu’il confie au SS-Sturmbannführer[2] Aurel Kowatsch.
Selon les messages sonores qu’ils font diffuser dans la ville, les Allemands entendent contrôler les identités. Par petits groupes, les SS ratissent les quartiers et les rues ; ils entrent dans les logements, examinent les hommes qu'ils font sortir ; aux femmes, ils affirment qu'il s'agit d'un contrôle d'identité, que l'absence de leur époux, fils ou frère ne sera pas longue et qu'il est inutile d'emporter des provisions[3]. Au total, près de 5.000 hommes et jeunes gens sont regroupés devant la manufacture.
Les otages sont répartis en trois groupes, de taille et de composition variable au fur et à mesure de la sélection. Finalement, la plupart des hommes sont relâchés à l’exception de 120 hommes regroupés dans deux groupes. Ils sont suspects de participer à la Résistance sur leur simple aspect physiques : ils sont mal rasés et leurs chaussures sont mal cirées. Ils savent qu’ils vont à la mort. Vingt et un d’entre eux échappent au supplice qui les attend. Les Allemands pendent les 99 otages restant aux lampadaires et balcons de la ville. C’était un « spectacle terrifiant pour la population »», témoignait encore Jean Viacroze (1915-2019), dernier rescapé de la pendaison. Les corps des suppliciés sont dépendus en début de soirée par des membres des chantiers de jeunesse, sous les ordres d'hommes de la 4e compagnie du bataillon d'éclaireurs ; malgré l'intervention des autorités locales, ils sont enterrés sur le site d'une décharge publique, à Cueille, sans aucune procédure d'identification, avec une brève cérémonie improvisée et écourtée par les Allemands, au cours de laquelle l'abbé Espinasse, en présence du préfet en uniforme et de son directeur de cabinet, bénit les corps.
Comme Jean Viacroze, 149 prisonniers de Tulle sont transférés à Poitiers puis à Compiègne pour être déportés au camp de Dachau, le 2 juillet 1944. Parmi eux, 101 ne reviendront pas.
Le lendemain, la division SS Das Reich est à Oradour-sur-Glane.
[1] Jugé en 1953 au tribunal de Bordeaux pour crimes de guerre, il est condamné à mort par contumace. Mais l’Allemagne ne l’extrade pas.
[2] Équivalent de commandant
[3] Jean-Jacques Fouché et Gilbert Beaubatie, Tulle. Nouveaux regards sur les pendaisons et les événements de juin 1944, Lucien Souny, 2008
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