Comment les Mémoires de Jean-Marie Le Pen sont devenus un best-seller

Malgré l’offensive médiatique portée contre son livre et sa personne, on apprend que le premier tome des Mémoires de Jean-Marie Le Pen, à peine sorti, connaît un immense succès. Il est en tête des ventes sur Amazon. Un nouveau tirage de 50.000 exemplaires est en cours. Pour un ouvrage dont on prophétisait l’échec !

Beaucoup de journalistes ou de politologues n’ont pourtant pas lésiné sur leurs efforts pour disqualifier ces fameux Mémoires, sur la base de quelques extraits, en cherchant à disqualifier l’homme : antisémite, pétainiste, tortionnaire et (cerise sur le gâteau) présumé intégriste, puisque son éditeur serait proche des milieux catholiques traditionalistes.

Quiconque prétend réfléchir avant de juger devrait se montrer curieux de connaître le regard d’une personnalité politique sur trois Républiques, sur les événements tragiques qui les ont marquées – la Seconde Guerre mondiale, la guerre d’Indochine, la guerre d’Algérie – et juger sur pièces. D’autant plus que des mémoires ne sont pas a priori un écrit provocateur ni polémique, mais un témoignage sur sa vie et sur l’Histoire. Force est de constater que trop de médias ne pensent qu’à travers le filtre monochrome de leurs préjugés.

Jean-Marie Le Pen, se plaisent-ils à souligner, estime notamment que le maréchal Pétain "n'a pas failli à l'honneur en signant l'armistice" avec l'Allemagne nazie en 1940 : c’est un des passages les plus cités de son livre. Comme s’il était scandaleux de le penser. Ces journalistes, si prompts à donner des leçons de morale, devraient commencer par se cultiver plutôt que de répéter, comme des perroquets, les slogans de la pensée unique.

La vérité historique est plus complexe. Elle ne se réduit pas à une division manichéenne des Français entre bons et méchants, entre résistants et traîtres. Les plus actifs dans la collaboration venaient de la gauche. Dans les rangs de l’armée restée fidèle à Pétain, beaucoup estimaient qu’il fallait sauver ce qui restait des forces françaises – à commencer par sa flotte – mais considéraient que l’ennemi à vaincre, c’étaient « les Boches ». On sait comment tout cela se termina.

Pour avoir une vision plus éclairée de l’Histoire, nos journalistes bien-pensants pourraient lire, par exemple, l’ouvrage de Jacques Laurent Année 40, Londres-de Gaulle-Vichy (1965). Il y écrit, entre autres, que "l'histoire officielle ne s'est jamais résolue à admettre que de Gaulle était parti pour Londres comme envoyé de Paul Reynaud". Propos qui donne à réfléchir, même si on ne lui accorde pas une confiance aveugle.

En croyant lui nuire, les médias ont fait à Jean-Marie Le Pen une publicité hors pair. Il était évident que la droite authentique, la droite patriote, celle qui a été blessée par la politique algérienne du général de Gaulle – faut-il rappeler que beaucoup d’anciens résistants se retrouvèrent dans les rangs de l’OAS ? –, des rapatriés, des harkis et leurs descendants, se précipiteraient sur ces Mémoires.

S’y ajoutent tous les curieux d’Histoire et de petite histoire, tous ceux qui, même s’ils ne partagent pas les idées de l’ex-président du Front national, considèrent l’esprit critique comme une qualité, ne se laissent pas guider par la pensée unique, souhaitent se forger une idée par eux-mêmes. Au total, cela fait pas mal de monde !

En voulant discréditer ses Mémoires, les médias en ont fait un best-seller.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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