[Tribune] Voyage en Arménie : quand la réalité de la guerre vous saute aux yeux
5 minutes de lecture
Avec mon collègue député français au Parlement européen, Nicolas Bay, nous nous sommes rendus en Arménie, du 30 septembre au 3 octobre, en réaction aux attaques de l’Azerbaïdjan et par solidarité vis-à-vis du peuple arménien.
Je l'avais annoncé à l'issue de ma première visite : à l’invasion de l’Artsakh en 2020 succéderait inévitablement l’invasion du territoire souverain de l’Arménie. L’Artsakh n’était qu’une étape du plan turco-azerbaïdjanais visant à reconstituer l’Empire ottoman qui passe par ces territoires. Depuis deux ans, l’armée azerbaïdjanaise a continué ses provocations en refusant de libérer les prisonniers de guerre, dévastant les sites historiques, culturels et cultuels chrétiens et causant des escarmouches ponctuelles.
105 ans après le génocide des Arméniens, la Turquie d’Erdoğan a décidé de sous-traiter cette fois-ci les basses œuvres à son allié Aliyev en lui apportant un soutien logistique, militaire et humain. Dans la nuit du 12 au 13 septembre, les soldats de ce dernier ont franchi les frontières en plusieurs points, pourtant reconnues inviolables par le droit international, et progressé sur plusieurs kilomètres. Après avoir bombardé les sites militaires, ils ont pris pour cible les civils, causant des dégâts sur des écoles, une mairie, des installations agricoles, des convois de voitures et causant des morts parmi la population.
Comme il y a deux ans, j’ai commencé par me rendre au mémorial du génocide à Erevan en vue de conserver en mémoire ce que le futur pourrait nous réserver si nous n’agissons pas. Le moment de recueillement qui a suivi au cimetière militaire m’a rappelé cette vérité de Garéguine Njdeh, philosophe, militaire et stratège arménien : « Si tu veux connaître et voir l’avenir d'un peuple, regarde sa jeunesse. » Une jeunesse en partie fauchée par la guerre mais une jeunesse qui permet à l'Arménie de croire en l'avenir.
Nous nous sommes ensuite rendus sur la ligne de front à Vardenis, où le maire a exprimé le sentiment d’impuissance face à la violence des bombardements et demandé l’intervention de la communauté internationale. Douze des villages alentour ont été bombardés et nous avons bien vu que l’armée azerbaïdjanaise avait pris position et ne donnait aucun signe de retrait.
La réalité de cette guerre saute aux tripes et au cœur quand vous l’avez devant vos yeux. Un Arménien nous a expliqué avoir quitté sa maison avec sa famille avant qu’un obus ne tombe dans la chambre de son fils. Plus tard, nous avons rencontré un chauffeur de poids lourd qui, s’étant porté volontaire pour aller chercher les blessés, sans arme, a été gravement blessé à la jambe. Voir ses parents et ses enfants, qui auraient pu être orphelins aujourd’hui, ne laisse pas indifférent.
Nous nous sommes également recueillis devant la dépouille d’un soldat arménien dont le corps avait été rendu par ses ennemis vingt jours après sa mort, démembré. Sa famille veillait le cercueil dans son salon sans pouvoir regarder ce corps meurtri, recouvert d’un drapeau arménien et encadré par deux jeunes soldats.
Incontestablement, il y a bien un agresseur, l’Azerbaïdjan, et un agressé, l’Arménie. Nous avons pu constater l’évidence de la guerre, des exactions et des crimes qui l’accompagnent. Un richissime État de onze millions d’habitants menace la première nation chrétienne du monde, quatre fois moins peuplée, avec une disproportion de moyens et humaine criante.
À cela il faut rajouter le désastreux sens du timing de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, qui a choisi de conclure des accords gaziers avec l’Azerbaïdjan, en grande pompe, sans obtenir de garanties de leur part concernant leurs volontés expansionnistes. Elle l’a présenté comme une victoire face à Poutine, mais c’est en réalité une victoire d’Erdoğan et d’Aliyev.
Quand l’Azerbaïdjan utilise des drones à 300.000 euros l’unité pour détruire une position arménienne dans laquelle un soldat est armé d’un simple fusil, c’est nous qui le finançons avec nos impôts. L’Arménie n’a malheureusement pas de pétrole et de gaz dans son sous-sol. Est-ce pour cela qu’elle devrait être abandonnée ?
