Union européenne : finalement, l’Américaine Fiona Scott Morton renonce

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Il s’en est fallu de peu. Il est vrai que le scandale commençait à prendre des proportions inquiétantes. De quoi s’agit-il ? Tout simplement de la nomination d’une des représentantes les plus emblématiques des élites politico-économiques américaines en tant que « cheffe économiste de la direction générale de la concurrence » dans les plus hautes instances européennes. Ce qui signifie qu’en pleine guerre économique de moins en moins larvée avec les USA, Bruxelles entendait nommer en son sein une farouche ennemie de notre Vieux Continent. Un peu comme si l’on demandait à Sandrine Rousseau de prendre la direction du couvent des Oiseaux.

En ce site, le tocsin avait déjà été sonné par Georges Michel : « Cette économiste à Yale et ancienne fonctionnaire de la justice conseille également deux des plus grosses entreprises du secteur – Amazon et Apple –, alors qu’elles affrontent des enquêtes fédérales anti-monopole. Cela la fiche peut-être mal pour celle qui était présentée, sous Barack Obama, comme la grande experte anti-trust. »

Mais ce sera finalement « non ». Un « non » contrit. Un « non » contraint : « Je suis honorée d’avoir été choisie […] Cependant, au vu de la controverse politique qui a débuté en raison de la sélection d’un non-Européen pour occuper le poste, […] j’ai déterminé que la meilleure ligne de conduite était de me retirer », admet la principale intéressée. Une décision que paraît déplorer la Danoise Margrethe Vestager, commissaire européenne en charge de la Concurrence : « J’accepte cela avec regret et j’espère qu’elle continuera à utiliser ses compétences extraordinaires pour faire pression en faveur d’une application stricte de la concurrence. »

Pour ce qui est de la « controverse politique », madame, même discrètement exfiltrée, est servie. Service minimum, pour commencer : « Je salue la décision de Fiona Scott Morton de retirer sa candidature » (Stéphanie Yon-Courtin, députée européenne macroniste du groupe Renew, « Renaissance », en bon french) ; « Nous sommes satisfaits de cette décision qui préserve la souveraineté numérique », affirme-t-on du côté de Jean-Michel Barrot, ministre délégué chargé du Numérique.

Mais retour de service un peu plus appuyé chez LR. François-Xavier Bellamy : « Ce n’est qu’une première étape. Il faut maintenant faire la lumière sur le processus qui a conduit à ce recrutement. » Geoffroy Didier, l’un de ses collègues républicains au Parlement européen, enfonce le clou : « Embaucher une lobbyiste américaine des GAFAM au moment où l’Europe se décidait enfin à limiter leur pouvoir, c’est un comble. » Même Karima Delli, députée EELV, s’en mêle : « Ce qui est le plus étonnant, c’est que ce refus vienne d’elle, qu’elle ait été défendue par la Commission jusqu’au bout, alors que le Parlement a montré un front uni. » Un front qui, en l’occurrence, va jusqu’au Rassemblement national, dont le groupe parlementaire constate : « C’est une défaite pour la Commission européenne et une belle victoire pour les intérêts français. »

Et Emmanuel Macron, au fait ? Tout juste s’est-il montré « dubitatif ». Là, service vraiment plus que minimum. Mais que demander de plus à un homme qui indexe sa feuille de route politique sur les recommandations du cabinet McKinsey, autre épigone, avec Fiona Scott Morton, du soft power américain. Et dire que ce sont les mêmes qui passent leur temps à se mobiliser contre les ingérences étrangères, économiques comme politiques, menées par des pays tels que la Chine et la Russie…

Pourtant, histoire de se convaincre que cette nomination était tout, hormis anodine, il suffisait d’ouvrir Le Monde du 17 juillet. Là, Matt Stoller, directeur du groupe de réflexion American Economic Liberties Project et très en pointe dans la lutte contre la mainmise des GAFAM sur le monde politique, dénonce : « Fiona Scott Morton est un cheval de Troie pour Big Tech à la Commission européenne… »

