En reprenant le Paris Saint-Germain en 2011, grâce notamment à l’entremise de Nicolas Sarkozy, les propriétaires qataris déclaraient vouloir faire signer le « nouveau Messi ». Six ans plus tard, le petit émirat gazier a réussi à attirer dans son navire amiral médiatico-sportif le troisième meilleur joueur du monde en déboursant plusieurs centaines de millions d’euros : le phénomène brésilien Neymar.

Des chiffres qui donnent le tournis, à l’image d’un football moderne devenu un business mondialisé qui fait autant, si ce n’est plus, parler pour les questions financières qui l’entourent lors de la période du mercato estival que pour le jeu en lui-même. Transfert du siècle, déjà, l’arrivée de Neymar pourrait coûter 712 millions d’euros au total, en comptant les cotisations sociales ; soit 222 millions d’euros pour la clause libératoire, 80 millions d’euros de primes, 100 millions d’euros de charges et cinq ans de salaire à 30 millions d’euros par an a minima.

Il s’agit donc bien d’une transaction de tous les records, tant les départs de joueurs titulaires des plus grands clubs d’Europe sont rares. Théoriquement, d’ailleurs, la clause libératoire fixée par le FC Barcelone devait rendre impossibles les éventuelles velléités de départ de Neymar, considérée comme prohibitive pour tous les clubs européens avec l’obstacle du fair-play financier dressé par Michel Platini lorsqu’il était président de l’UEFA afin de limiter la marge de manœuvre des nouveaux riches du football. À l'époque, l’Émirati Mansour bin Zayed Al Nahyan, de Manchester City, et l’oligarque russe Roman Abramovitch, de Chelsea, étaient particulièrement visés, le rachat du PSG n'étant alors qu'une simple rumeur.

Adoptée en 2010, la règle du fair-play financier veut que les clubs ne puissent pas dépenser plus d’argent qu’ils n’en gagnent, avec une tolérance de 45 millions d’euros de déficit. Les sanctions peuvent être lourdes, entraînant parfois l’interdiction de recruter des joueurs, comme le vit cette année l’Atlético Madrid, ou bien encore l’exclusion pure et simple des compétitions européennes. Le fair-play financier avantage plutôt les clubs historiques des grands championnats, la Liga et la Premier League, car il ne prend pas en considération le montant des droits de diffusion et les disparités fiscales en Europe.

Pour respecter cette règle, le Paris Saint-Germain devra probablement « dégraisser » avant le premier septembre en se débarrassant de ses « indésirables », mais aussi - fait nouveau - en vendant des joueurs présentant un intérêt sportif. Si les derniers amateurs du beau jeu se régalent par avance en imaginant les meilleures combinaisons pour faire jouer Neymar, d’un Draxler ou d'un Pastore numéro dix à un milieu à deux sans véritable récupérateur pour profiter de l’armada offensive, on ne pourra pas faire l’économie de quelques réflexions.

D’abord, est-il moralement acceptable que les joueurs de football reçoivent de tels salaires, supérieurs à ceux des plus grands dirigeants d’entreprise ? Oh, j’entends bien les arguments des « réalistes » qui estiment que ce sport génère énormément d’argent et que les propriétaires de clubs sont bien en droit de dépenser leur argent comme ils l’entendent. Oui, l’acquisition de Neymar, à peine 25 ans et dans le top cinq du ballon d’or depuis quatre ans, sera amortie par la vente des maillots et l’augmentation des droits télévisés à l’étranger ; laquelle profitera au passage à tout notre championnat. Reste que ces sommes ont quelque chose d’indécent. Le transfert de Paul Pogba, joueur moyen s’il en est, à Manchester United pour 105 millions d’euros l’an passé ne l’était pas moins. Quant aux montants évoqués pour le départ de Kylian MBappé, tout juste dix-huit ans et à peine une demi-saison jouée au haut niveau, ils sont tout simplement démesurés.

Enfin, le Qatar n’est pas n’importe quel pays. Minuscule État, isolé dans sa région par son grand voisin saoudien, la monarchie sunnite utilise le sport pour améliorer son image à l’étranger. Organisateur de la Coupe du monde 2022, le Qatar avait besoin de frapper un grand coup après le boycott des derniers mois et les accusations portées relatives au financement du terrorisme international ou, du moins, à une tolérance coupable envers certains prêcheurs de haine. Tamim ben Hamad al-Thani doit faire face à l’Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis, au Bahreïn et à l’Égypte, qui ont brutalement rompu leurs relations diplomatiques et fermé leurs frontières avec son émirat. En toile de fond, aussi, une attaque contre beIN Media Group, qui détient Al Jazeera et beIN Sports, chaîne bien connue en France, dont le siège se trouve à Doha…

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03 août 2017 à 15:12

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