Sur place, une organisation non gouvernementale, SOS Chrétiens d’Orient, ne les abandonne pas en engageant de nombreux volontaires sur le terrain. Ils sont pilotés par leur chef de mission Corentin, qui fut un guide précieux pour les observateurs que nous étions. Ils mettent en place de l’aide alimentaire, de la formation professionnelle, des ateliers de couture, entretiennent un centre culturel franco-arménien à Goris, donnent des cours de français aux Arméniens, achètent des chalets pour que les agriculteurs puissent vendre leurs produits, fournissent des scanners à l’hôpital ainsi que du bétail aux familles pauvres. Cette jeunesse investie répare également les maisons en piteux état ou les toitures bombardées. Elle restaure notamment les églises, cibles privilégiées de la haine azerbaïdjanaise. On ne peut lister ici les nombreuses actions qui ont permis à l’association de nouer une relation de confiance avec les élus locaux et la population. Il me fallait saluer ceux qui sauvent l’honneur de notre pays en s’engageant à la sueur de leur front dans ce contexte de guerre. Si la France est encore dans le cœur des Arméniens, c’est aussi grâce au courage et aux actions de ces bénévoles de SOS Chrétiens d’Orient.
Inutile de préciser que ce fut un voyage fort en émotion et que ces émotions ne passeront pas tant que rien ne sera fait pour apporter des garanties de paix au peuple arménien. La France, fille aînée de l’Église, a un devoir de soutien envers cette nation éprouvée et son peuple qui demande seulement de vivre sur ses terres ancestrales sans en être chassé et sans voir son patrimoine méthodiquement détruit.
37 commentaires
M. le sénateur,
Que comptez-vous faire maintenant avec vos amis députés pour dénoncer OFFICIELEMENT ce nouveau génocide ?
l’histoire se répète….hélas – si en 1915 la France et d’autres s’étaient manifesté et opposé au génocide Arménien, la Shoa n’aurait pas eu lieu !
Génocide programmé par les Jeunes Turcs qui ne se dissimulaient aucunement : «Il faut mettre fin à leur existence, aussi criminelles que soient les mesures à prendre. Il ne faut tenir compte ni de l’âge ni du sexe. Les scrupules de conscience n’ont pas leur place ici». L’armée française y perdra (déjà) sa dignité : Près de 200 000 Arméniens survivants étaient réinstallés en Cilicie, protégés par les troupes françaises mandataires de la Syrie. Mais en février 1920, Mustapha Kemal les attaqua. Les Français évacuèrent sans combattre dans la nuit du 10 au 11 février 1920 la ville de Marach, ni sans prévenir les habitants chrétiens dont 30 000 d’un coup seront massacrés par les Turcs le matin suivant. Pas d’excuse mais une explication : Mustafa Kemal, futur Ata Turc, était Franc-maçon, comme le plupart des dirigeants de la IIIè république française. Il était donc vertueux par nature.
Les gouvernements mondialistes sont toujours prêts à se prostituer pour payer les matières premières moins chères. Après tout, l’opportunité de faire son marché à l’endroit le plus rentable de la planète est un des avantages tant vantés du mondialisme. Cela ne m’étonnerait pas que ce soit Poutine qui aille sauver l’honneur du monde chrétien en prêtant main forte aux Armeniens. Comme en Syrie.
Vous plaisantez surement, Poutine a envahi l’Ukraine et causé la mort de milliers de chrétiens des deux cotés, alors que l’islam ronge son pays, il a comme allié l’islamiste Kadirov qu’il vient de nommer général et vous comptez sur lui pour qu’il aide les chrétiens d’Arménie, détrompez vous, la Russie de Poutine ne fera rien, d’ailleurs elle n’a même pas les moyens.
Même opinion
Macron et Bruxelles grands défenseurs de l’islam vous n’imaginez tout de même pas un geste de ces gens là pour aider des chrétiens. Ma région est l’une de France la plus peuplée d’arméniens. Ces personnes sont travailleuses ,pieuses et honnêtes ,la macronie n’est donc pas concernée par leur destin.
D’avoir vu récemment von der Layen plastronner et faire des risettes au dictateur azerbaïdjanais me donne la nausée. Décidément, cette union européenne et ses dirigeants élus par personne sont à vomir !
Elle était moins fière au garde à vous devant erdogan !