Il est vrai qu’entre un Emmanuel Macron répondant aux questions de Pif Gadget, un Olivier Dussopt, ancien ministre délégué chargé des Comptes publics faisant de même aux journalistes de Têtu et Marlène Schiappa, qu’on ne présente plus, posant dans Playboy, ça ne laisse plus beaucoup de temps pour lire le quotidien vespéral donné pour être de référence. C’est ballot.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

20 commentaires

  1. d’après M.Bellamy : « il faut maintenant faire la lumière sur le processus qui a conduit à ce recrutement » . Il me semble avoir lu récemment que ledit processus se nomme Mme Von den Leyen, aurais-je rêvé que cette dame non élue prend des décisions et recrute sans l’aval des membres dirigeants de l’UE ?

  2. Le Français moyen que je suis en est encore à se demander comment des décisions extravagantes sont prises par les eurocrates de Bruxelles, en se moquant éperdument des critiques éventuelles par quelques représentants clairvoyants des populations et états qui sont censés constituer l’UE. Nous sommes paraît il en démocratie ! Et que dire du credo de Bruxelles, qui se limite à faire de la concurrence à tout prix, y compris au détriment des Européens, l’alpha et l’oméga de sa politique ? Il serait temps de reprendre le pouvoir sur les cinglés qui ont maintenant presque tout pouvoir à Bruxelles.

  3. Exceptionnellement en effet le commentaire paru au quotidien ‘le Monde’ diffusait un diagnostic EXACT….
    Mais tout est bien qui finit bien dans l’UBULAND de BRUXELLES. Tournons la page mais restons attentifs.

  4. Le qatargate, ce sera du pipi de chat quand on aura réussi à dévoiler la corruption US.
    En attendant, on comprend pourquoi les politiques européenne et française sont si éloignées des attentes des gens.
    Quand je pense que certains persistent à dire que Macron est intelligent…

  5. La « Spy democrat » ne mettra pas la tête sur le billot pour couvrir l’oncle Joe en fin de carrière !

  6. C’eut été un pas de plus pour que Biden et sa bande rentre un peu plus dans le vagin blet de l’Europe de Layen. Mais ce n’est que reculer pour mieux y pénétrer, soyez-en sûrs !

  7. Tant mieux elle a renoncé .nullement besoin d’elle .,mais elle est intelligente au moins …elle a entendu et s’est retirée …..qu’un certain chez nous qui es souvent Hué en fasse autant pour notre survie .

  8. Que voilà un femme de bon sens ! Elle au moins aura eu le courage d’abandonner, au contraire de nos ministres dont 42 auraient dû démissionner pour incompétence. Mais ça, hélas, est une autre, triste, histoire ; française celle-là.

  9. « Et dire que ce sont les mêmes qui passent leur temps à se mobiliser contre les ingérences étrangères, économiques comme politiques, menées par des pays tels que la Chine et la Russie ». M Gauthier a la mémoire courte.Il fait mine d’oublier une certaine commission d’enquête parlementaire présidée par le ci-devant Jean-Philippe Tanguy qui avait cru malin de pointer les mêmes supposées ingérences – russes naturellement – et qui s’est pris un joli retour de manivelle …

  10. Sarkozy avait pourtant bien préparé le terrain avec sa haute trahison aux résultats du référendum de 2005 !

  11. Depuis l’origine l’UE est sous influence US , voir le pédigrée des Français ayant mis en place l’UE , et un exemple portugais , un étudiant dirigeant maoïste , après formatage dans les universités et cabinets de conseil américains , devient un des dirigeants de l’UE.
    Alors on va trouver un ou une remplaçante à Fiona Scott , en apparence plus « européen » mais convenablement formatée US.
    Maintenant je préfère l’influence US à l’influence chinoise , ou à l’influence musulmane à la quelle on n’échappera pas , le nombre oblige et a toujours fait la loi .

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