Merci de le rappeler.
tout à fait , l’europe est exactement le reflet de l’europe que voulait hitler ..
Merci . également .
Dans les pays agresseurs il y a les mauvais agresseurs et les bon agresseurs de pays souverains tout comme les mauvais dictateurs et les bon dictateurs. Cherchez les, c’est très facile. Elle est pas belle la vie ?
L’Azerbaïdjan est l’ami de Madame Von der Leyen parce ce pays est producteur de gaz et de pétrole.
La Turquie est l’ami de Madame Von der Leyen parce que la Germany possède la plus grande communauté turque en Europe.
Madame Von der Leyen qui n’est pas élu président de l’EU par les européens, agit comme si c’était le cas, sans que cela ne semble troubler les chefs d’État membres de l’EU à une minuscule poignée prés.
Donc, par son incompétence et son manque de vue à long terme, tous ce beau monde qui a créé une crise énergétique en EU, n’a que faire de ce petit pays qu’est l’Arménie qui de surcroît est chrétien !
Même Macron se moque complètement de l’Arménie, alors que cette dernière est une amie historique de la France ! Il n’a pas prononcé un seul mot, encore moins offers des canons César, le stock étant parti pour l’Ukraine !
Ah oui, j’allais oublier, Macron, Von der Leyen sont les deux bellissistes européens qui entraînent l’EU et ses dirigeants aveugles dans une guerre (mondiale) voulu par joe Biden qui avec son fils le dépravé Hunter, et sa famille sont « board Members » de « Burisma Holding Energy » une société productrice d’énergies ukrainienne !
La boucle est bouclée, et les européens comme vous et moi n’ont plus qu’à se mettre au 19° maximum facturés un maximum, au chaussettes de laine, au col roulé, au rutabaga, et à laisser leur voiture électrique au garage.
L’abondance c’est fini, mais pas pour tout le monde !
Excellente analyse, vous avez raison, macron et l’UE nous ont emmené sur la voie unique d’un conflit mondial dont les peuples européens seront la « chair à canon » et plus rapidement qu’on ne le pense.
Le pire là-dedans, c’est que ça ne semble déranger personne !
Et la Germany se réarme au nez et à la barbe du monde entier, sans que cela ne semble troubler les chefs d’État membre de l’EU !
« reconstituer l’Empire ottoman » ne pose aucun problème à biden … Donc « tout » ou presque peut être perpétré dans cette zone de la planète !
La Turquie d’Erdoğan ne gêne pas non plus, semble t-il, vonderlayen et macron qui n’ont aucune compétence « diplomatique et géopolitique » car leur idéologie mondialiste et européiste leur fait se croire indispensables. Ils ont l’infamie de la corde qui dit à son pendu « Je suis ton seul soutien »
La France a un devoir de soutien au peuple arménien, mais en a t’elle le courage, elle qui se soumet à von der Leyen et Erdogan. Nos politiques manquer de courage pour certains et Aznavour n’est plus là pour le leur rappeler.
N´aurait-il pas un fils pour prendre le relais ?
Aucun intérêt pour Macron, Von der Leyen et compagnie, ce ne sont que des Chrétiens massacrés au nom de l’islam, grand ami de Macron et de la commission européenne (l’islam)
Très peu de gens en parlent et personne à la TV. Biden n’a pas autorisé les reportages sur ce sujet.
Bien évidemment. L’Arménie n’intéresse pas le sénile Biden. Ni nos médias, par ailleurs, pourtant si prompts à nous décrire avec force reportages, les actuelles victoires de l’armée ukrainienne , avec en prime les fanfaronnades belliqueuses d’un Zelinsky.
Au fait, notre philosophe-soldat d’opérette BHL qui s’est rendu récemment à Kiev, qu’en pense-t-il du conflit Azerbaïdjan/Arménie?
On aimerait bien qu´il en parle objectivement.
Mais que vaut la vie de Chrétiens pour nos dirigeants, l’OTAN, et toute la bien pensante occidentale ?
Merci Stéphane.
Stéphane Ravier oublie de dire une chose importante : l’Azerbaïdjan bénéficie du soutien d’Israël, un allié de poids du fait de son influence sur la politique extérieure des USA. Benny Gantz s’est rendu cette semaine à Bakou dans le but de favoriser la coopération en matière de défense entre Jérusalem et Bakou.